Depuis son apparition en 2007, la cigarette électronique séduit toujours plus de fumeurs en quête d’une alternative au tabac. Les Français comptent parmi les plus grands consommateurs européens. L’augmentation du prix des cigarettes a largement contribué à cet engouement. La vaste gamme des arômes disponibles est également un atout certain pour le secteur. Mais que contiennent exactement ces e-liquides ? Certains sont-ils plus « sains » que d’autres l’affirment de nombreux revendeurs ?
Selon les prévisions, le marché du vapotage en France pourrait dépasser cette année la barre du milliard d’euros. La cigarette électronique fait de plus en plus d’adeptes, notamment parmi les jeunes consommateurs. Ce type de dispositif chauffe un liquide — dit « e-liquide » — spécialement conçu pour cet usage, afin de produire des aérosols destinés à être inhalés. Ces e-liquides sont exempts de tabac, mais peuvent contenir de la nicotine à diverses concentrations.
Les cigarettes électroniques permettent de simuler l’acte de fumer. C’est la raison pour laquelle certaines personnes optent pour le vapotage comme moyen de sevrage tabagique. D’autant plus qu’il est possible de choisir son taux de nicotine et donc de le diminuer progressivement. Il existe de nombreux types de cigarettes électroniques, et encore bien plus d’arômes d’e-liquides. Le e-liquide fruité, à l’odeur gourmande, a particulièrement la cote ; il représente aujourd’hui une large part du marché de la vape.
Des milliers de saveurs sur le marché !
Avec les cigarettes, l’arôme de tabac prédomine quelle que soit la marque — mises à part certaines références mentholées. C’est toute la différence avec les e-cigarettes, qui offrent toute une gamme de saveurs. Bonbons, desserts, fruits, alcool, café/thé et autres boissons, épices, noix, menthe, etc., il en existe des milliers sur le marché ! Ces saveurs plaisent énormément aux jeunes consommateurs. « Pour beaucoup de jeunes, il arrive que la seule raison pour laquelle ils vapotent ou utilisent des e-cigarettes est qu’ils en aiment les arômes », confirme le cardiologue Michael Blaha.
Chaque arôme provient généralement d’une molécule spécifique. Par exemple, l’arôme d’amande provient du benzaldéhyde, celui de la banane est dû à l’acétate d’isoamyle, tandis que le 3,4-diméthoxybenzaldéhyde est associé à l’arôme cerise. Les e-liquides dits naturels ne contiennent par définition aucun ingrédient de synthèse. Ils ne contiennent aucun additif, conservateur, édulcorant ou autre élément artificiel (y compris les arômes). Comme dans l’industrie alimentaire, les arômes sont dans ce cas extraits directement de sources naturelles (fruits, plantes, épices, etc.).
À savoir que tous les arômes utilisables pour l’alimentation ne peuvent être utilisés pour la fabrication des e-liquides. En effet, alors que certains composés sont sans danger pour le système digestif, il n’en est pas nécessairement de même lorsqu’ils sont inhalés ! Ainsi, le diacétyle, l’acétyl propionyl et l’acétoïne, qui confèrent un goût beurré et crémeux aux aliments, s’avèrent toxiques pour les voies respiratoires.
Maîtriser la composition de son e-liquide
L’arôme n’est qu’un des ingrédients du e-liquide. Celui-ci contient également du propylène glycol (PG) et/ou de la glycérine végétale (GV), qui permettent de solubiliser la nicotine et les arômes. Le propylène glycol est obtenu par synthèse chimique, à partir d’oxyde de propylène issu du pétrole. Pour profiter d’un e-liquide 100% naturel, il faut donc opter pour des mélanges à base de glycérine végétale et/ou de mono propylène glycol végétal.
Même dilemme côté nicotine : il existe sur le marché de la nicotine naturelle — produite par le tabac (Nicotiana tabacum) — et de la nicotine de synthèse, fabriquée en laboratoire. Les deux diffèrent par la stéréo-isomérie de la molécule. La nicotine naturelle existe presque exclusivement sous forme de (S)-nicotine, beaucoup plus active que la forme (R). Dans le cas de la nicotine de synthèse, les deux formes chimiques sont produites à parts égales.
