Une étude sur le mécanisme du venin mortel d’une cuboméduse pourrait avoir permis le développement d’un traitement neutralisant son action. Les tests n’ont pas encore été effectués sur les humains, mais les premiers résultats sont très encourageants.
Les cuboméduses, également appelées « méduse-boîtes », regroupent des méduses faisant partie des plus venimeuses. Une espèce, Chironex fleckeri, cause chaque année la mort d’un nombre important de nageurs dans la partie de l’Océan Pacifique se situant entre l’Australie et la Chine. Le nombre de victimes pourrait augmenter dans les années à venir, avec le réchauffement climatique qui favorise une augmentation de leur population.
Le venin, qui cause une forte réaction inflammatoire, de terribles douleurs ainsi que pour certains cas des crises cardiaques, a été étudié en vain depuis de nombreuses années pour l’élaboration d’un antidote. De précédentes études avaient montré que les porines, des protéines formant des pores dans la membrane des cellules, endommagent la surface des globules rouges, engendrant leur hémolyse avec l’échappement de tout leur contenu, ce qui serait la cause des fortes douleurs et de la mort.
Des chercheurs de l’Université de Sydney avaient pour objectif de trouver de probables autres molécules impliquées dans l’empoisonnement, en travaillant sur des échantillons du venin de C. fleckeri qu’ils ont extrait de leurs tentacules.
Ils ont généré un pool de cellules myéloïdes provenant d’un patient souffrant de leucémie, chacune contenant au moins une mutation, et ont ensuite ajouté le venin qu’ils avaient lyophilisé pour le conserver. L’ADN des cellules survivantes était ensuite séquencé pour déterminer le gène manquant et identifier ainsi la protéine exprimée par ce dernier, qui serait potentiellement la cible du poison.
4 gènes identifiés seraient liés à la synthèse de cholestérol. Les scientifiques ont donc testé des médicaments connus pour cibler le cholestérol, et observé s’ils pouvaient bloquer le venin. Deux d’entre eux, le MbCD et le HPbCD, ont pu protéger les cellules myéloïdes humaines et les globules rouges de souris de leur éclatement pendant plus de 15 minutes après l’exposition.
Le groupe a ensuite injecté directement le venin dans des souris pour ensuite leur administrer du HPbCD, qui est inoffensif pour les humains. Ce dernier les a protégées pendant une quinzaine de minutes des symptômes de l’empoisonnement.
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Les chercheurs suggèrent que la présence du cholestérol dans la membrane est nécessaire pour que le venin de C. fleckeri puisse rentrer dans les cellules, et que le HPbCD l’en empêche en retirant le cholestérol de la surface. L’autre médicament, le MbCD, semble inhiber le venin en agissant directement sur ce dernier.
Cependant, Angel Yanagihara, biochimiste de l’Université de Honolulu, qui a échappé de justesse à la mort après avoir été piquée par une méduse en 1997, et qui a décidé de se spécialiser sur cette espèce après cet incident, reste sceptique quant à l’efficacité du traitement. Celui-ci ayant été utilisé sur du venin qui a subi des modifications après son extraction. La piqûre directe par la méduse pourrait donc montrer des résultats différents.
« La prochaine étape serait de fonder la vérité sur ces découvertes en effectuant des tests de piqûres de tentacules sur des animaux vivants », déclare-t-elle. Les chercheurs pensent que les résultats seront identiques, le venin extrait ayant montré les mêmes symptômes que lors d’une piqûre.
Les études sur l’efficacité des traitements sont toujours en cours. Leur objectif est d’observer si les médicaments sont capables de protéger le cœur, ce qui serait prometteur pour le développement d’un antidote.