Non, les jeunes ne se limitent pas à utiliser l’intelligence artificielle pour leurs devoirs ou pour s’amuser : leurs usages vont bien au-delà, révélant des pratiques parfois insoupçonnées par leurs parents, selon une récente étude.
Les adolescents d’aujourd’hui vivent dans un monde saturé de technologies, où les écrans occupent une place omniprésente. En 2022, selon Statista, les 13-19 ans en France passaient en moyenne cinq heures par jour devant leurs écrans, happés principalement par les réseaux sociaux et les jeux vidéo. Depuis peu cependant, une autre utilisation émerge : celle de l’intelligence artificielle générative.
Pour mieux cerner cette tendance, une équipe de chercheurs de l’Université de l’Illinois à Urbana-Champaign (États-Unis) a conduit une étude approfondie, récemment publiée sur arXiv. En scrutant 712 publications et 8 533 commentaires sur Reddit, ainsi qu’en menant des entretiens avec des adolescents et des parents, les scientifiques ont révélé des usages qui échappent parfois largement à l’imagination parentale.
Entre émotions, sociabilité et études
Trois grands axes motivent l’usage de l’intelligence artificielle par les adolescents : émotionnel, social et académique. Sur le plan émotionnel, les jeunes se tournent vers les chatbots pour rechercher du réconfort ou des conseils, ou simplement pour bénéficier d’une écoute sans jugement. Ces outils, qui simulent une conversation humaine fluide, sont capables de répondre de manière pertinente, offrant parfois une forme de soutien que les adolescents hésitent souvent à demander ailleurs.
Dans la sphère sociale, l’IA devient un outil pour enrichir leurs interactions. Elle est utilisée pour générer des réponses originales ou humoristiques, aidant à nourrir leurs conversations. Toutefois, certains adolescents franchissent des limites : ils considèrent parfois ces chatbots comme des partenaires romantiques ou les utilisent pour produire des contenus violents ou inappropriés.
Enfin, dans le domaine académique, l’IA est sollicitée pour bien plus que des rédactions automatisées. Si certains s’appuient sur elle pour produire intégralement des dissertations, d’autres l’emploient comme une source d’inspiration, une manière de stimuler leur réflexion.
Encadrer l’usage de l’IA chez les adolescents
Les risques associés à ces pratiques méritent une attention particulière. Bien que les plateformes d’IA intègrent généralement des mécanismes de sécurité pour limiter certains contenus, des interactions inappropriées restent possibles. Les adolescents eux-mêmes s’inquiètent parfois de leur dépendance croissante à ces technologies.
Pour limiter ces dérives, les chercheurs plaident pour une transparence accrue des plateformes d’IA générative. Celles-ci doivent offrir des informations accessibles sur les enjeux de confidentialité et de sécurité, tout en développant des filtres de contenu adaptables. Ces outils pourraient être calibrés en fonction de l’âge ou de la maturité de l’utilisateur, répondant ainsi aux attentes des familles.
Cependant, les chercheurs insistent : les solutions techniques ne suffisent pas. Une implication active des parents est indispensable. Comprendre les motivations des adolescents dans leur utilisation de l’IA constitue une première étape. Plutôt que de se limiter à des interdictions, il est nécessaire d’instaurer un dialogue, permettant d’accompagner ces usages et de prévenir leurs dérives.