L’รฉvolution de l’informatique a toujours รฉtรฉ une course ร la puissance et ร la miniaturisation. Aujourd’hui, nous sommes ร l’aube d’une rรฉvolution technologique qui pourrait changer la donne : l’ordinateur quantique. Cependant, la fragilitรฉ de ces systรจmes et leur besoin d’isolation extrรชme posent des dรฉfis majeurs. Une รฉquipe de chercheurs de l’Universitรฉ de l’Arizona propose une approche alternative : l’utilisation de l’acoustique pour imiter certaines propriรฉtรฉs des ordinateurs quantiques.
Les ordinateurs quantiques utilisent des qubits, qui, contrairement aux bits classiques, peuvent exister dans de nombreux รฉtats superposรฉs, en plus des รฉtats 1 et 0. Cette superposition permet aux ordinateurs quantiques de traiter une quantitรฉ massive d’informations simultanรฉment, faisant toute leur puissance potentielle, tant convoitรฉe. Cependant, maintenir cette superposition est un dรฉfi de taille, car la moindre perturbation de l’environnement peut la dรฉtruire.
L’รฉquipe de recherche, dirigรฉe par Pierre Deymier, est parvenue ร crรฉer un dispositif qui imite le comportement d’un qubit, mais ร une รฉchelle beaucoup plus grande. Pour cela, ils ont assemblรฉ trois barres d’aluminium et ont utilisรฉ des haut-parleurs pour crรฉer des vibrations ร une extrรฉmitรฉ de l’assemblage. En ajustant les frรฉquences sonores, ils ont rรฉussi ร former des ยซ morceaux ยป de son localisรฉs dans les barres, qu’ils ont appelรฉs ยซ phi-bits ยป. Ces phi-bits pourraient รชtre utilisรฉs pour encoder de l’information, tout comme les qubits. Leurs expรฉriences ont รฉtรฉ prรฉsentรฉes le 12 mai lors d’une rรฉunion de l’Acoustical Society of America ร Chicago, dans l’Illinois.
L’innovation majeure de cette approche est que ces phi-bits peuvent exister simultanรฉment et ne sont pas indรฉpendants les uns des autres, ce qui signifie qu’ils peuvent รชtre forcรฉs dans un รฉtat de superposition, tout comme les qubits. De plus, l’รฉquipe a dรฉveloppรฉ des mรฉthodes pour effectuer des opรฉrations simples permettant le calcul, comme passer l’รฉtat d’un phi-bit de 1 ร 0, et a crรฉรฉ des รฉtats plus complexes qui partagent certaines propriรฉtรฉs avec les particules intriquรฉes des systรจmes quantiques.
Cependant, il est important de noter que cette approche n’est pas vรฉritablement de l’informatique quantique. Comme l’explique Gerd Leuchs de l’Universitรฉ d’Erlangen-Nuremberg en Allemagne, il existe des limites fondamentales ร la mesure dans laquelle un systรจme non quantique peut imiter un systรจme quantique. Les objets quantiques ont des propriรฉtรฉs ondulatoires, ce qui signifie que certaines de leurs caractรฉristiques, comme la formation de superpositions, peuvent รชtre imitรฉes par d’autres ondes, comme le son. Cependant, les objets quantiques ont รฉgalement des modes de rรฉponse aux interactions qui sont uniques et qui pourraient รชtre indispensables pour obtenir tous les avantages de l’informatique quantique.
Une porte qui s’ouvre plutรดt qu’une avancรฉe majeure ?
Bien que l’approche de Deymier et de son รฉquipe ne remplace pas les ordinateurs quantiques, elle offre une nouvelle voie pour l’exploration et la comprรฉhension de la mรฉcanique quantique. En imitant certaines propriรฉtรฉs des qubits, ils ont crรฉรฉ un systรจme qui pourrait servir de passerelle vers une meilleure comprรฉhension de l’informatique quantique et de ses applications potentielles.
L’acoustique, en tant que moyen d’imiter les propriรฉtรฉs quantiques, prรฉsente plusieurs avantages. Tout d’abord, elle est moins fragile que les systรจmes quantiques ยซ classiques ยป, ce qui signifie qu’elle peut fonctionner dans des conditions plus variรฉes et moins contrรดlรฉes. De plus, elle permet de rรฉaliser des calculs analogues ร ceux des ordinateurs quantiques ร tempรฉrature ambiante et sur de longues pรฉriodes de cohรฉrence. Cela pourrait ouvrir la voie ร des applications pratiques de l’informatique quantique dans des environnements moins contrรดlรฉs.
Cependant, il est important de souligner que cette approche n’est encore qu’ร ses dรฉbuts. Comme le souligne Deymier, ยซ nous avons beaucoup de flexibilitรฉ dans ce que nous pouvons faire ici. Et c’est un systรจme tellement nouveau que nous n’avons pas encore dรฉcouvert ses limites ยป. Il est donc essentiel de continuer ร explorer et ร tester ce systรจme pour comprendre pleinement son potentiel et ses limites.
Ce que l’on peut en dรฉduire en fin de compte, c’est que bien que les propriรฉtรฉs ร comportement quantique obtenues par l’acoustique puissent ne pas suffire ร remplacer un systรจme purement quantique, elles pourraient servir de tremplin pour une meilleure comprรฉhension de cette technologie rรฉvolutionnaire, voire d’extension pour en amรฉliorer la stabilitรฉ. En effet, en explorant de nouvelles faรงons d’imiter les propriรฉtรฉs quantiques, nous pourrions รชtre en mesure de surmonter certains des dรฉfis actuels de cette technologie et de la rapprocher de son application pratique.


