La dynamique solaire est un sujet d’intérêt pour les astrophysiciens, car son étude permet de mieux comprendre la structure de notre étoile mais également de prédire son comportement. Les différents modèles héliophysiques montrent en effet que le Soleil fonctionne selon un cycle de 11 ans, au cours duquel l’activité solaire varie en intensité. Dans certains cas, des configurations particulières surfaciques, appelées « trous coronaux », apparaissent et peuvent donner lieu à la production de tempêtes géomagnétiques en direction de la Terre.
Mis en évidence pour la première fois par l’astronome allemand Heinrich Schwabe en 1843, le cycle solaire est une période d’environ 11 ans lors de laquelle l’activité solaire fluctue et elle est caractérisée, entre autre, par l’apparition et la disparition de taches solaires (régions moins chaudes de la surface du Soleil et magnétiquement plus intenses). Actuellement, nous nous trouvons dans le 24ème cycle, dans une période appelée « minimum solaire » (activité solaire moindre).
Durant le minimum solaire, le nombre de taches et d’éruptions solaires diminue. Cependant, d’autres structures chaotiques peuvent se former à la surface de notre étoile. En effet, le Soleil possède des champs magnétiques de surface divisés en deux catégories : les champs magnétiques fermés, pour lesquels les lignes de champs sortent et rentrent en des points différents (boucles) ; et les champs magnétiques ouverts, pour lesquels les lignes de champs restent ouvertes en direction de l’espace.
Ces zones de champs magnétiques ouverts sont appelés « trous coronaux », car elles apparaissent sous forme de zones d’ombre sur les images aux rayons X. Observés pour la première fois dans les années 1960 au moyen du radiotélescope australien Sydney Chris Cross, les trous coronaux sont moins chauds que le reste de la surface solaire et sont le siège de violentes éjections de plasma (gaz ionisé) formant des vents solaires. À cause des grandes quantités de matière arrachées lors de ces éruptions, les trous coronaux sont également moins denses que leur périphérie.
Lorsqu’ils sont expulsés en direction de notre planète, ces vents solaires peuvent frapper la Terre et entraîner des perturbations magnétiques d’intensité variable, sous la forme de tempêtes géomagnétiques (ou orages magnétiques). Lorsque les particules solaires arrivent au contact du champ magnétique terrestre, elles transfèrent une grande quantité d’énergie à la magnétosphère ; cette surcharge d’énergie conduit à l’accélération du plasma magnétosphérique et à l’augmentation de l’intensité du courant électrique dans la magnétosphère et la ionosphère.
Selon l’intensité du phénomène, celui-ci peut être à l’origine de différentes perturbations sur notre planète. Tout d’abord, un vent solaire suffisamment puissant pourrait endommager partiellement ou totalement les systèmes électriques satellitaires et terrestres (réseaux électriques, systèmes de télécommunication, réseaux informatiques, batteries de voitures, etc). Les transformateurs électriques sont des structures extrêmement vulnérables aux courants géomagnétiques induits et pourraient être rapidement saturés, voire détruits, au cours d’une intense tempête magnétique.
Les systèmes de communication à haute fréquence passent par la ionosphère pour la propagation des signaux radios longue distance. Des perturbations électriques ionosphériques pourraient conduire à l’absorption/réflexion aléatoire et erratique des ondes radios et paralyser l’ensemble des voies de communication planétaires.
La perturbation ionosphérique affecterait également les signaux GPS par scintillement (variation de densité des couches ionosphériques réfléchissant aléatoirement les signaux GPS). Enfin, les structures électroniques des pipelines serait également très vulnérables à ce genre d’événement. Les conséquences de telles radiations sur l’organisme humain sont encore en cours d’étude, y compris en ce qui concerne la perturbation des boussoles biologiques de certains animaux.
L’intensité d’une tempête géomagnétique est donnée par un nombre entier de 0 à 9, appelé « K-index », mesurant le niveau de perturbation de la composante horizontale du champ magnétique terrestre. Un K-index compris entre 0 et 4 indique une situation magnétique calme. À partir de 5, cela indique l’apparition d’une tempête géomagnétique. La National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) américain utilise un système d’évaluation équivalent au K-index nommé « échelle G ». Cette échelle va de G1 à G5 : G1 indiquant une tempête solaire mineure (K = 5) et G5 une tempête solaire extrême (K = 9).
Heureusement, de telles tempêtes dévastatrices sont rares. Parmi celles qui ont notablement affecté la Terre se trouve la tempête solaire de 1859 ; considérée comme la plus violente tempête géomagnétique enregistrée, elle a conduit à la perturbation et destruction de différents systèmes de télégraphes électriques, ainsi qu’à l’apparition de nombreuses aurores polaires. Depuis 1859, seules 4 autres tempêtes solaires notables ont été répertoriées.
D’ailleurs, depuis le 10 avril, une tempête géomagnétique de niveau G1 frappe la Terre suite à l’apparition de trois trous coronaux à la surface du Soleil, selon des observations de la NOAA. Et excepté quelques fluctuations électriques et perturbations dans nos télévisions ainsi que l’apparition d’aurores polaires aux hautes latitudes, le phénomène devrait passer parfaitement inaperçu.