En réaction aux vagues de licenciements récemment initiées par l’entreprise, une ingénieure de Google a déclaré que les dirigeants manquent de leadership visionnaire. L’employée a notamment affirmé qu’ils se contenteraient de pointer une cible floue concernant le développement de l’IA, tout en « tuant leurs poules aux œufs d’or ». En d’autres termes, ils chercheraient activement à évincer leurs concurrents sans avoir d’idées précises sur ce qu’ils souhaitent réaliser avec la technologie.
Depuis le 10 janvier, Google a licencié plus de 1000 employés dans différents départements, tels que la vente et la publicité, la division de recherche et d’ingénierie, l’expérience utilisateur, le RSE, etc. La semaine dernière, Sundar Pichai, PDG de Google, a également déclaré à ses employés de s’attendre à de nouvelles réductions des effectifs au cours de cette année. Toutefois, ces licenciements seraient inférieurs par rapport à l’année dernière (12 000 emplois supprimés) et n’affecteraient pas tous les départements.
Selon le PDG, l’objectif de cette restructuration serait de concentrer les investissements dans les grandes priorités de l’entreprise, dont la course à l’IA. « La réalité est que pour créer la capacité nécessaire à cet investissement, nous devons faire des choix difficiles », a-t-il déclaré dans une annonce interne partagée par The Verge. Il a également affirmé que la suppression de certains emplois vise à simplifier l’exécution des tâches et à accélérer la formation dans certains domaines.
En réaction à ces décisions, Diane Hirsh Theriault, ingénieure chez Google, a déclaré sur LinkedIn que les dirigeants se contentaient de « licencier des gens au hasard, d’éliminer les connaissances institutionnelles et de détruire des équipes parfaitement fonctionnelles ». Selon elle, les hauts responsables manquent de leadership visionnaire et n’ont pas d’objectifs clairs en ce qui concerne l’IA. « À l’heure actuelle, tous ces dirigeants ennuyeux aux yeux vitreux essaient de pointer dans une direction vague (l’IA) tout en tuant leurs poules aux œufs d’or », a-t-elle écrit. En effet, ce défaut de vision devrait en toute logique les inciter à s’appuyer davantage sur leurs employés.
Theriault n’est d’ailleurs pas la seule à déplorer ce manque de leadership visionnaire. Dans le cadre d’une enquête en interne en début d’année, seuls 45 % des employés interrogés pensaient que l’entreprise avait une vision claire, selon Business Insider.
Des employés démotivés : un obstacle à la course à l’IA ?
En conséquence, les employés restants se sentent découragés et démotivés et continueraient à travailler en attendant d’être licenciés à leur tour. Theriault déplore un « sentiment omniprésent de nihilisme qui s’est installé ». Selon l’ingénieure, alors que beaucoup d’employés n’hésitaient pas à rester travailler en dehors des horaires (le soir et le week-end) — pour rattraper un retard ou pour toute autre raison —, les bureaux sont désormais à moitié vides dès 16h30.
Pourtant, il n’y a pas si longtemps, Google était connu dans le monde entier pour ses conditions de travail exceptionnelles. L’environnement de travail désormais anxiogène démotive les employés, ce qui pourrait nuire à leur productivité et ainsi impacter les avancées de l’entreprise dans l’IA et d’autres domaines. « Qui peut être créatif à l’aube d’une nouvelle ère de l’humanité dans cet environnement de peur ? », se demande Theriault.
Il a en outre été rapporté que l’entreprise a licencié ou réaffecté les publicitaires dont les emplois peuvent être automatisés par ses nouveaux outils d’IA. De manière ironique, Google Search s’est profondément dégradé, étant littéralement inondé de contenus médiocres et de désinformation générés par IA.
Par ailleurs, Gemini, le plus puissant outil d’IA de Google, a été lancé vers la fin d’année 2023, au moment où les employés se faisaient licencier en masse. Malgré l’affirmation de l’entreprise selon laquelle il surpasse GPT-4 (l’outil de son concurrent direct OpenAI), des défauts de gestion en interne évidents ont été observés quelques jours à peine après son lancement. Sans compter que la vidéo de démonstration démontrant ses capacités a priori bluffantes aurait été au moins partiellement truquée. Cette désorganisation serait-elle une conséquence liée à la restructuration du personnel ?
D’autre part, « Google n’a pas lancé un seul projet réussi poussé par la direction depuis des années », déclare Theriault. En effet, les dirigeants auraient l’habitude de lancer impulsivement des idées et exigent un succès rapide, alors que les projets ne sont qu’à moitié achevés. Selon elle, ils n’hésiteront pas à abandonner le projet (Gemini) s’ils n’obtiennent pas au moins 100 millions d’utilisateurs en 6 mois. Cela explique probablement le lancement précipité de l’outil, alors qu’il n’était visiblement pas encore prêt à être lancé.