Le vaccin anti-COVID-19 développé conjointement par l’Université d’Oxford et le laboratoire AstraZeneca suscite de nouveaux espoirs. Le produit est en train de passer avec succès les essais cliniques de phase 2 et 3, et le gouvernement britannique a récemment annoncé qu’il pourrait être déployé peu après Noël. De nouveaux résultats confirment l’efficacité de ce vaccin candidat, tant chez les personnes âgées que chez les jeunes.
Avec plus de 44 millions de cas et plus de 1,16 million de décès dus à la COVID dans le monde, traitements et vaccins contre la maladie sont très attendus. La formule britannique testée actuellement, baptisée AZD1222, produit une réponse immunitaire satisfaisante chez les patients de tous âges, ce qui suggère que ce vaccin pourrait assurer la protection des personnes les plus vulnérables.
Une réponse immunitaire identique
Le système immunitaire de l’organisme, et donc sa capacité à combattre les virus ou d’autres agents pathogènes, s’affaiblit avec l’âge. C’est l’une des raisons pour lesquelles le taux de mortalité de la COVID-19 est plus élevé chez les seniors. De ce fait, pour cette tranche d’âges en particulier, l’efficacité des vaccins en cours de développement est source d’incertitude. Or, les essais cliniques de phase 2 du vaccin d’Oxford/AstraZeneca ont montré que les personnes de plus de 56 ans, ainsi que certaines de plus de 70 ans, produisaient le même type de réponse immunitaire que les jeunes volontaires.
Les tests ont également montré que les volontaires plus âgés affichaient globalement moins d’effets secondaires indésirables, ce que les scientifiques désignent par la réactogénicité du vaccin. « Les résultats renforcent le corpus de preuves de l’innocuité et de l’immunogénicité d’AZD1222 », a déclaré un porte-parole d’AstraZeneca. Le laboratoire a déclaré que le vaccin pourrait être prêt pour une utilisation limitée d’ici quelques semaines. « Nous prévoyons des lectures d’efficacité des essais de phase 2/3 d’ici la fin de l’année, et si elles sont approuvées dans les pays, les doses du vaccin potentiel pourraient être disponibles avant la fin de l’année », a déclaré le porte-parole.
AstraZeneca est donc très optimiste, mais la plupart des experts extérieurs à l’entreprise, ainsi que le secrétaire britannique à la Santé, Matt Hancock, s’attendent à ce qu’il ne soit pas disponible avant 2021. Néanmoins, la logistique nécessaire au déploiement du vaccin — vraisemblablement au cours du premier semestre — est en cours de préparation. AstraZeneca s’est engagé à fabriquer en masse son vaccin, avec une capacité de 3 milliards de doses, soit une quantité suffisante pour que 1,5 milliard de personnes dans le monde puissent recevoir chacune deux doses. Le laboratoire a également signé des accords avec des fabricants d’autres pays, comme l’Inde.
Le vaccin AZD1222 est un vaccin dit « à vecteur viral », fabriqué à partir d’une version affaiblie d’un virus du rhume commun (un coronavirus), qui provoque des infections chez les chimpanzés. Si les derniers résultats sont validés, AstraZeneca pourrait être l’une des premières sociétés pharmaceutiques à obtenir une approbation réglementaire.
À noter que BioNTech et Pfizer, qui développent conjointement le vaccin BNT162b2, sont eux aussi en cours d’essais cliniques de leur formule. Les données précliniques ont été soumises à l’Agence européenne du médicament, qui a commencé l’évaluation de ce vaccin candidat au début du mois. Le BNT162b2 est un vaccin à ARNm ; il est actuellement en essai clinique de phase 3 dans plus de 120 centres dans le monde et les résultats préliminaires sont eux aussi très encourageants.
Une efficacité préventive qui reste à prouver
Les essais finaux de phase 3 du vaccin britannique, sont en cours dans six pays : Royaume-Uni, États-Unis, Afrique du Sud, Brésil, Japon et Inde. Ces tests ultimes visent notamment à montrer une différence significative, en matière de nombre de décès, entre les personnes vaccinées et celles qui ne le sont pas ; cette étape évalue donc l’efficacité et le rapport bénéfices/risques du produit.
Plusieurs dizaines de milliers de volontaires ont été recrutés. En septembre, AstraZeneca avait suspendu l’essai clinique en raison d’une maladie inexpliquée contractée par un patient britannique. Après vérification, les tests ont finalement repris dans plusieurs pays. Le 21 octobre, le Brésil avait annoncé la mort d’un patient qui participait à l’étude. Mais selon plusieurs sources, cette personne n’avait pas reçu la dose de vaccin ; elle faisait partie du groupe de contrôle, recevant un placebo à la place du vaccin testé. Aucun autre décès n’a été signalé à ce jour.
La formule AZD1222 semble donc faire ses preuves. Mais Stephen Evans, professeur de pharmacoépidémiologie à la London School of Hygiene & Tropical Medicine, souligne qu’aucune conclusion sur l’efficacité du vaccin ne devrait être tirée tant que les données n’ont pas été publiées — les premières conclusions ont en effet uniquement été partagées lors d’une réunion universitaire à huis clos. Certes, la réponse immunitaire semble efficace à tous les âges, mais selon le spécialiste, d’autres essais sont nécessaires pour attester de l’efficacité clinique du vaccin dans la prévention de l’infection. Des niveaux élevés d’anticorps dans le sang suggèrent que les défenses sont actives, mais rien ne garantit qu’elles protègent contre la multiplication du virus dans le corps.
Si ce vaccin est attendu comme le Messie, nombre de personnes estiment que les premières doses mises sur le marché n’offriront certainement pas une protection totale. Au mieux, nous pouvons espérer que les premiers vaccins proposés permettent de réduire la gravité de la maladie. Ce qui serait déjà un énorme pas en avant, évitant l’hospitalisation des malades et diminuant largement le nombre de décès.