Variant Omicron : une « collision » du SARS-CoV-2 avec le VIH pourrait en être à l’origine

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L’hypothèse est partie du cas d’une femme de 36 ans résidant en Afrique du Sud. Séropositive et infectée par le SARS-CoV-2, l’étude de son cas a révélé de nombreuses mutations du coronavirus. Un bio-informaticien sud-africain se pose alors la question de l’origine du variant Omicron, aujourd’hui présent dans 23 pays.

Cela reste encore au stade de théorie, mais il est possible que les personnes dont le système immunitaire est très affaibli et qui, parce qu’elles ne peuvent l’éliminer, subissent une infection prolongée par le SARS-CoV-2, soient à l’origine de l’émergence de nouveaux variants. Selon cette hypothèse, leur système immunitaire exercerait un certain degré de « pression immunitaire prolongée » qui créerait des conditions propices à l’apparition de mutations génétiques. Autrement dit, leur réponse immunitaire ne serait pas assez puissante pour éliminer le coronavirus, mais le pousserait à évoluer en exerçant sur lui un certain niveau de pression sélective.

Le bio-informaticien Tulio de Oliveira, basé en Afrique du Sud, s’intéresse particulièrement à l’émergence des variants et aux personnes d’Afrique subsaharienne atteintes d’un VIH non reconnu ou mal traité — ce qui représente quelque 8 millions de personnes. Elles sont majoritairement jeunes, non vaccinées et dotées d’un système immunitaire affaibli.

Plusieurs cas cliniques ont déjà été étudiés par le professeur de Oliveira et son équipe pour analyser l’évolution du coronavirus chez les patients atteints par le VIH. En juin, ils se sont intéressés à une seule patiente séropositive sud-africaine, traitée avec des antirétroviraux et positive au SARS-CoV-2. Les médecins ont suivi l’évolution du virus dans son organisme pendant 233 jours (soit plus de 7 mois), et les résultats (encore en prépublication) sont étonnants.

Un total de 13 mutations uniques du coronavirus

La patiente est restée positive au coronavirus pendant 6 mois et les médecins ont pu suivre l’émergence de plusieurs mutations. La première à faire son apparition est E484K, connue pour déjouer l’activité des anticorps neutralisants, dès le 6e jour suivant son diagnostic. Un mois plus tard, les médecins ont trouvé une seconde mutation, puis des suivantes… avec un total de 13 mutations uniques du virus.

Il faut noter que la patiente souffrait d’une immunodépression sévère. Au début du suivi, son nombre de lymphocytes TCD4 était très bas (à peine 6 lymphocytes par µL de sang). Au bout de six mois, avec l’augmentation du nombre de lymphocytes, l’organisme de la patiente s’est débarrassé du coronavirus et a ralenti la réplication du VIH.

Il ne s’agit bien sûr que d’un cas isolé qui ne permet pas de tirer de conclusions. Néanmoins, l’étude continue des échantillons biologiques de la patiente a révélé un total de 30 modifications génétiques, dont certaines pourraient affecter la réponse du virus aux vaccins ou aux traitements.

Système immunitaire affaibli : un terrain favorable aux mutations

Comment expliquer cette différence avec un système immunitaire sain ? Cela revient à définir le système immunitaire d’une personne immunodéprimée, à savoir qu’il n’est plus capable de lutter efficacement contre des agents pathogènes comme des bactéries, des virus, des parasites ou encore des agents toxiques.

« Nous savons que dans le cadre d’une grave atteinte immunitaire, le virus peut rester longtemps dans l’organisme d’une personne, et plus il peut faire des copies de lui-même, plus il peut commettre des erreurs et échapper à ce qui reste du système immunitaire de ce patient », a déclaré dans un communiqué le Dr Bruce Walker, immunologiste et directeur du Ragon Institute de Cambridge. Il met cependant en garde contre le risque de stigmatisation de ces patients.

Le Dr Jonathan Li, spécialiste des maladies infectieuses à Harvard, a été l’un des premiers à mettre en évidence des mutations importantes du coronavirus chez un patient immunodéprimé. Avec un système immunitaire très affaibli, les lymphocytes T de ces patients — attaqués par le VIH — ne fournissent pas le soutien vital dont les lymphocytes B du système immunitaire ont besoin pour éliminer l’infection au coronavirus.

Et maintenant, le professeur De Oliveira craint qu’un scénario similaire n’ait donné naissance au variant Omicron. Avant l’étude de juin, les virologues ne pensaient pas que les personnes séropositives auraient des résultats plus graves que les autres personnes immunodéprimées. En outre, ils espéraient que leurs résultats permettraient de contrôler l’épidémie de VIH et l’apparition des variants. Cependant, De Oliveira n’exclut pas d’autres explications, tant le variant comporte un grand nombre de mutations. En effet, il est possible qu’Omicron ait circulé pendant des mois ailleurs, accumulant régulièrement des modifications génétiques.

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