Une étude britannique révèle que bien que les trajets longue distance ne représentent qu’environ 2,7 % des déplacements, ils sont responsables de 69,3 % des émissions de carbone liées au transport de passagers. Et bien que les déplacements internationaux ne représentent que 0,4 % des voyages, ils sont responsables de 59,1 % des émissions. Ce constat préoccupant souligne le besoin d’efforts de réglementation axés sur les déplacements longue distance.
Le transport est responsable de 30 % de la consommation énergétique et 37 % des émissions anthropiques de carbone au niveau mondial. Cependant, malgré cette part importante dans les émissions de gaz à effet de serre, il s’agit de l’un des secteurs les plus difficiles à décarboner. Au Royaume-Uni par exemple, les émissions totales de CO2 ont été réduites en moyenne de 44 % entre 1990 et 2019 pour la plupart des secteurs d’activité, excepté le transport qui n’a enregistré qu’une réduction de 5 %. La majorité de ces émissions proviennent des déplacements de passagers.
D’un autre côté, les efforts de décarbonation sont principalement concentrés sur les technologies de transition verte, telles que l’électricité et l’utilisation de biocarburants (comme l’hydrogène vert). Cependant, ces technologies ne sont pas suffisantes pour compenser les émissions liées aux voyages et atteindre le zéro émission nette.
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De plus, alors que le nombre de trajets nationaux en voiture a en moyenne sensiblement diminué en Europe, les vols internationaux ont considérablement augmenté. Or, pour un voyage en avion, chaque passager peut émettre près de 0,37 kilogramme de CO2 tous les 1,5 kilomètre. En comparaison, un trajet en voiture émet entre 0,25 et 0,30 kilogramme de CO2 par passager pour une distance équivalente.
Mis à part l’adoption de technologies de transition verte, une réduction de la demande de transport de passagers est ainsi essentielle pour réduire les émissions de carbone liées aux déplacements. Cependant, bien que les trajets longue distance constituent une part importante des émissions de carbone des passagers, les enquêtes concernant leur véritable ampleur sont rares. De plus, les déplacements en avion sont généralement considérés séparément dans l’évaluation de l’empreinte carbone du transport.
La nouvelle étude de cas, menée au Royaume-Uni, visait à combler les lacunes en combinant plusieurs enquêtes pour caractériser les émissions de CO2 liées aux déplacements des résidents. « Même si les efforts visant à déplacer les déplacements locaux vers des modes de transport plus durables sont vraiment positifs, en omettant les émissions de l’aviation dans les statistiques nationales – comme c’est le cas actuellement dans presque tous les pays –, nous n’obtenons pas une vision globale et ignorons une grande partie du problème », explique dans un communiqué de l’Université de Leeds le coauteur principal de l’étude, Muhammad Adeel, de l’Université de l’Ouest de l’Angleterre. Les résultats, détaillés dans la revue Nature Energy, pourraient être transposés à la plupart des pays occidentaux.
Les voyages internationaux responsables de 59 % des émissions de CO2
Les chercheurs ont utilisé les données de la National Travel Survey (NTS) et de l’International Passenger Survey (IPS) (entre 1997 et 2017). Contrairement aux précédentes études, qui se concentrent spécifiquement sur des facteurs tels que le nombre de demandes et les déplacements quotidiens, la nouvelle enquête a un double objectif. Le premier consiste à analyser la corrélation entre les déplacements des passagers (tous modes de transport confondus), les émissions de CO2 résultantes, les kilomètres parcourus et les objectifs de voyage.
Le second objectif de l’étude implique une nouvelle mesure : la sensibilité à la réduction des émissions. Cette dernière permet d’évaluer le potentiel de décarbonation pour chaque déplacement et selon la distance, et se traduit par le rapport entre le taux de réduction des émissions et le taux de trajets modifiés. En d’autres termes, la technique évalue quels types de déplacements pourraient être modifiés pour maximiser la réduction des émissions de carbone, tout en affectant le moins de personnes et de trajets possible.
Les chercheurs ont constaté que bien qu’ils ressentent moins de 2,7 % des déplacements, les trajets de plus 80 kilomètres (à l’aller) sont responsables de 69,3 % des émissions de carbone des déplacements de passagers (tous modes de transport confondus). La disparité est encore plus grande pour les voyages internationaux : ils sont responsables de 59,1 % des émissions, alors qu’ils ne représentent que 0,4 % des déplacements. Ces résultats montrent que bien qu’en constante augmentation, l’adoption de technologies de transition verte est loin d’être suffisante pour réduire les émissions liées au transport.
Les estimations de la sensibilité à la réduction des émissions ont montré que cibler les déplacements longue distance pourrait être un moyen plus efficace pour réduire les émissions que les efforts actuels axés sur les déplacements locaux et domicile-travail. « Il est inquiétant de constater que les voyages longue distance, en particulier les vols, ont augmenté, mais ils offrent également des opportunités », estime Zia Wadud de l’Université de Leeds, auteur principal de l’étude.
Si les trajets en voiture de moins de 13 kilomètres étaient remplacés par la marche ou le vélo, la réduction des émissions de carbone serait de 9,3 %. Cependant, ce taux ne serait obtenu que si 59,1 % de tous les déplacements locaux en voiture étaient remplacés. Cela correspond à une sensibilité à la réduction des émissions de 0,17 unité.
En revanche, si tous les vols de moins 1600 kilomètres étaient transférés vers le transport ferroviaire, il y aurait une réduction de 5,6 % des émissions de carbone. De plus, seulement de 0,17 % des trajets devraient être modifiés, donnant ainsi une sensibilité à la réduction des émissions de 33,2 unités. En outre, ce chiffre passerait à 158,3 unités si on limitait les vols internationaux à un par an.
L’équipe espère que ces résultats pourront contribuer à une prise de conscience pour réduire les voyages longue distance. L’étude offre notamment un aperçu des impacts positifs qui pourraient être obtenus par le biais d’un simple changement de comportement. Ces données pourraient aussi contribuer à éclairer les décisions politiques sur la réduction des impacts climatiques du transport.