Une méthode basée sur les rayons X pourrait permettre d’étayer les théories quantiques alternatives

Elle permettrait notamment de décrypter l’effondrement de la fonction d’onde.

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Des chercheurs ont développé une méthode qui pourrait permettre d’étayer les théories alternatives à la théorie quantique standard. Basée sur les rayonnements X à basse énergie, la technique consiste notamment à décrypter le phénomène dit « d’effondrement de la fonction d’onde », ce qui pourrait découler sur une explication potentielle à la raison pour laquelle les effets quantiques ne sont observés qu’au niveau microscopique.

D’après la théorie quantique standard, les objets peuvent exister dans un état de superposition au cours duquel ils présentent simultanément de multiples propriétés contradictoires. Cet étrange phénomène est illustré par le célèbre « paradoxe du chat de Schrödinger », où un chat enfermé dans une boîte avec une fiole de poison peut être à la fois mort et vivant. Dans le domaine de la physique, cela peut par exemple s’illustrer par une particule se trouvant à deux endroits à la fois, ou par un atome radioactif qui est à la fois désintégré et non.

Selon cette théorie, la superposition quantique devrait également être observée au niveau d’objets plus grands, étant donné qu’ils sont eux-mêmes composés d’assemblages d’éléments microscopiques. Cependant, ces effets ne semblent s’appliquer qu’aux objets microscopiques ou subatomiques — une contradiction que les physiciens tentent de décrypter depuis plusieurs décennies. L’objet le plus massif chez lequel la superposition quantique a été observée à ce jour ne fait que 16 microgrammes.

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D’un autre côté, pour des raisons qui demeurent un mystère, la fonction d’onde des systèmes quantiques a tendance à s’effondrer. La fonction d’onde est un modèle mathématique permettant de suivre l’évolution des systèmes quantiques. L’effondrement de la fonction d’onde traduit ainsi le passage d’un état quantique à classique par le biais de l’effondrement de plusieurs états en un seul.

« Pour une raison inconnue, ces fonctions d’onde observées ont tendance à s’effondrer, ce qui fait que les systèmes quantiques se comportent comme des systèmes ‘classiques’ et perdent leurs véritables attributs quantiques », explique dans un communiqué du Foundational Questions Institute (FQxl), Catalina Curceanu, de l’Institut national de physique nucléaire de Frascati en Italie et de l’Institut national Horia Hulubei de physique et d’ingénierie nucléaires en Roumanie. Cet effondrement se produit lorsque le système est observé ou mesuré. Dans l’exemple du chat de Schrödinger, sa fonction d’onde s’effondre lorsqu’un observateur dévoile son état, tandis que celle de l’atome radioactif s’effondre lorsque son niveau de désintégration est mesuré.

Ces problèmes ont conduit les physiciens à développer des théories alternatives à l’hypothèse quantique standard. Appelées « modèles d’effondrement quantique », elles suggèrent qu’un processus physique déclenche l’effondrement de la fonction d’onde de sorte que plus le système est grand, plus l’effondrement est rapide. Il a été avancé que ces processus pourraient se manifester sous la forme de rayonnement spontané. « Cela signifie que des expériences pourraient un jour prouver que ces modèles sont corrects », suggère Curceanu. Dans le cadre de leur nouvelle étude, publiée dans Physical Review Letters, Curceanu et ses collègues proposent un nouveau protocole expérimental qui pourrait étayer certaines de ces théories alternatives.

rayon X quantique
Le dispositif expérimental utilisé pour étudier les fondements de la mécanique quantique et les théories alternatives au laboratoire souterrain LNGS-INFN du Gran Sasso. © Catalina Curceanu

Un taux de rayonnement dépendant de l’espèce atomique

Deux principaux groupes de modèles d’effondrement quantique ont été proposés. Appelés modèles de localisation spontanée continue (CSL), les premiers impliquent un processus intrinsèque ou aléatoire lié ou non à la gravité, ainsi qu’à un autre mécanisme physique. Comme son nom l’indique, ce processus se produirait de manière spontanée et continue pour conduire à la perte des propriétés quantiques d’un système. Les seconds impliquent la gravité de manière plus directe.

Curceanu et ses collègues, ainsi que d’autres équipes externes à l’étude, ont passé plusieurs années à déterminer si des rayonnements gamma spontanés à haute énergie pouvaient induire un effondrement de la fonction d’onde (selon les modèles CSL). Cependant, aucun effondrement induit par ce type de processus n’a jusqu’à présent été mis au jour. Néanmoins, cela a permis d’améliorer ou d’exclure diverses versions des modèles, en particulier celles plus simples liées à la gravité. Les précédents travaux ont également permis d’affiner les paramètres des modèles CSL.

Dans le cadre de ses derniers travaux, l’équipe de Curceanu a évalué les caractéristiques du rayonnement électromagnétique spontané qui devrait être émis par les systèmes atomiques à des énergies plus basses, notamment dans le domaine des rayons X. Résultats : de grandes différences ont été constatées par rapport aux prévisions des modèles d’effondrement plus simples. En effet, « de manière assez surprenante, dans ce régime de basse énergie, le taux de rayonnement spontané s’est avéré fortement dépendant de l’espèce atomique étudiée », explique l’auteur principal de l’étude, Kristian Piscicchia, du Centre de recherche Enrico Fermi à Rome. D’autre part, les caractéristiques du rayonnement émis dépendaient également du modèle d’effondrement étudié.

À terme, cette technique pourrait être appliquée aux systèmes atomiques, permettant ainsi potentiellement de déterminer les mécanismes exacts derrière l’effondrement de la fonction d’onde. L’équipe prévoit d’ailleurs d’affiner son protocole expérimental et d’explorer plus avant la relation entre le rayonnement spontané et la structure atomique en utilisant plusieurs cibles. « Cela nous permettrait de mieux contraindre les modèles d’effondrement et, si un signal est trouvé, d’en déterminer la cause, ce qui, bien sûr, aurait d’énormes implications pour la science », conclut Curceanu.

Source : Physical Review Letters

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