Aujourd’hui, nous vous proposons de découvrir l’une des histoires les plus sombres du XXIe siècle, qui se cachait à l’intérieur des hôpitaux et du système pénitentiaire chinois…
Si vous avez subi une greffe d’organe en Chine au cours des dernières décennies, il y a de très grandes chances que cet organe provienne d’un prisonnier exécuté et qu’il ait été prélevé contre son gré.
En effet, une pénurie d’organes a ouvert la porte au trafic illégal et au prélèvement forcé d’organes. À savoir qu’un bon nombre de ces prisonniers ne sont ni des meurtriers, ni des violeurs, mais des « prisonniers d’opinion » qui ont été arrêtés pour leurs convictions politiques ou religieuses, tels que les pratiquants pacifiques du Falun Gong.
À savoir que le Falun Gong est une ancienne discipline de qigong (gymnastique traditionnelle chinoise fondée sur la connaissance et la maîtrise du souffle, associant des mouvements lents, des exercices respiratoires et des exercices de concentration) qui a notamment pour but le développement physique et spirituel.
La persécution du Falun Gong se réfère à la campagne lancée depuis juillet 1999 par le parti communiste chinois contre les pratiquants de Falun Gong, visant à éliminer cette pratique dans la République populaire de Chine.
De nombreux témoignages mis en lumière depuis les années 2000
En octobre 1995, Wang Guoqi travaillait comme médecin pour l’armée chinoise dans une prison de la province du Hebei lorsqu’il a été témoin d’exécutions de prisonniers : c’est à ce moment-là que les médecins ont été appelés pour prélever les organes dans le but de les transplanter. Cela a changé sa vie.
« Mon travail m’a obligé à retirer la peau et les cornées des cadavres de plus d’une centaine de prisonniers exécutés et, à quelques reprises, de victimes d’exécutions intentionnellement bâclées », a-t-il déclaré au Congrès américain en juin 2001. Au cours de ces deux dernières décennies, de nombreux lanceurs d’alerte ont quitté la Chine et ont témoigné sur des horreurs similaires qu’ils ont subies et dont ils ont été témoins.
Dans le cadre du rapport Kilgour – Matas, un rapport d’enquête privé sur des allégations de prélèvement forcé d’organes en Chine, David Kilgour a parlé à l’ex-épouse d’un chirurgien chinois qui a prélevé jusqu’à 2000 cornées à partir de prisonniers exécutés pratiquant le Falun Gong.
« Habituellement, ces pratiquants de Falun Gong se faisaient injecter une dose de produit provoquant une insuffisance cardiaque. Au cours du processus, ces personnes étaient poussées dans des salles d’opération où leurs organes étaient prélevés », se rappelait-elle. « En surface, le cœur cessait de battre, mais le cerveau fonctionnait toujours. Ces personnes étaient alors poussées dans d’autres salles d’opération pour permettre l’extraction du cœur, du foie, des reins… Une fois que leurs reins, leur foie et leur peau étaient prélevés, il ne restait plus que des os et de la chair. Les corps étaient alors jetés dans l’incinérateur de l’hôpital », a-t-elle ajouté.
Malheureusement, cette immense problématique est encore vastement inconnue du monde et son ampleur reste difficile à évaluer. Nous ignorons également à quel point ce problème est omniprésent aujourd’hui en Chine. Bien que le gouvernement chinois ait admis avoir prélevé des organes sur des prisonniers dans les années 1990 et 2000, il a insisté sur le fait que cette pratique avait pris fin en 2015. Les autorités chinoises ont déclaré avoir adopté un programme de transplantation d’organes entièrement légitime, utilisant uniquement des donneurs volontaires.
Cependant, nombreux sont ceux qui affirment que les statistiques suggèrent le contraire et que ces pratiques sont toujours en cours. Il est notoire que la Chine craint de publier des statistiques officielles sur le nombre d’exécutions et le nombre de transplantations d’organes effectuées. Cependant, de nombreuses enquêtes menées par des journalistes et des ONG ont permis de démontrer que leurs statistiques ne concordaient pas.
Un rapport important nommé The Bloody Harvest/The Slaughter (soit « La Moisson Sanglante/Le Massacre »), a indiqué que le nombre d’exécutions et le nombre d’organes prélevés sur des prisonniers exécutés restent « un secret d’État », ajoutant : « Nous sommes convaincus que le volume de greffes est nettement supérieur au chiffre officiel ».
Une autre étude, publiée en janvier 2019, inclut une analyse médico-légale des données sur les dons d’organes entre 2010 et 2018. Cette étude a permis de découvrir « une falsification et une manipulation systématiques des données officielles sur les greffes d’organes », et a conclu que les allégations de réforme de la Chine étaient hautement discutables.
À l’heure actuelle, la Chine est en train de devenir le leader mondial des greffes d’organes, en matière de nombre d’opérations effectuées : soit plus d’un million de greffes effectuées depuis l’an 2000. Pourtant, il y a encore relativement peu de dons volontaires d’organes dans le pays.
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Pour des raisons culturelles, les Chinois hésitent généralement à donner leurs organes après leur mort. Alors, d’où proviennent tous ces organes ?
« Les gouvernements chinois prétendent en faire environ 10’000 chaque année, mais cela semble très irréaliste quand on examine des facteurs tels que la capacité en lits des hôpitaux et la quantité de ressources qu’ils investissent dans les greffes. Ce quota « officiel » peut essentiellement être atteint par deux hôpitaux, pourtant, plus de 200 hôpitaux effectuent des greffes », a déclaré Sarah Cook, analyste principale de la recherche pour l’Asie de l’Est à Freedom House.
