Au cours des derniers mois, masques et distanciation sociale se sont imposés rapidement comme les principaux moyens de lutte contre la COVID-19. Bien que l’utilisation de protections faciales soit une arme standard de lutte contre les épidémies en épidémiologie, l’efficacité de ces moyens n’avait pas encore fait l’objet d’études détaillées dans le cas des coronavirus. Selon l’OMS, le port de masques et la distanciation sociale réduisent, pour chacun, le risque de transmission et d’infection de plus de 80%. Mais concernant les masques, quels types sont les plus efficaces ? Quels tissus permettent une efficacité accrue ? À l’heure actuelle, il n’y a pas de directives spécifiques sur les matériaux et les conceptions les plus efficaces pour les masques faciaux. Cependant, une nouvelle étude a montré plus en détail à quel point le type de construction du masque ainsi que les matériaux utilisés sont importants si l’on souhaite minimiser la propagation des gouttelettes ou des éternuements dans le but d’atténuer la propagation et la transmission du coronavirus.
Certes, il y a déjà eu des études sur la performance des masques de qualité médicale, mais les données sur les masques faits à base de tissu utilisés par la grande majorité de la population restent rares. Une recherche effectuée par des scientifiques du College of Engineering and Computer Science de la Florida Atlantic University, vient d’être publiée et démontre, grâce à la visualisation de toux et d’éternuements émulés, une méthode pour évaluer l’efficacité des masques faciaux dans l’obstruction des gouttelettes.
La justification de la recommandation d’utiliser des masques ou d’autres couvre-visages est de réduire le risque d’infection croisée via la transmission de gouttelettes respiratoires provenant de personnes infectées à des individus en bonne santé.
Les chercheurs ont utilisé la visualisation de l’écoulement dans un environnement de laboratoire avec une feuille et un faisceau laser, ainsi qu’un mélange d’eau distillée et de glycérine pour générer le nuage synthétique qui constituait le contenu d’un jet de toux. Ils ont visualisé des gouttelettes expulsées de la bouche d’un mannequin tout en simulant la toux et les éternuements. Ainsi, ils ont testé des masques facilement accessibles au grand public (et qui ne font pas partie des masques de qualité médicale).
Les chercheurs ont testé un masque à une seule couche conçu avec un mouchoir en tissu, un masque fait maison et cousu à l’aide de deux couches de coton, et un masque de style conique non stérile, disponible dans la plupart des pharmacies. C’est ensuite en plaçant ces différents masques sur le mannequin, qu’ils ont pu tracer le cheminement des gouttelettes et démontrer les différences dans le fonctionnement de ces masques.
Les résultats ont montré que les masques faciaux en tissus pliés (voir image ci-dessus) offrent une capacité d’arrêt minimale pour les plus petites gouttelettes respiratoires en aérosol.
Cependant, les masques faits maison bien ajustés avec plusieurs couches de tissus, et les masques standard de style conique, se sont révélés les plus efficaces pour réduire la dispersion des gouttelettes. En effet, ces masques ont pu réduire la vitesse et la portée des jets respiratoires de manière significative, bien qu’il y ait quelques fuites à travers les matériaux du masque, ainsi que le long des petits espaces sur les bords.
Les chercheurs ont également testé la portée des gouttelettes lorsqu’une personne ne porte pas de masque, et il est important de noter que, ces gouttelettes provenant de toux, ont pu se déplacer bien plus loin que les deux mètres de distanciation actuellement demandés.
En effet, sans masque, les gouttelettes ont parcouru plus de 2 mètres et 43 centimètres ; avec un bandana, elles ont effectué un peu plus d’un mètre (109 centimètres) ; avec un mouchoir en coton replié, elles ont parcouru 37 centimètres ; avec le masque de coton matelassé cousu à la main, les gouttelettes ont été propulsées à 5 centimètres ; et avec le masque en forme de cône, les gouttelettes ont parcouru environ 20 centimètres.
« En plus de fournir une première indication de l’efficacité des équipements de protection, les visuels utilisés dans notre étude peuvent aider à faire comprendre au grand public les raisons qui sous-tendent les lignes directrices et les recommandations relatives à la distanciation sociale pour l’utilisation des masques faciaux », a déclaré Siddhartha Verma, chercheur principal de l’étude et professeur adjoint qui a co-rédigé l’article avec Manhar Dhanak, directeur de département, professeur et directeur de SeaTech ainsi qu’avec John Frakenfeld, paraprofessionnel technique. « La promotion d’une vaste sensibilisation aux mesures préventives efficaces est cruciale à l’heure actuelle, car nous observons des pics importants de cas d’infections au COVID-19 dans de nombreux États, en particulier en Floride », a-t-il ajouté.
Lorsque le mannequin n’était pas équipé d’un masque, il projetait des gouttelettes beaucoup plus loin que les directives de distanciation sociales de deux mètres (1m80 en ce qui concerne les États-Unis). Les chercheurs ont observé des gouttelettes se déplaçant jusqu’à plus de 3 mètres et demi, en environ 50 secondes. De plus, les gouttelettes sont restées suspendues dans l’air pendant trois minutes (au maximum).
Ces observations, combinées à d’autres études récentes, suggèrent que les lignes directrices actuelles en matière de distanciation sociale devraient être mises à jour pour tenir compte de la transmission du pathogène par aérosol. « Nous avons constaté que, bien que les jets turbulents non obstrués se soient déplacés jusqu’à 365 centimètres, une grande majorité des gouttelettes éjectées sont tombées au sol à ce stade », a déclaré Dhanak. « Il est important de noter que le nombre et la concentration des gouttelettes diminueront avec l’augmentation de la distance, ce qui est la raison fondamentale de l’éloignement social », a ajouté Dhanak.
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L’agent pathogène responsable de COVID-19 se trouve principalement dans les gouttelettes respiratoires qui sont expulsées par les personnes infectées lors de la toux, des éternuements ou même des conversations et des respirations.
Outre COVID-19, les gouttelettes respiratoires sont également le principal moyen de transmission de diverses autres maladies virales et bactériennes, telles que le rhume, la grippe, la tuberculose, le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) et le MERS (syndrome respiratoire du Moyen-Orient), pour n’en nommer que quelques-uns. Ces agents pathogènes sont enveloppés dans des gouttelettes respiratoires, qui peuvent atterrir sur des individus en bonne santé et entraîner une transmission directe, ou sur des objets inanimés, ce qui peut ensuite entraîner une infection lorsqu’un individu en bonne santé entre en contact avec eux.
« Nos chercheurs ont démontré comment les masques sont capables de réduire considérablement la vitesse et la portée des gouttelettes et des jets respiratoires. De plus, ils ont découvert comment la toux émulée peut voyager sensiblement plus loin que la ligne de conduite actuellement recommandée », a déclaré Stella Batalama, Ph.D., doyenne du Collège d’ingénierie et d’informatique de la FAU. « Leurs recherches décrivent la procédure à suivre pour mettre en place des expériences de visualisation simples à l’aide de matériaux facilement disponibles, ce qui peut aider les professionnels de la santé, les chercheurs médicaux et les fabricants à évaluer qualitativement l’efficacité des masques faciaux et autres équipements de protection individuelle », a-t-elle ajouté.