Mars : des roches inhabituelles pourraient être les preuves de vie les plus convaincantes à ce jour

Des minéraux similaires à ceux produits par les activités microbiennes sur Terre.  

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Le rover Perseverance. | NASA
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Le rover Perseverance a repéré des roches inhabituelles sur Mars présentant des caractéristiques qui pourraient potentiellement correspondre à d’anciennes traces de vie microbienne. Détectées au fond d’une ancienne vallée fluviale, elles comportent des nodules de minéraux similaires à ceux produits par les activités microbiennes dans les roches terrestres. Ces indices figurent parmi les plus convaincants mis en évidence à ce jour de possibles signes de vie sur Mars.

Si Mars est aujourd’hui une planète désertique et hostile à la vie, de nombreux éléments laissent penser qu’elle fut autrefois habitable, plus humide et dotée d’une atmosphère plus dense. Les observations in situ ont révélé que la planète possède un riche passé hydrographique, marqué par la présence d’anciens lits de lacs et de rivières.

Si la vie avait réellement pu émerger sur Mars, ses traces subsisteraient probablement dans ces zones humides disparues, sous la forme de matière organique ou de fossiles de micro-organismes. En 2020, le rover Perseverance a entamé une mission destinée à collecter des échantillons de roche dans l’une de ces régions : la vallée Neretva Vallis, qui se jette dans le cratère Jezero, creusée il y a des milliards d’années par l’écoulement d’eau.

L’objectif du rover était d’explorer le cratère et ses abords afin d’en retracer l’histoire géologique et l’habitabilité, de rechercher des traces de vie passée et de constituer une réserve d’échantillons en vue d’un éventuel retour sur Terre. En longeant, l’an dernier, un affleurement baptisé « formation Bright Angel », à la limite nord du cratère, Perseverance a identifié des roches singulières.

Après analyse, l’équipe de chercheurs, codirigée par l’Université Stony Brook de New York, suggère qu’il pourrait s’agir de vestiges d’une ancienne activité microbienne. « Il s’agit peut-être du signe de vie le plus évident jamais découvert sur Mars », a déclaré Sean Duffy, administrateur par intérim de la NASA, lors d’une conférence de presse au siège de l’agence à Washington, selon le Guardian.

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L’itinéraire de Perseverance à travers la vallée de la Neretva et vues de la formation Bright Angel. © Hurowitz et al.

Des traces potentielles d’activité microbienne

Perseverance est équipé d’une gamme d’instruments capables de caractériser les roches, d’en déterminer la texture à l’échelle submillimétrique et de détecter d’éventuelles biosignatures organiques et inorganiques. Pour examiner les roches de la formation Bright Angel, les chercheurs ont conduit des séries d’analyses géologiques, pétrographiques et géochimiques approfondies.

D’après les résultats publiés dans la revue Nature, les roches contiennent de minuscules grains et nodules issus de l’accumulation de minéraux, parmi lesquels du phosphate de fer, de la vivianite et de la greigite, un minéral de sulfure de fer. Selon l’équipe, ces minéraux auraient pu se former à la suite de réactions d’oxydoréduction entre les sédiments de l’ancienne vallée et une éventuelle matière organique. Les données suggèrent que ces réactions se sont produites à basse température, peu après le dépôt de la boue au fond de la vallée.

Sur Terre, ce type de réactions résulte généralement de l’activité microbienne : les micro-organismes consomment et métabolisent des composés organiques, produisant des minéraux qui s’accumulent en nodules similaires à ceux observés dans la formation Bright Angel. « Notre analyse nous conduit à conclure que la formation Bright Angel présente des textures, des caractéristiques chimiques et minérales ainsi que des signatures organiques qui méritent d’être considérées comme des biosignatures potentielles », écrivent les chercheurs.

Nicky Fox, administratrice adjointe de la direction des missions scientifiques de la NASA, a toutefois rappelé lors de la présentation de l’étude : « Ce n’est pas la vie elle-même. C’est une signature, une sorte de signe résiduel. Cela pourrait provenir d’une vie ancienne, qui aurait existé il y a des milliards d’années, et non de ce qui existe actuellement. »

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Stratification, nodules, fronts de réaction et détections organiques détectées par Perseverance. © Hurowitz et al.

Une mission de retour d’échantillons en péril ?

Les chercheurs reconnaissent cependant que de telles réactions d’oxydoréduction peuvent aussi se produire sans intervention biologique. « Nous devons rester prudents et nous en tenir à la désignation de biosignature potentielle, jusqu’à ce que des analyses directes sur les échantillons prélevés puissent être réalisées sur Terre », souligne Joel Hurowitz, géochimiste et planétologue à l’Université Stony Brook, auteur principal de l’étude.

La véritable origine de ces minéraux ne pourra peut-être être confirmée qu’une fois les échantillons rapatriés sur Terre. Mais la mission de retour demeure incertaine, fragilisée par les récentes décisions de l’administration Trump concernant le budget de la NASA.

Les coupes budgétaires imposées pourraient entraîner l’annulation de cette mission cruciale. Interrogé, Duffy a refusé de se prononcer, expliquant que la question faisait l’objet d’une analyse en cours, selon le Guardian. L’équipe espère néanmoins que ces résultats stimuleront les recherches en laboratoire et sur le terrain, et qu’ils pourraient jouer en faveur de la poursuite de la mission de retour de Perseverance.

Source: Nature
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