Des chercheurs japonais ont développé un hydrogel bioinspiré imitant la photosynthèse et produisant de l’hydrogène et de l’oxygène à partir de l’eau et de la lumière. L’hydrogel est constitué d’un réseau de polymères très précisément agencé pour faciliter la conversion de la lumière et extraire les molécules d’hydrogène sans apport énergétique externe — une approche directe faisant défaut aux précédents systèmes.
La photosynthèse artificielle est explorée depuis plusieurs décennies pour le développement d’alternatives énergétiques durables. Cela consiste à imiter la photosynthèse naturelle en utilisant la lumière pour déclencher des réactions chimiques produisant de l’énergie. Cependant, les systèmes proposés jusqu’à présent nécessitent généralement un apport énergétique externe pour enclencher les réactions nécessaires, ce qui limite leur efficacité de production.
Les hydrogels de polymères ont récemment été proposés pour surmonter ces défis. Ils peuvent agir comme des systèmes ouverts pour la conversion énergétique en réagissant à des stimuli, tels que la température, la lumière et le pH. Cependant, l’efficacité énergétique de ces systèmes est généralement inhibée par l’auto-agrégation des molécules qui les composent. La production énergétique par le biais de la photosynthèse artificielle dépend du transfert d’électrons entre les molécules impliquées — un processus qui peut être freiné par leur agglomération incontrôlée.
L’équipe de recherche, de l’Institut japonais de science et technologie avancée (JAIST) et de l’Université de Tokyo, a développé un nouvel hydrogel bioinspiré constitué d’un réseau de polymères très précisément agencé pour empêcher l’agglomération des molécules lors de la photosynthèse artificielle. « Le plus grand défi a été de trouver comment organiser ces molécules pour qu’elles puissent transférer les électrons en douceur », explique dans un communiqué du JAIST Kosuke Okeyoshi, coauteur principal de l’étude. « En utilisant un réseau de polymères, nous avons pu les empêcher de s’agglutiner, ce qui est un problème courant dans les systèmes de photosynthèse synthétique », ajoute-t-il.
Une production d’hydrogène considérablement plus élevée
L’hydrogel décrit dans la nouvelle étude – publiée dans la revue Chemical Communications — contient des molécules fonctionnelles (des complexes de ruthénium et des nanoparticules de platine) fournissant des espaces compartimentés à l’échelle nanométrique pour un transfert optimal des électrons.
Plus précisément, il s’agit d’un réseau de microgels poly–N–isopropylacrylamide (PNIPAAm) thermoréactif similaire aux chloroplastes, pouvant intégrer des nanoparticules catalytiques par le biais d’une réaction électrostatique et des changements dans la taille des mailles du réseau. Cela permet de contrôler avec précision le transfert d’électrons pour scinder les molécules d’eau et produire de l’oxygène et de l’hydrogène, tout en empêchant l’auto-agrégation des molécules.
« Si chaque molécule est contrôlée pour se déplacer activement dans un seul espace nanométrique dans le réseau, l’électron est transféré correctement à l’autre molécule dans les réactions directes sans réactions secondaires », indique l’équipe dans son document. L’ensemble de la réaction photosynthétique s’effectue de manière directe et sans apport énergétique externe, en s’appuyant sur un système de conversion énergétique similaire à ceux des organismes vivants. Le système s’inspire du catabolisme et de l’anabolisme des plantes, notamment les multiples réactions d’oxydoréduction se produisant au niveau de la membrane des chloroplastes pour convertir la lumière en énergie.
La quantité d’hydrogène « photoproduit » par l’hydrogel est considérablement plus élevée que celle produite avec les techniques conventionnelles. « Ce qui est unique ici, c’est la façon dont les molécules sont organisées au sein de l’hydrogel. En créant un environnement structuré, nous avons rendu le processus de conversion d’énergie beaucoup plus efficace », affirme Reina Hagiwara du JAIST, auteur principal de l’étude.
Ces résultats pourraient avoir des implications prometteuses dans le développement d’alternatives aux énergies fossiles. L’hydrogène est depuis longtemps étudié dans ce sens, mais la plupart des systèmes proposés n’offrent pas suffisamment d’avantages coût/rentabilité pour une application industrielle et à grande échelle. Ce nouveau système de production directe pourrait potentiellement changer la donne.
Toutefois, davantage de recherches sont nécessaires afin d’améliorer la production énergétique de l’hydrogel et d’en assurer la stabilité à long terme pour les applications pratiques, ont précisé les chercheurs. Ces derniers prévoient d’explorer plus avant la structure de l’hydrogel dans ce sens. « Nous avons démontré le potentiel, mais nous devons maintenant affiner la technologie pour une utilisation industrielle », conclut Okeyoshi.