Des chercheurs ont obtenu des résultats étonnants en étudiant le lien entre les traumatismes crâniens et le risque de développer une démence plus tard dans la vie : non seulement un seul traumatisme augmente le risque de démence, mais plus il y a de traumatismes, plus le risque est élevé. De plus, ce risque serait encore plus important chez les femmes et, plus globalement, chez la population blanche.
Rien qu’en France, on estime qu’environ 150 000 personnes au moins subissent un traumatisme crânien chaque année. Les accidents de circulation comptent pour 70% des cas et les 30% restants concernent principalement les chutes durant des activités sportives, au travail, et les agressions. 9% de ces traumatismes sont considérés comme graves, 11% sont de gravité moyenne et 80% sont considérés comme légers.
Dans cette nouvelle étude, l’équipe a mené son enquête en se basant sur les données de l’étude ARIC (Atherosclerosis Risk in Communities), qui visait à mettre en évidence les liens entre les traumatismes crâniens et la démence sur une période de 25 ans dans une population diversifiée des États-Unis. Les résultats détaillés ont été publiés dans la revue Alzheimer’s & Dementia : The Journal of the Alzheimer’s Association.
Jusqu’ici, selon les chercheurs, les données sur les traumatismes crâniens se limitaient à des populations sélectionnées, telles que les bases de données militaires et de rapports médicaux. Ces résultats sont parmi les premiers à étudier spécifiquement le risque de traumatisme crânien et de démence dans les populations noires et blanches, ainsi que chez les hommes et les femmes, dans un contexte communautaire.
Un facteur de risque de démence important, et trop négligé
« Le traumatisme crânien est un facteur de risque important de démence, mais il peut être évité. Nos résultats montrent que le nombre de traumatismes crâniens a de l’importance – un plus grand nombre de traumatismes crâniens est associé à un plus grand risque de démence », explique l’investigatrice principale Andrea L.C. Schneider, professeur adjoint de neurologie à l’Université de Pennsylvanie. S’il peut être évité, les chercheurs constatent aussi que ce facteur est trop souvent négligé lorsqu’il s’agit de sélectionner les patients à risque.
« Le caractère dose-dépendant de cette association suggère que la prévention des traumatismes crâniens pourrait atténuer le risque de démence plus tard dans la vie », ajoute Schneider. « Bien que le traumatisme crânien ne soit pas le seul facteur de risque de démence, c’est un facteur de risque qui est modifiable par des changements de comportement comme le port du casque et de la ceinture de sécurité ».
Un risque jusqu’à plus de 2 fois plus élevé
Les résultats montrent que par rapport aux participants n’ayant jamais subi de traumatisme crânien, des antécédents d’un seul traumatisme crânien étaient associés à un risque de démence 1,25 fois plus élevé, et des antécédents de deux traumatismes crâniens ou plus étaient associés à un risque plus de 2 fois plus élevé par rapport aux personnes n’ayant jamais subi de traumatisme crânien. Globalement, 9,5% de tous les cas de démence dans la population étudiée pouvaient être attribués à au moins un traumatisme crânien antérieur.
Pour illustrer cette relation, les auteurs ont recueilli des données auprès d’une cohorte diversifiée dont l’âge moyen de départ était de 54 ans, composée de 56% de femmes et de 27% de personnes noires provenant de quatre communautés différentes des États-Unis. Les chercheurs ont suivi les participants pendant une durée médiane de 25 ans en effectuant jusqu’à six visites en personne et des suivis téléphoniques semestriels. Ils ont tiré des données sur les traumatismes crâniens des participants des dossiers hospitaliers, ainsi que des déclarations personnelles de certains participants.
Un risque de démence plus élevé chez les femmes et les individus blancs suite à un traumatisme crânien
Des recherches antérieures sur la démence et les traumatismes cérébraux suggèrent que les femmes présentent un risque plus élevé de démence que les hommes. En outre, les populations noires sont globalement plus exposées au risque de démence que les personnes de race blanche. Cependant, peu d’études antérieures ont évalué les différences possibles dans les associations entre le traumatisme crânien et le risque de démence en fonction du sexe et de la race.
Les données de l’étude ARIC ont montré que les femmes étaient plus susceptibles de souffrir de démence à la suite d’un traumatisme crânien que les hommes. En outre, les participants blancs présentaient un risque plus élevé que les participants noirs. Cependant, les auteurs concluent que des recherches supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre les raisons de ces différences observées entre sexe et race dans l’association.
« Étant donné la forte association entre le traumatisme crânien et la démence, il existe un besoin important de recherches futures axées sur des stratégies de prévention et d’intervention visant à réduire la démence après un traumatisme crânien », déclare Schneider. « Les résultats de cette étude ont déjà conduit à plusieurs projets de recherche en cours, y compris des efforts pour découvrir les causes de la démence liée au traumatisme crânien ainsi que des enquêtes sur les raisons sous-jacentes aux différences observées entre le sexe et la race dans le risque de démence associé au traumatisme crânien ».