Observer tous les futurs possibles simultanément ? Cela peut sonner très science-fiction, comme presque toujours lorsque l’on tente d’expliquer de manière simple ce qui se produit à l’échelle quantique. Contrairement aux particules classiques, les particules quantiques peuvent se déplacer dans une superposition quantique impliquant différentes directions. Mile Gu, en collaboration avec des chercheurs de l’Université Griffith, a exploité ce phénomène pour concevoir des dispositifs quantiques pouvant générer une superposition quantique de tous les futurs possibles.
Une équipe de chercheurs de l’Université technologique de Nanyang à Singapour (NTU Singapour) et de l’Université Griffith en Australie a construit un prototype de dispositif quantique qui peut générer tous les futurs possibles par le biais d’une superposition quantique simultanée.
« Lorsque nous pensons à l’avenir, nous sommes confrontés à un large éventail de possibilités », explique le professeur adjoint Mile Gu du NTU Singapour, qui a dirigé le développement de l’algorithme quantique qui sous-tend le prototype.
« Ces possibilités augmentent exponentiellement à mesure que nous avançons dans le temps. Si, par exemple, nous considérons que n’avons que deux choix possibles chaque minute qui s’écoule, en moins d’une demi-heure il y aurait déjà 14 millions de futurs possibles. En moins d’un jour, le chiffre dépasserait la quantité d’atomes présents dans l’univers observable » ajoute-t-il.
Cependant, ce que lui et son groupe de recherche ont réalisé, c’est qu’un ordinateur quantique peut examiner tous les futurs possibles en les plaçant dans une superposition quantique.
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Pour réaliser ce projet, ils se sont associés au groupe expérimental dirigé par le professeur Geoff Pryde de l’Université Griffith. Ensemble, l’équipe a mis en place un processeur d’information quantique photonique spécialement conçu, dans lequel les résultats potentiels futurs d’un processus décisionnel sont représentés par l’emplacement des photons (les particules de la lumière). Ils ont ensuite démontré que l’état du dispositif quantique était une superposition de plusieurs futurs potentiels, pondérés par leur probabilité d’occurrence.
« Le fonctionnement de cet appareil est inspiré par le lauréat du prix Nobel Richard Feynman », explique le Dr Jayne Thompson, membre de l’équipe de Singapour. « Lorsque Feynman a commencé à étudier la physique quantique, il s’est rendu compte que lorsqu’une particule voyage d’un point A à un point B, elle ne suit pas nécessairement un seul chemin. Au lieu de cela, elle traverse simultanément tous les chemins possibles reliant les points. Notre travail étend ce phénomène et l’exploite pour modéliser des futurs statistiques ».
La machine a déjà fait la démonstration d’une application : mesurer à quel point notre parti pris pour un choix spécifique dans le présent a un impact sur l’avenir. Intéressant n’est-ce pas ?
« Notre approche consiste à synthétiser une superposition quantique de tous les futurs possibles pour chaque biais », explique Farzad Ghafari, membre de l’équipe expérimentale. « En interférant avec ces superpositions les unes avec les autres, nous pouvons complètement éviter de regarder chaque futur possible individuellement. En fait, de nombreux algorithmes d’intelligence artificielle (IA) actuels apprennent en observant comment de petits changements dans leur comportement peuvent mener à différents résultats futurs, de sorte que nos techniques peuvent permettre aux IA quantiques améliorées d’apprendre l’effet de leurs actions beaucoup plus efficacement ».
L’équipe note que pendant que leur prototype actuel simule au plus 16 futurs simultanément, l’algorithme quantique sous-jacent peut en principe évoluer sans limite. « C’est ce qui rend cette branche de recherche si excitante », déclare Pryde.
« Cela rappelle beaucoup les ordinateurs classiques des années 1960. Tout comme peu de gens pouvaient imaginer les nombreuses utilisations des ordinateurs classiques dans les années 1960, nous ne savons toujours pas très bien ce que les ordinateurs quantiques peuvent déjà faire et pourront réaliser dans le futur. Chaque découverte d’une nouvelle application donne un nouvel élan à leur développement technologique » conclut-il.