Entre le 23 et le 25 mai dernier, le télescope James Webb de la NASA a été frappé par une minuscule météorite de la taille d’un grain de poussière. Bien que l’impact ait endommagé l’un des segments du miroir principal, l’instrument est toujours pleinement opérationnel et n’a rien perdu de ses performances, affirme l’agence. D’autres impacts de ce genre sont malheureusement à craindre tout au long de la mission.
Ce n’est pas une surprise. Les ingénieurs qui ont conçu le James Webb savaient pertinemment que celui-ci, comme n’importe quel autre engin spatial, risquait d’être percuté de temps à autre par des micrométéorites. Il a d’ailleurs été spécifiquement conçu pour résister à ce type d’événement, à l’aide de simulations d’impacts effectuées au sol. « Nous avons dimensionné le miroir principal de Webb de manière à ce que, même après des années de petits impacts, il conserve la surface et la qualité de réflexion nécessaires aux activités scientifiques », expliquait en 2017 Paul Geithner, chef de projet adjoint technique pour le télescope.
Le pare-soleil, qui permet au James Webb et à tous ses instruments de rester très froids, a lui aussi été pensé pour résister aux impacts : il comporte pas moins de cinq couches de polyimide, recouvertes d’aluminium et de silicone. Ces multiples couches lui permettent de tolérer quelques trous et déchirures, sans que cela n’affecte son rôle de bouclier. « Presque tous les composants sensibles de Webb (outre les miroirs et le pare-soleil) sont protégés par une « armure anti-micrométéorites » », a ajouté Geithner.
Des météorites de la taille d’un grain de sable
Les fils et les composants électroniques critiques sont en effet protégés par une « armure » métallique plus robuste ou insérés dans des boîtes métalliques. Le télescope fonctionne toujours à un niveau qui dépasse toutes les exigences, mais l’impact n’est pas resté sans conséquence : la NASA évoque « un effet marginalement détectable dans les données ». Des analyses sont toujours en cours pour évaluer la nature et l’étendue des dommages, aussi minimes qu’ils soient.
Depuis fin janvier, date à laquelle le télescope s’est inséré en orbite autour du point Lagrange L2, l’équipe du projet suit une importante et longue étape de réglage. Le 28 avril, la NASA a confirmé que l’ensemble des miroirs étaient alignés. Depuis, les scientifiques se chargent d’étalonner et configurer l’ensemble des instruments, pour que le James Webb soit pleinement opérationnel dès cet été. La survenue d’impacts de micrométéorites pourrait évidemment être autant de contretemps aux recherches scientifiques prévues…
Les micrométéorites sont des particules de la taille d’une poussière voyageant à des vitesses extrêmes. Elles sont si petites qu’elles se désintègrent totalement à l’impact — même lorsqu’elles frappent les fines membranes du bouclier solaire. L’impact récemment subi par le télescope était toutefois inquiétant, car il était plus important que ce que l’équipe avait pu simuler et tester à terre.
Le James Webb se trouve dans un environnement peu hospitalier : non seulement il est exposé aux frappes occasionnelles de micrométéorites, mais il est également soumis à des températures extrêmement froides (qui entraînent le rétrécissement des matériaux), ainsi qu’aux radiations solaires et cosmiques (qui menacent les composants électroniques) — autant de conditions extrêmes qu’il a fallu prendre en compte au moment de sa conception.
Déjà cinq impacts subis par le James Webb
Fort heureusement, comme l’explique Paul Geithner dans un récent communiqué, le James Webb a été construit avec une marge de performance optique, thermique, électrique et mécanique. Ceci garantit en théorie qu’il pourra accomplir sa mission, même après avoir séjourné plusieurs années dans l’espace.
À noter que ce n’est pas la première fois que le James Webb subit un tel impact. « Depuis le lancement, nous avons eu quatre impacts de micrométéorites plus petits, qui étaient conformes aux attentes », a déclaré Lee Feinberg, responsable des éléments optiques du télescope. En ajustant la position des segments affectés, les ingénieurs ont pu corriger partiellement la distorsion résultant de l’impact. Bien entendu, il n’est pas garanti que toutes les dégradations pourront être compensées de la sorte à l’avenir.
Par ailleurs, les équipes chargées du vol de l’engin peuvent également procéder à des manœuvres d’évitement si besoin, en cas de pluies de météores annoncées par exemple. Bien que relativement important, le récent impact n’était pas dû à une pluie de météores ; il est considéré comme « un événement fortuit inévitable ».
Suite à cet événement, la NASA a constitué une équipe de spécialistes chargée de trouver des moyens d’atténuer les effets d’impacts de cette ampleur. Cette équipe travaillera notamment en collaboration avec des experts en prédiction de micrométéorites du Marshall Space Flight Center de la NASA, afin d’être en mesure de prévoir l’évolution des performances du James Webb.
En attendant, l’événement n’a pour le moment entraîné aucun changement dans le calendrier des opérations de télescope. L’équipe continue à vérifier les différents modes d’observation des instruments scientifiques et dans un mois environ, devrait lancer le début officiel des opérations.