Le « glacier de l’apocalypse » se dirige rapidement vers un effondrement catastrophique, selon une étude

Il pourrait totalement disparaître d’ici le 23e siècle.

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Vue de la langue glaciaire du glacier Thwaites. | NASA/JPL
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Après une expédition de six ans, un groupe de chercheurs révèle que le glacier de Thwaites (ou « glacier de l’apocalypse ») se dirige de manière accélérée vers un effondrement catastrophique, quel que soit le scénario d’émissions de gaz à effet de serre prévu. Cet effondrement devrait s’accélérer au cours du siècle prochain et le glacier ainsi qu’une grande partie de la calotte glaciaire de l’Antarctique occidentale pourraient totalement disparaître d’ici le 23e siècle.

Le glacier de l’apocalypse doit son surnom au fait que son effondrement aura des conséquences dévastatrices à l’échelle planétaire. Faisant environ 120 kilomètres de diamètre (soit une taille équivalente à la Grande-Bretagne) et atteignant une épaisseur de 2 000 mètres à certains endroits, son effondrement provoquerait à lui seul une hausse du niveau de la mer de 65 centimètres. Il fait également office de « bouchon » pour le reste de la calotte glaciaire de l’Antarctique occidentale. De ce fait, sa destruction provoquerait une cascade de pertes qui pourraient entraîner une hausse totale du niveau de la mer de 3 mètres. Cela menacerait d’inonder les villes telles que New York, Miami, Londres, Shanghai, ainsi que les îles du Pacifique, le Bangladesh, etc.

Le glacier ne cesse de reculer depuis plusieurs décennies principalement en raison du réchauffement climatique d’origine anthropique. Le volume de glace s’écoulant dans la mer depuis Thwaites et ses glaciers voisins a plus que doublé entre 1990 et 2010. La baie d’Amundsen, sa partie la plus vaste, est à elle seule responsable de 8 % du taux actuel d’élévation du niveau de la mer (4,6 millimètres par an).

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La fonte du glacier est directement attribuée au contact avec l’eau de mer, qui se réchauffe de plus en plus rapidement. Cependant, les mécanismes exacts régissant la dynamique de cette perte ne sont pas clairs, ce qui entrave la précision des prévisions. Cela est en partie dû à son isolement, rendant difficiles les évaluations sur le terrain. L’expédition menée par le programme International Thwaites Glacier Collaboration (ITGC) depuis 2018 visait à enquêter sur les processus physiques critiques contrôlant le glacier et à effectuer des modélisations plus fiables de la manière dont il évoluera au cours des prochaines décennies.

Les constats de l’équipe sont inquiétants : « Thwaites recule depuis plus de 80 ans, avec une accélération considérable au cours des 30 dernières années, et nos conclusions indiquent qu’il est sur le point de reculer davantage et plus rapidement », explique dans un communiqué Rob Larter, coordinateur scientifique de l’ITGC et géophysicien marin au British Antarctique Survey (BAS).  

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Carte montrant l’emplacement et l’étendue du glacier. © Encyclopédie Britannica

Un relief accélérant l’infiltration de l’eau de mer chaude

Pour effectuer son enquête, l’équipe internationale de 100 scientifiques a rejoint le flanc occidental du glacier en avion puis en bateau. Ils ont ensuite envoyé un robot sous-marin en forme de torpille inspecter la ligne d’échouage (ou ligne d’ancrage) de Thwaites, la limite séparant la partie du glacier qui repose sur le continent de celle qui se prolonge vers la mer — un point critique pour sa stabilité.

Les premières images de la ligne d’échouage transmises par le robot ont étonné les chercheurs. « Pour les glaciologues, je pense que cela a eu l’impact émotionnel que l’alunissage a peut-être eu sur le reste de la société », a expliqué Kiya Riverman, glaciologue à l’Université de Portland, lors d’une conférence de presse.

En analysant les images, les chercheurs ont constaté que le glacier reculait de manière inattendue. L’eau de mer chaude s’infiltre rapidement à travers les fissures profondes striant sa base ainsi que des formations en forme d’escaliers. Cette infiltration serait davantage accentuée par le terrain sur lequel il repose. Situé largement en dessous du niveau de la mer, ce terrain descend en pente douce vers le cœur de Thwaites, permettant ainsi à l’eau chaude de s’infiltrer plus en profondeur et de fragiliser davantage la base du glacier. Cela concorde avec les résultats d’une récente étude distincte indiquant que l’eau de mer chaude et à haute pression peut s’infiltrer jusqu’à plusieurs kilomètres sous sa partie côtière.

Un effondrement total d’ici le 23e siècle ?

Ces observations ont permis aux chercheurs d’effectuer de nouvelles modélisations plus précises sur la dynamique de fonte de Thwaites. « Il existe un consensus sur le fait que le recul du glacier Thwaites va s’accélérer au cours du siècle prochain. Cependant, on craint également que des processus supplémentaires révélés par des études récentes, qui ne sont pas encore suffisamment étudiés pour être intégrés dans des modèles à grande échelle, puissent accélérer le recul plus tôt », explique Larter.

Les modélisation ont montré que Thwaites ainsi qu’une grande partie de la calotte glaciaire de l’Antarctique occidentale pourraient totalement s’effondrer d’ici le 23e siècle, en raison d’une perte continue et accélérée au cours du siècle prochain. Cette tendance serait valable pour tous les scénarios d’émissions de gaz à effet de serre attendus. Toutefois, une intervention immédiate et soutenue pour réduire ces émissions pourrait encore retarder le processus, ont précisé les experts. Les résultats de l’enquête ont été présentés cette semaine lors de la réunion du BAS, à Cambridge.

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