Un nombre grandissant d’études et de preuves suggèrent que le nouveau coronavirus pourrait être transmis uniquement en expirant. En effet, le virus pourrait se propager dans l’air ambiant via les aérosols et non uniquement à travers les gouttelettes émises par la toux et/ou l’éternuement.
Bien qu’actuellement et à travers le monde cette question reste débattue, « les résultats des études disponibles sont compatibles avec l’aérosolisation du virus par la respiration normale », a écrit Harvey Fineberg, qui dirige un comité permanent sur les maladies infectieuses émergentes et les menaces pour la santé au 21e siècle. À présent, la National Academy of Sciences (NAS) soutient également cette idée.
Jusqu’à présent, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) ainsi que d’autres agences de santé, ont insisté sur le fait que la principale voie de transmission du nouveau coronavirus passe par les gouttelettes respiratoires (qui font jusqu’à 1 millimètre de diamètre), que les gens expulsent lorsqu’ils toussent ou qu’ils éternuent. Ces gouttelettes peuvent être propagées à plusieurs mètres avant de retomber (gravité) et déposent le virus sur les surfaces environnantes, ce qui malheureusement peut infecter d’autres personnes en entrant par la suite en contact avec lesdites surfaces.
Selon de nombreuses études, le coronavirus pourrait se propager dans l’air et non uniquement à travers les gouttelettes
Cependant, le nouveau coronavirus pourrait se propager dans l’air que nous expirons : il voyagerait ainsi via l’air et les aérosols (soit des nuages de gouttelettes microscopiques, parfaitement invisibles à l’oeil nu). Tout en sachant cela, nous protéger de ce virus devient encore plus difficile, renforçant l’argument selon lequel tout le monde devrait porter des masques en public pour réduire la transmission involontaire du virus, par des porteurs asymptomatiques.
Ce débat a commencé lorsque les chercheurs ont rapporté plus tôt cette année que le nouveau coronavirus pouvait flotter dans des gouttelettes d’aérosol (qui font moins de 5 microns de diamètre), jusqu’à 3 heures, et rester infectieux. Dans leur étude, Fineberg et ses collègues du NAS ont également mis en lumière d’autres études, dont une récente qui a été effectuée par Joshua Santarpia et ses collègues de l’University of Nebraska Medical Center, qui ont découvert de l’ARN viral répandu dans des chambres d’isolement de patients traités pour COVID-19.
L’ARN viral constaté par les chercheurs est apparu sur des surfaces difficiles à atteindre, ainsi que dans des échantillonneurs d’air à plus de 2 mètres des patients.
La présence de l’ARN indique que le virus peut se propager via les aérosols, ont conclu Santarpia et ses collègues, bien qu’ils n’aient pas trouvé de particules virales infectieuses.
Une autre prépublication citée par le panel NAS a fait part de ses inquiétudes quant au fait que l’équipement de protection individuelle (EPI) pourrait lui-même être une source de contamination par l’air. Dans ce travail, les chercheurs, dirigés par Yuan Liu à l’Université de Wuhan, en Chine, ont découvert que le nouveau coronavirus peut être remis en suspension dans l’air lorsque les agents de santé retirent leur EPI, nettoient les sols et traversent les zones infectées. « La présence d’ARN viral dans les gouttelettes d’air et les aérosols indique la possibilité de transmission virale via ces voies », a conclu le panel NAS.
« Je suis soulagée de voir que l’aérosolisation est acceptée. Cette voie aérienne supplémentaire permet d’expliquer pourquoi le virus se propage si rapidement », explique Kimberly Prather, chimiste des aérosols à l’Université de Californie à San Diego, aux États-Unis.
Les chercheurs du NAS ont également cité les travaux rapportés dans un article de Nancy Leung de l’Université de Hong Kong et ses collègues : ces derniers ont collecté des gouttelettes respiratoires ainsi que des aérosols provenant de patients atteints de maladies respiratoires causées par des virus. Les chercheurs ont détecté moins d’ARN de coronavirus à la fois dans les gouttelettes respiratoires et les aérosols chez les personnes portant un masque chirurgical.
« Nos résultats démontrent que les masques chirurgicaux peuvent empêcher la transmission des infections par le coronavirus humain et le virus de la grippe s’ils sont portés par des individus symptomatiques », concluent les chercheurs.
Mais tous les experts ne conviennent pas que les aérosols sont une voie de transmission du coronavirus. Une note scientifique datant du 27 mars de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) indique que la transmission par aérosols « peut être possible dans des circonstances et des environnements spécifiques qui génèrent des aérosols », comme lorsque des patients gravement malades sont intubés.
Quant à des études comme celle de Santarpia, elles notent que « la détection d’ARN dans des échantillons environnementaux sur la base d’analyses basées sur la PCR n’est pas indicative d’un virus viable qui pourrait être transmissible ». Il faudra encore d’autres études avant de comprendre réellement comment survit et comment peut se propager ce virus. Par ailleurs, il est important de distinguer la persistance aéroportée du coronavirus et une transmission par l’air. En effet, à l’heure actuelle, il reste encore à déterminer quelle est la dose de particules aéroportées à partir de laquelle on peut être infecté.
Bien que les conclusions actuelles de la science sur le sujet ne permettent pas de tirer une conclusion certaine et irrévocable, au vu du contexte de pandémie, le principe de précaution pourrait être suffisant pour prendre en considération la possibilité d’une diffusion et d’une transmission aéroportée possible.
Les États-Unis, via les CDC, seraient sur le point de changer de position sur le sujet en recommandant le port du masque généralisé afin de limiter la propagation du virus. Ce qui est actuellement déjà une obligation dans plusieurs pays.