Ce lundi, 67 cas de variole du singe (ou monkeypox) étaient confirmés dans neuf pays de l’Union européenne (France, Belgique, Autriche, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Espagne, Portugal et Suède). Hier, 24 mai, cinq cas confirmés étaient recensés dans l’Hexagone selon « Santé publique France ». L’Agence britannique de sécurité sanitaire rapporte quant à elle 70 cas confirmés. Malgré la multiplication des cas, les autorités sanitaires rappellent que le risque pour la population reste faible.
La variole du singe ne se propage pas facilement entre les individus. Seul un contact étroit avec du matériel infectieux (gouttelettes respiratoires, lésions cutanées, muqueuses) permet une transmission interhumaine. Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (CEPCM) se veut rassurant et a déclaré lundi que la probabilité de contagion est « très faible » pour la population en général. « Le risque global est évalué comme modéré pour les personnes ayant plusieurs partenaires sexuels (y compris certains groupes d’hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes) et faible pour l’ensemble de la population », peut-on lire dans le dernier communiqué du centre.
La propagation de ce virus — endémique d’Afrique de l’Ouest et centrale — en Europe, en Amérique du Nord et en Australie n’est cependant pas à prendre à la légère. La maladie est bénigne dans la plupart des cas, et se guérit d’elle-même. Mais elle peut s’avérer plus sévère chez certains groupes de personnes (jeunes enfants, femmes enceintes, personnes immunodéprimées). Il est recommandé aux personnes infectées de s’isoler pendant trois semaines ; un vaccin contre la variole peut être envisagé pour protéger les cas contacts à risque.
Des cas qui risquent de se multiplier au cours de l’été en Europe
Un peu moins de 200 cas ont été confirmés à ce jour dans le monde, auxquels s’ajoutent plusieurs dizaines de cas suspects. Les chiffres augmentent rapidement, notamment au Royaume-Uni qui enregistre chaque jour de nouveaux cas. Plusieurs inconnues existent encore concernant cette épidémie, notamment son point de départ. « L’identification de cas confirmés et suspects de variole du singe sans aucun antécédent de voyage dans une zone endémique dans plusieurs pays est atypique », souligne l’Organisation mondiale de la santé.
De petites épidémies se sont déjà produites par le passé, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Dans le premier cas, elle a été provoquée par une personne infectée de retour d’un voyage au Nigeria ; dans le second cas, elle a résulté de l’importation d’animaux de compagnies contaminés (des chiens de prairie) provenant du Ghana. Mais l’épidémie actuelle est d’autant plus surprenante que les infections se propagent entre humains sans aucun lien avec les régions endémiques africaines.
Les autorités sanitaires s’attendent à ce que le nombre de cas augmente encore au cours des prochains mois, notamment en Europe. « Alors que nous entrons dans la saison estivale dans la région européenne, avec des rassemblements de masse, des festivals et des fêtes, je crains que la transmission ne s’accélère », a déclaré Hans Kluge, directeur régional de l’OMS pour l’Europe. Les personnes qui changent régulièrement de partenaire sexuel doivent faire preuve de la plus grande vigilance.
Les cinq cas recensés en France sont localisés en Île-de-France (3), en Auvergne-Rhône-Alpes (1) et en Occitanie (1). Si la propagation rapide de la maladie peut inquiéter, il est important de rappeler que les cas rapportés en Europe sont majoritairement bénins ; la plupart des personnes guérissent en quelques semaines sans traitement. Les premiers symptômes sont de la fièvre, des céphalées, des douleurs musculaires, suivies d’une importante éruption cutanée provoquant des démangeaisons — qui n’est pas sans rappeler celle liée à la varicelle. Aucun décès n’a été signalé à ce stade de l’épidémie.
Un risque de transmission de l’Homme à l’animal
« C’est une situation qui peut être contrôlée, particulièrement dans les pays où nous voyons cette épidémie se produire en Europe », a affirmé Maria Van Kerkhove, chargée de la lutte contre la COVID-19 à l’OMS, mais aussi des maladies émergentes et zoonoses. Le vaccin antivariolique a déjà fait ses preuves par le passé pour prévenir l’infection (les deux virus sont de la famille des Poxviridae) ; mais les campagnes de vaccination ont pris fin avec l’éradication de la variole en 1980.
Ainsi, comme le souligne l’OMS, l’immunité protectrice croisée résultant de la vaccination antivariolique sera malheureusement limitée aux personnes âgées, car les populations du monde entier âgées de moins de 40 ou 50 ans ne bénéficient plus de la protection conférée par les programmes antérieurs de vaccination antivariolique. Par conséquent, l’immunité contre la variole du singe est faible chez les jeunes individus des pays non endémiques.
Dans ce contexte, le CEPCM a exhorté les pays de l’Union à préparer des stratégies de lutte contre les infections, notamment en renforçant le traçage des cas contacts et en préparant les vaccins. La Haute autorité de santé recommande la mise en œuvre « d’une stratégie vaccinale réactive » : les adultes (y compris les professionnels de santé) dont le contact avec une personne infectée est considéré comme à risque doivent être vaccinés au plus vite — les délais d’incubation de la maladie étant souvent compris entre 6 et 16 jours.
La HAS recommande aussi une prise en charge plus globale, avec la mise à disposition de traitements antiviraux non évalués par la HAS, mais disposant d’une autorisation de mise sur le marché pour traiter la variole du singe ; ceci vise notamment à protéger les enfants à risque, pour lesquels le vaccin antivariolique actuel (de 3e génération) n’est pas autorisé.
À noter qu’il existe un risque de transmission de l’Homme à l’animal en Europe. Les autorités de santé publique humaine et vétérinaire travaillent de concert pour gérer les animaux domestiques exposés (en particulier les rats et les souris) et empêcher la transmission de la maladie à la faune sauvage. Les rongeurs, en particulier les espèces de la famille des sciuridés (dont les écureuils) sont susceptibles d’être des hôtes plus appropriés que les humains, explique le CEPCM dans son rapport d’évaluation des risques. « Un tel phénomène de débordement pourrait potentiellement conduire à l’établissement du virus dans la faune sauvage européenne et à la transformation de la maladie en zoonose endémique », soulignent les auteurs du rapport.