Une tache solaire, baptisée AR3038, affiche une croissance extrêmement rapide : sa surface a doublé en seulement 24 heures ! Elle fait désormais environ 2,5 fois la taille de la Terre. Cette tache possèderait un champ magnétique instable de type bêta-gamma, susceptible d’entraîner une éruption solaire de classe M. Or, cette tache solaire fait directement face à notre planète, ce qui pourrait occasionner des coupures radio.
Les éruptions solaires se produisent lorsque l’énergie stockée dans des champs magnétiques torsadés (généralement au-dessus des taches solaires) est soudainement libérée. Cette libération d’énergie entraîne alors une rafale de rayonnement sur tout le spectre électromagnétique, des ondes radio aux rayons X et gamma. Elle peut également s’accompagner de jets explosifs de matière, que l’on appelle des éjections de masse coronale. Certains groupes de taches solaires ont une structure magnétique plus complexe que d’autres et sont plus susceptibles de conduire à une éruption solaire.
Les taches de type bêta-gamma ne sont pas les plus actives (la palme revient aux taches solaires de type delta), mais comptent tout de même parmi les plus grosses et les plus complexes. En outre, celle-ci est orientée directement vers la Terre, ce qui pourrait avoir de fâcheuses conséquences. En effet, lorsqu’une éruption solaire frappe la haute atmosphère de la Terre, les rayons X et ultraviolets ionisent les atomes, rendant impossible le rebond des ondes radio haute fréquence, ce qui crée un blackout radio.
Des événements plus ou moins menaçants
Ces pannes radio sont classées (de R1 à R5) en fonction de leur gravité ; elles touchent les parties du globe qui sont exposées au Soleil au cours de l’éruption. Les éruptions solaires se déplaçant à des vitesses proches de celle de la lumière, elles mettent environ huit minutes pour parcourir les quelque 150 millions de kilomètres qui nous séparent du Soleil.
La Terre a déjà été confrontée à ce type d’événements à plusieurs reprises. Deux éruptions survenues ce printemps ont ainsi provoqué des blackouts de niveau R3 sur l’océan Atlantique, l’Australie et l’Asie. En mars 1989, c’est tout le Québec qui a été plongé dans le noir pendant plusieurs heures suite à une puissante éruption ayant provoqué d’importantes variations de tension sur le réseau électrique de la province canadienne. Plusieurs autres réseaux électriques d’Amérique du Nord ont ressenti l’effet de cette tempête et signalé des incidents.
La plus grande tempête solaire que notre planète ait connu jusqu’à présent s’est produite en 1859. Le phénomène, appelé « l’événement de Carrington », a libéré une énergie équivalente à 10 milliards de bombes atomiques d’une mégatonne ! Cet intense flux de particules a fortement perturbé les réseaux télégraphiques de l’époque et provoqué de nombreuses aurores polaires, visibles jusque dans les régions tropicales ! Si un événement de même intensité se reproduisait aujourd’hui, inutile de dire que les dégâts seraient considérables.
Et nous avons déjà évité le pire : une puissante éjection de masse coronale a traversé l’orbite terrestre en juillet 2012… une semaine avant que notre planète ne se trouve à cet endroit précis ! À quelques jours près, nous aurions pu nous retrouver au 18e siècle. Cette éruption aurait en effet largement perturbé le réseau électrique mondial, les transports aériens, les télécommunications ou tout autre équipement électronique.
Une activité solaire relativement soutenue actuellement
Fort heureusement, AR3038 n’est pas aussi dangereuse. Actuellement, elle se situe légèrement au nord de l’équateur solaire et la Terre restera dans sa ligne de mire pendant quelques jours encore. Lorsqu’une tache se forme près de l’équateur, il lui faut en effet un peu moins de deux semaines pour se retrouver de l’autre côté du Soleil — où elle ne constitue plus une menace pour nous.
Malgré sa croissance particulièrement rapide, cette tache solaire géante n’est pas si inquiétante que cela. Si elle devait produire des éruptions en notre direction, il ne s’agira que d’éruptions de classe M — le type d’éruption solaire le plus courant. Ces événements provoquent généralement de brèves coupures de courant radio affectant les régions polaires de la Terre, selon Spaceweather.com. Des tempêtes de rayonnement mineures peuvent parfois suivre ce type d’éruption.
Si des particules issues d’éjections de masse coronale sont absorbées par le champ magnétique terrestre, elles déclenchent en revanche de puissants orages géomagnétiques. Le flux de particules hautement énergétiques du Soleil est canalisé et se propage le long des lignes de champ magnétique, près des pôles. Ces particules ionisent les atomes de la haute atmosphère, qui ne peuvent demeurer à l’état excité : ils reviennent à un état de plus basse énergie en libérant de l’énergie sous forme d’un photon, ce qui crée de magnifiques aurores polaires colorées.
Mais ce flux de particules chargées peut aussi perturber le champ magnétique au point d’envoyer les satellites s’écraser sur Terre ! SpaceX a d’ailleurs déjà fait les frais de ce phénomène, qui a entraîné la perte d’une quarantaine de ses satellites en février. Ainsi, les orages géomagnétiques extrêmes pourraient paralyser nos systèmes de communications, y compris l’Internet. Le Soleil est particulièrement actif actuellement, car nous avons entamé en 2020 un nouveau cycle solaire (chaque cycle dure environ 11 ans). Cette activité devrait augmenter régulièrement au cours des prochaines années, pour atteindre son maximum en 2025. Jusqu’à présent, le nombre de taches solaires observées dépasse déjà nettement les prédictions.