Les e-liquides peuvent comporter d’autres produits chimiques (exhausteurs de goût, THC, etc.). Leur composition est toutefois strictement encadrée par des normes de production. Par exemple, un maximum de 20 mg/mL de nicotine est autorisé dans l’Union européenne (directive 2014/40/EU). Pour utiliser des produits de qualité, respectant ses normes, il est conseillé de s’approvisionner auprès de boutiques (physiques ou en ligne) françaises, éventuellement certifiées. La certification Afnor garantit par exemple aux consommateurs que le produit ne contient pas de substances reconnues dangereuses pour la santé et que l’étiquetage reflète fidèlement la composition (entre autres critères).
Pour maîtriser pleinement la composition de leur e-liquide et le dosage des arômes, de nombreux vapoteurs le fabriquent eux-mêmes. Ils achètent ainsi chaque ingrédient (agent humectant, arôme et nicotine) séparément et font leur propre mélange. L’autre avantage de cette approche est le coût de revient, bien moins élevé que pour un e-liquide prêt à l’emploi. À noter aussi l’aspect écologique de cette démarche : un e-liquide fait maison limite les déchets.
Une aide au sevrage tabagique sans risque ?
La fumée de tabac contient environ 7000 substances chimiques différentes, dont la nicotine, rappelle une étude publiée en 2022. Parmi elles, 93 sont jugées préoccupantes pour la santé : elles sont responsables de l’apparition de pathologies potentiellement mortelles affectant les systèmes cardiovasculaire, respiratoire et digestif. L’usage de l’e-cigarette permet de réduire l’exposition à la plupart de ces substances toxiques, qui sont présentes dans la fumée de tabac.
Selon une revue systématique publiée en 2021, les études réalisées jusqu’à présent suggèrent que l’utilisation de la cigarette électronique est globalement moins toxique que le tabagisme. Certains arômes d’e-liquides peuvent cependant provoquer une toxicité pulmonaire. Notamment, une toxicité attribuée à la cannelle, à la fraise et au menthol a été signalée. Néanmoins, d’autres études ont démontré que la toxicité médiée par l’e-cigarette était davantage liée au PG/GV et à la nicotine plutôt qu’aux arômes.
Pour rappel, ces substances (le propylène glycol et la glycérine végétale) sont, l’une ou l’autre, utilisées dans tout e-liquide. Certains cas isolés de défaillance pulmonaire auraient pu être induits par la viscosité apportée par ces dernières (provoquant une réaction immunitaire ou une infection bactérienne chez les patients en question). Cependant, les rapports sont cliniques et plutôt flous pour certains. L’un de ces documents par exemple, concernant une jeune femme admise pour défaillance pulmonaire, avance l’hypothèse d’une pneumonie lipoïde (induite par un lipide/inhalation d’un produit visqueux). « La seule source de lipides était la glycérine végétale contenue dans les e-cigarettes. Malgré notre conseil d’arrêter le vapotage, elle a continué à utiliser des e-cigarettes de différents arômes et ses paramètres cliniques et spirométriques ne se sont pas améliorés », ont écrit les médecins dans leur rapport, publié dans le National Library of Medicine.
En somme, malgré ces quelques cas cliniques inquiétants, la cigarette électronique a rapidement été considérée comme une potentielle nouvelle méthode de sevrage tabagique. En effet, non seulement son usage permet d’ajuster la teneur en nicotine, mais il permet de mimer le geste de fumer. Ceci aide grandement à soulager les symptômes de sevrage et diminue le risque de rechute. Soulignons que cet aspect ne concerne pas les e-cigarettes jetables ou « puffs ». Celles-ci tendent au contraire à rendre les jeunes extrêmement accrocs à la nicotine. Et pour cause : certaines marques, fabriquées à l’étranger, dépassent largement la teneur maximale en nicotine fixée par la législation européenne ! Ces e-cigarettes jetables seront bientôt interdites sur le marché français.