« Lorsque vous examinez une auto-déclaration au niveau local et dans des hôpitaux individuels, indiquant le nombre de transplantations qu’ils ont effectuées, vous obtenez une estimation allant de 60’000 à 100’000 », ajoute-t-elle.
Le Falun Gong a toujours été victime de l’exploitation d’organes, bien que d’autres groupes minoritaires et marginalisés, tels que les Ouïghours et les Bouddhistes Tibétains, en aient également été victimes.
Il faut savoir qu’il y a plus de 70 millions d’adeptes du Falun Gong en Chine, ce qui représente la deuxième communauté confessionnelle en Chine après le bouddhisme chinois.
Comme brièvement mentionné plus haut, il enseigne essentiellement à ses praticiens la méditation, la pleine conscience et l’exercice afin de se « cultiver soi-même ». Tandis que leurs actions sont toutes totalement pacifiques (de plus, la non-violence est un totem majeur dans leur pratique), le Parti communiste chinois l’a dissipée en tant que culte dangereux. En tant que tels, ils sont soumis à une surveillance généralisée, à l’emprisonnement, à la torture et à l’exécution sans jugement.
De ce fait, et de manière plutôt utile pour le gouvernement chinois, ces derniers forment un groupe d’individus en très bonne santé : « Ils forment un groupe diffamé et ils sont connus pour avoir un très bon profil de santé. Même le gouvernement chinois l’admet », a déclaré Cook. « Ils ne fument pas, ils ne boivent pas, ils font beaucoup d’exercice. C’est une population de prisonniers facilement disponible qui a été vilipendée et qui a un profil sain. C’est donc opportuniste », ajoute Cook.
Comme indice particulièrement sinistre, des dizaines de pratiquants de Falun Gong ont signalé l’utilisation systématique de bilans de santé, en particulier de tests sanguins, tout en purgeant une peine de prison, suggérant ainsi aux autorités un moyen de connaître leur santé et leur groupe sanguin, afin de les « préparer » au prélèvement d’organes.
« J’ai été détenu illégalement trois fois et j’ai été contraint de subir un examen physique à chaque fois. Je ne comprenais pas pourquoi nous devions avoir des examens physiques. La réponse du gardien a été la suivante : ‘‘C’est un processus routinier’’ », explique Chen Ying, un pratiquant du Falun Gong, sur un blog.
« La manière dont ils effectuaient ces examens m’a fait me dire qu’ils le faisaient non pas par considération pour ma santé, mais pour obtenir quelque chose de spécifique à partir des résultats », ajoute-t-il.
Des organes à la carte…
Il y a également la vitesse à laquelle les patients peuvent recevoir un organe, qui laisse à penser qu’il existe une sorte de « système de greffe à la demande » en Chine.
En effet, en dehors de la Chine, la mise à disposition d’un organe donneur peut prendre des mois, voire des années. Étant donné que les organes ne peuvent rester viables à l’extérieur du corps que quelques heures, les destinataires potentiels doivent « attendre l’appel téléphonique » en leur disant qu’un donneur potentiel est décédé, puis se précipiter à l’hôpital.
Cependant, en Chine, il est parfois possible d’obtenir un organe en quelques semaines, voire quelques jours seulement. Il est même possible de réserver une greffe pour dans quelques semaines. Ceci suggère fortement qu’il existe un système dans lequel des exécutions à la demande peuvent être effectuées afin de procurer rapidement un « organe frais » à un patient.
Un documentaire publié en 2017 par la société coréenne Chosun Broadcasting Company a enquêté sur des rumeurs selon lesquelles une poignée d’hôpitaux en Chine possédaient des centres de détention secrets dans leurs sous-sols, dans le but de détenir des prisonniers avant les extractions d’organes.
Bien qu’ils n’aient pas réussi à prouver la présence de ces sous-sols secrets, le film a révélé que de nombreux hôpitaux chinois étaient autorisés à utiliser une « machine à mort cérébrale » brevetée : un sinistre engin qui tue les individus, tout en maintenant leurs organes viables pour une greffe.
Le tourisme de greffe d’organes
Bien entendu, un organe vaut cher. Il y a donc beaucoup d’argent en jeu. Selon le rapport Kilgour – Matas, les prix des organes en 2006 étaient de 62’000 dollars pour un rein, de 98’000 à 130’000 dollars pour un foie, de 170’000 dollars pour un poumon, de 160’000 dollars pour un cœur et de 30’000 dollars pour une cornée.
À savoir que l’attrait d’une transplantation d’organe facile avec un temps d’attente réduit, attire également les entreprises internationales. Malheureusement, l’échelle du tourisme de la santé pour les organes prélevés n’est pas vraiment connue, étant donné qu’il s’agit d’un « marché gris » très louche. Cependant, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a noté que le système chinois de transplantation d’organes était utilisé par des clients internationaux.
À l’heure actuelle, nous pensons que cela est particulièrement courant concernant les pays dits voisins, tels que le Japon, la Corée du Sud, Taïwan, ainsi que d’autres pays du Moyen-Orient, d’Europe et d’Amérique du Nord.
Les critiques et la prise de conscience de cette pratique se sont multipliées depuis que ce secret sur la Chine a été révélé dans les années 2000. Bien que le pays affirme ne plus utiliser d’organes prélevés sur des prisonniers de manière plus que douteuse depuis 2015, de très nombreux critiques internationaux demeurent suspicieux…
Récemment, un tribunal indépendant a été créé à Londres pour enquêter sur les prélèvements forcés d’organes sur des prisonniers d’opinion en Chine. Parmi les nombreuses questions auxquelles ils espèrent avoir une réponse, ils enquêtent également sur le fait de savoir si la Chine dit vrai quant à cette réforme.
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