L’étude des exoplanètes est un domaine très actif en astrophysique et permet d’en apprendre toujours plus sur la structure et les différentes conditions physiques de ces planètes extrasolaires. Une récente analyse précise de l’obliquité des exoplanètes analogues à la Terre a apporté de nouveaux indices sur leur environnement, notamment la présence de saisons régulières et de climats stables.
L’étude des exoplanètes a commencé tôt dans l’histoire des sciences. L’idée est introduite dès le 16ème siècle avec Giordano Bruno (reprenant les travaux de Copernic) puis commence à être développée au 18ème siècle avec Isaac Newton. Peu avant, l’astronome néerlandais Christiaan Huygens envisage l’utilisation des instruments d’observation pour les détecter.
Malgré le développement des technologies ainsi que quelques annonces et publications rétractées, il faut attendre 1995 pour que les astrophysiciens Michel Mayor et Didier Queloz annoncent la découverte confirmée de la première exoplanète, une Jupiter chaude du nom de 51 Pegasi b.
Plus de 3700 exoplanètes ont depuis lors été confirmées avec, parmi elles, des planètes analogues à la Terre. Une étude récente de l’Institut de Technologie de Géorgie (GIT) s’est particulièrement intéressée aux exoplanètes Kepler-62f et Kepler-186f. Cette dernière est la première exoplanète située dans la zone habitable (impliquant la possibilité d’eau liquide à sa surface) de son étoile. Elle orbite autour d’une naine rouge, Kepler-186, située à 500 années-lumière de la Terre, dans la constellation du Cygne.
Grâce à des simulations complexes, les astrophysiciens du GIT ont analysé et identifié la dynamique de l’axe de rotation des deux exoplanètes. Cette dynamique est importante car elle détermine l’inclinaison d’une planète sur son axe, et comment cet angle d’inclinaison évolue avec le temps. L’inclinaison axiale (également appelée obliquité) est impliquée dans les dynamiques saisonnières et climatiques car elle affecte la manière dont la lumière solaire frappe la surface planétaire.
Par exemple, la forte inclinaison d’une planète par rapport à son étoile donne lieu à des saisons très marquées, alors qu’une faible inclinaison donne des saisons relativement homogènes.
Les résultats, publiés dans The Astronomical Journal, indiquent que l’obliquité de Kepler-186f est très stable, tout comme celle de la Terre, suggérant des saisons régulières et un climat stable. Ils semblent également indiquer une situation similaire pour Kepler-62f, une super-Terre orbitant autour de son étoile Kepler-62, située à 1200 années-lumière de la Terre. L’inclinaison axiale d’une planète est extrêmement importante pour son climat et la dynamique de ses saisons.
De grandes variations dans l’axe d’inclinaison de Mars pourraient expliquer comment la Planète Rouge est passée d’un paysage peuplé d’étendues d’eau à un désert aride. « Mars est dans la zone habitable du Système solaire, mais son axe d’inclinaison s’est révélé très instable, variant de 0 à 60°. Cette instabilité a probablement conduit à la désintégration de l’atmosphère martienne et à l’évaporation de son eau de surface » explique Gongjie Li, professeur au GIT et auteur de l’étude. Par comparaison, l’obliquité terrestre varie entre 22.1 et 24.5°, passant d’un extrême à l’autre tous les 10’000 ans.
Mars et la Terre interagissent fortement l’une avec l’autre, tout comme avec Mercure et Vénus. En conséquence, leur axe de rotation devrait montrer une précession de même rythme que celui des oscillations orbitales, ce qui causerait de grandes variations dans leur inclinaison axiale. Fort heureusement, la Lune permet de compenser ces variations pour la Terre en augmentant le taux de précession de son axe de rotation ; contrairement à Mars dont les satellites trop peu massifs ne permettent pas une telle compensation.
« Il semble que ces deux exoplanètes soient différentes de la Terre et Mars car elles possèdent une connexion plus faible avec leurs planètes jumelles. Nous ne savons pas si elles possèdent des lunes, mais nos calculs montrent que même sans satellites, les axes de Kepler-186f et Kepler-62f seraient restés constants pendant plusieurs dizaines de millions d’années » explique Li.
Kepler-186f possède un rayon un peu moins de 10% plus grand que celui de la Terre, mais sa composition et sa densité demeurent inconnues. Elle complète son orbite autour de Kepler-186 tous les 130 jours. Kepler-62f était l’exoplanète la plus ressemblante à la Terre jusqu’à ce que Kepler-186f soit découverte en 2014.
Elle est environ 40% plus grande que la Terre et les données suggèrent qu’il s’agit d’un monde recouvert d’océans ou de paysages terrestres. Elle est située dans la constellation de la Lyre et fait partie d’un système de 5 exoplanètes.
« Notre étude est parmi les premières à étudier la stabilité du climat sur des exoplanètes et permet de mieux comprendre ces mondes potentiellement habitables » indique Li. Tandis qu’un autre des auteurs, Yutong Shan, conclut « je ne pense pas que nous en sachions assez sur les origines de la vie pour rejeter sa présence sur des planètes au climat instable. Même sur Terre l’on trouve des formes de vie extrêmement diverses et résistantes aux conditions de certains environnement extraordinairement hostiles. Mais une planète au climat stable pourrait être un endroit plus confortable pour commencer ».