Le mois dernier, une étude chinoise mettait en évidence le plus faible risque pour des fumeurs de contracter une infection à coronavirus SARS-CoV-2. Se basant sur ces données, une équipe française a également mené une étude sur le sujet, et les résultats publiés confortent l’étude chinoise en révélant un potentiel effet préventif et protecteur de la nicotine. Des essais cliniques sont en préparation pour vérifier plus avant cette hypothèse, notamment en testant des patchs de nicotine sur des patients et des soignants.
Des chercheurs français envisagent de tester des patchs de nicotine sur des patients atteints du coronavirus SARS-CoV-2 et des soignants de première ligne après une étude suggérant que les fumeurs pourraient être beaucoup moins à risque de contracter le virus. L’étude d’un grand hôpital parisien suggère qu’une substance contenue dans le tabac — peut-être la nicotine — pourrait empêcher les patients qui fument d’être infectés. Les essais cliniques des patchs de nicotine attendent l’approbation des autorités sanitaires françaises.
Cependant, les chercheurs ont insisté sur le fait qu’ils n’encourageaient pas la population à fumer, ni les non-fumeurs à utiliser des patchs nicotiniques, ce qui comporte d’autres risques pour la santé (potentiellement mortels). Bien que la nicotine puisse potentiellement protéger du virus, les fumeurs infectés développent souvent des symptômes plus graves en raison de l’effet toxique de la fumée de tabac sur les poumons, rappellent les auteurs.
Fumeurs : une population présentant un plus faible risque d’infection
L’équipe de l’hôpital Pitié-Salpêtrière a interrogé 480 patients testés positifs pour le virus, dont 350 ont été hospitalisés tandis que les autres présentant des symptômes moins graves ont pu rentrer chez eux. L’étude a révélé que parmi les personnes admises à l’hôpital, dont l’âge médian était de 65 ans, seulement 4.4% étaient des fumeurs réguliers. Parmi les personnes relâchées, avec un âge médian de 44 ans, 5.3% fumaient.
Compte tenu de l’âge et du sexe des patients, les chercheurs ont découvert que le nombre de fumeurs était bien inférieur à celui de la population générale, estimé par les autorités françaises à environ 40% pour les 44-53 ans et entre 8.8% et 11.3% pour les 65-75 ans. Le neurobiologiste français Jean-Pierre Changeux, qui a examiné l’étude, a suggéré que la nicotine pourrait empêcher le virus de se fixer aux cellules du corps, empêchant sa propagation.
Les potentiels effets protecteurs et préventifs de la nicotine
La nicotine peut également atténuer la réaction excessive du système immunitaire, qui a été constatée dans les cas les plus graves d’infection. Les résultats doivent être vérifiés dans une étude clinique dans laquelle des soignants, des patients hospitalisés atteints du virus et des personnes en soins intensifs recevront des patchs de nicotine.
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Les résultats confirment ceux d’une étude chinoise publiée fin mars dans la revue New England Journal of Medicine qui suggérait que seulement 12.6% des 1000 personnes infectées par le virus étaient des fumeurs alors que le taux de fumeurs en Chine est d’environ 28%. En France, les chiffres des hôpitaux parisiens ont montré que sur 11’000 patients admis à l’hôpital avec le virus, 8.5% étaient des fumeurs. Le taux global de fumeurs en France est pourtant estimé à environ 25.4%.
« Notre étude transversale suggère fortement que ceux qui fument tous les jours sont beaucoup moins susceptibles de développer une infection symptomatique ou sévère au SARS-CoV-2 par rapport à la population générale. L’effet est significatif. Il divise le risque par cinq pour les patients ambulatoires et par quatre pour ceux admis à l’hôpital. Nous voyons rarement cela en médecine », concluent les auteurs.