Le célèbre milliardaire et PDG de Tesla vient d’investir massivement dans la cryptomonnaie. Elon Musk a également affirmé qu’il sera bientôt possible d’acheter une Tesla en bitcoins. Des annonces, profondément enfouies dans le rapport annuel 2020 de la société, qui ont entraîné une hausse de 20% de la cryptomonnaie la plus détenue au monde : un bitcoin vaut aujourd’hui près de 40’000 euros.
La nouvelle a immédiatement provoqué d’importantes transactions sur les plateformes d’échange de cryptomonnaies telles que Coinbase, Gemini et Binance, dont les serveurs ont momentanément rencontré quelques difficultés techniques face à l’augmentation de charge. Les discussions étaient également assez animées sur Reddit, alors que l’affaire GameStop — concernant un groupe d’internautes rassemblés via le forum Wall Street Bets, ayant réussi à doper artificiellement le cours boursier de plusieurs sociétés — est encore fraîche…
Elon Musk s’est toujours intéressé aux cryptomonnaies et force est de constater qu’il a une réelle influence en la matière : quelques tweets de sa part évoquant « la future monnaie de la planète », dont une vidéo dans laquelle on voit un Shiba Inu s’envoler vers la Lune dans un vaisseau spatial, ont propulsé le Dogecoin — une monnaie à l’effigie d’un Shiba Inu, créée à partir du mème associé à ce chien, considérée comme une blague — dans le top 10 des monnaies virtuelles !
L’effet « Elon Musk » encore à l’œuvre
Et cette influence ne date pas d’hier. À croire que pour ses followers, tout ce que dit Elon Musk est forcément porteur d’un sens caché. La Securities and Exchange Commission (SEC) — l’organisme fédéral américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers — a souvent reproché au PDG de Tesla la façon dont il utilisait Twitter pour évoquer les projets de sa société, des tweets « faux et trompeurs », qui ont permis de gonfler la valeur des actions ; la bataille juridique a d’ailleurs abouti à une amende de 20 millions de dollars pour Musk et à sa démission de son poste de président du conseil d’administration.
Au cours de l’année dernière, Elon Musk est brièvement devenu la personne la plus riche du monde, tandis que les actions de Tesla ont bondi de près de 500%. « Si des mortels de moindre importance avaient pris la décision de mettre une partie de leur bilan en bitcoins, je ne pense pas que cela aurait été pris au sérieux. Mais lorsque l’homme le plus riche du monde le fait, tout le monde doit y jeter un coup d’œil », constate Thomas Hayes, membre directeur de Great Hill Capital LLC à New York. Le fait est qu’à chaque fois que l’homme d’affaires évoque un actif ou une société sur son compte Twitter, son prix s’envole comme par magie ! Encore une fois, ses derniers tweets ont produit leur effet… Les actions de Tesla ont augmenté de 1,3% lundi, le 8 février.
Tesla a déclaré que la décision d’investir près de 8% de ses réserves dans le bitcoin faisait partie de sa politique d’investissement globale en tant que société visant à diversifier et à maximiser ses rendements en espèces. Le dernier rapport d’activité de la firme indique qu’elle a terminé 2020 avec 19,38 milliards de dollars de trésorerie. Selon Graham Tanaka, président et directeur des investissements de Tanaka Capital Management dans New York, cette décision pourrait signifier que Tesla s’attend à ce que le bitcoin devienne une valeur refuge, à l’instar de l’or.
Cerise sur le gâteau : elle se dit prête à accepter l’achat de ses véhicules en cryptomonnaie : « Nous prévoyons de commencer à accepter le bitcoin comme mode de paiement pour nos produits dans un proche avenir, sous réserve des lois applicables et initialement sur une base limitée, que nous pourrions ou non liquider à la réception », a déclaré la société. Mais de par la nature imprévisible et très volatile des bitcoins, le nombre d’unités requises pour acheter une Tesla pourrait varier énormément en seulement 24 heures ! C’est donc un mode de paiement non conventionnel qui se profile à l’horizon…
Une future valeur refuge pour les entreprises ?
Les banques centrales restent sceptiques à l’égard des monnaies numériques, mais les analystes pensent que plus il y aura d’utilisations possibles du bitcoin dans le monde réel, plus il se révélera attrayant en tant que valeur refuge (ce qui paraît somme toute logique…). Après la divulgation des intentions de Tesla, la cryptomonnaie a atteint les 47’565 $ (soit 39’360 €). Depuis le mois de mars 2020, sa valeur ne fait que grimper : elle est aujourd’hui en hausse de 1135%, en partie grâce à l’intérêt des investisseurs institutionnels.
Pendant plusieurs années, le bitcoin était utilisé majoritairement comme monnaie d’échange par des réseaux criminels sur le dark net (jeux d’argent, achat de substances illicites et de données piratées, etc.). Aujourd’hui, les choses ont changé ; les activités illégales perdurent, mais elles sont devenues minoritaires. Le bitcoin n’est pas encore bien implanté dans le commerce de détail, mais est utilisé dans de nombreux échanges commerciaux tout à fait légitimes. Mohamed El-Erian, conseiller économique en chef d’Allianz, confirme la tendance : « L’argument en faveur du bitcoin évolue. Auparavant, son achat était associé à quelque chose de négatif, mais il y a soudainement des raisons positives d’en acheter, et c’est pourquoi le bitcoin atteint de nouveaux sommets ».
À noter que Tesla n’est pas la première grosse entreprise à ajouter des bitcoins à sa trésorerie. Square, la société de paiement créée par Jack Dorsey, le PDG de Twitter, a investi 50 millions de dollars dans le bitcoin, au mois d’octobre 2020 ; une somme qui représente environ 1% des actifs de la société. MicroStrategy, une société éditrice de logiciels d’informatique décisionnelle, a commencé à acheter ses premiers bitcoins l’année dernière, au mois d’août ; elle investit à l’époque 250 millions de dollars. Aujourd’hui, MicroStrategy détient quelque 71’079 bitcoins à un prix d’achat moyen de 16’109 $, soit une valeur totale de 2,6 milliards de dollars ; cela représente près de 40% de la capitalisation boursière de la société. Rappelons par ailleurs que PayPal a autorisé les échanges de cryptomonnaies au mois de novembre.
Selon Mitch Steves, analyste chez RBC Capital Markets, Apple pourrait bien être la prochaine grande entreprise à entrer sur le marché de la cryptomonnaie, à la fois en permettant l’échange de bitcoins sur son service Apple Wallet et en investissant une partie de ses propres réserves. Et certains experts prévoient une propagation rapide du phénomène : « Si cela devient une tendance dans la trésorerie des entreprises, le fait de rester à l’écart ne fera que devenir plus coûteux avec le temps », souligne Maya Zehavi, consultante en blockchain.