Une récente étude britannique reliant l’âge des individus aux différents symptômes, plus ou moins durables et inhérents à la COVID-19, révèle que les femmes âgées de 50 à 60 ans seraient les plus exposées au risque de développer une forme longue de la maladie. Un risque qui s’accroît en cas de surpoids.
Dans le cadre de cette étude, dirigée par le Dr Claire Steves et le professeur Tim Spector du King’s College de Londres, les chercheurs ont examiné les données de plus de 4000 utilisateurs de l’application COVID Symptom Study. À noter que leur compte-rendu a été publié sous forme de préimpression et qu’il n’a pas encore été évalué par les pairs.
Un système immunitaire différent selon le sexe
L’application COVID Symptom Study est le fruit d’une collaboration entre le King’s College, le Guy’s et le St Thomas’Hospital, et la société ZOE Global Ltd. Elle a été conçue pour suivre les différents symptômes de la population. Les utilisateurs doivent communiquer leur position géographique, quelques informations personnelles et signaler d’éventuelles maladies chroniques. Ils doivent en outre indiquer toute maladie ou tout symptôme qu’ils sont amenés à présenter et préciser s’ils ont effectué un test de dépistage.
L’étude a pris en compte les données de 4182 utilisateurs testés positifs, de nationalité britannique, suédoise et américaine. Un peu plus de 13% d’entre eux ont déclaré avoir des symptômes pendant plus de 28 jours (avec une durée médiane de 41 jours) ; parmi eux, 4,5% ont présenté des symptômes pendant plus de huit semaines et 2,3% ont été malades pendant plus de douze semaines. La fatigue et les maux de tête étaient les symptômes les plus fréquemment rapportés par les patients souffrant de formes longues de COVID, suivis par l’anosmie (perte d’odorat) et une gêne respiratoire.
Pour commencer, l’analyse des données a montré que les femmes étaient deux fois plus susceptibles que les hommes de souffrir de symptômes de COVID durant plus d’un mois. Néanmoins, ce constat n’est valable que jusqu’à l’âge de 60 ans environ, après quoi le niveau de risque des deux sexes devient similaire. Les chiffres montrent également que l’augmentation de l’âge est clairement associée à un risque accru de développer une forme longue de COVID : 22% des personnes âgées de plus de 70 ans affichent des symptômes pendant quatre semaines ou plus, contre 10% des personnes âgées de 18 à 49 ans.
La population de femmes âgées de 50 à 60 ans s’est clairement distinguée des autres catégories : elles s’avèrent huit fois plus susceptibles de présenter des symptômes durables que la tranche des 18-30 ans ! Mais la plus grande différence entre les deux sexes a été observée parmi les individus de 40 à 50 ans : dans cette tranche d’âges, le risque pour les femmes de développer une COVID longue est deux fois plus important que pour les hommes.
Tim Spector souligne que cette tendance est loin d’être inédite : « C’est un schéma similaire à ce que vous voyez dans les maladies auto-immunes. […] La polyarthrite rhumatoïde, les maladies thyroïdiennes et le lupus sont deux à trois fois plus fréquents chez les femmes juste avant la ménopause ». Il ajoute que passé cette limite d’âge, la fréquence de ces maladies devient similaire chez les deux sexes. Par conséquent, l’épidémiologiste suppose que les différences entre les sexes jouent un rôle majeur dans la façon dont le système immunitaire répond à l’infection.
Une première semaine déterminante
Parmi les autres facteurs augmentant le risque de développer une forme longue de COVID, les chercheurs ont identifié le surpoids et l’asthme, bien que l’influence de cette dernière pathologie nécessite selon eux davantage d’investigation.
L’analyse des données a également mis en exergue un autre élément lié aux formes durables de COVID : le fait de présenter cinq symptômes ou plus au cours de la première semaine de l’infection augmente a priori le risque de souffrir de problèmes de santé durables. Les symptômes les plus souvent rencontrés dans ce cas étaient la fatigue, les maux de tête, une dyspnée, une voix rauque et des douleurs musculaires. Ce constat suggère que les différentes formes de la maladie sont bel et bien liées à des différences de fonctionnement du système immunitaire.
Spector explique en effet que chez certains patients, la réaction du système immunitaire face à l’infection est de type multisystémique ; ces patients présentent alors des problèmes gastro-intestinaux, des éruptions cutanées, des problèmes nerveux et un « brouillard » cérébral. L’ensemble du corps semble touché par l’infection, au contraire des patients qui ne présentent par exemple que les symptômes similaires à ceux d’un rhume.
Les auteurs restent toutefois prudents. Bien que leur étude fournisse des informations importantes sur les différentes formes de la maladie, ils soulignent que l’échantillon de la population examiné n’était pas suffisamment diversifié (les femmes étaient surreprésentées, tandis que peu de personnes de plus de 70 ans ont utilisé l’application). Cette étude a néanmoins permis d’établir un modèle permettant de distinguer les deux formes de COVID, courte ou longue, à 7 jours de l’infection.
À partir du nombre de symptômes exprimés pendant la première semaine, de l’âge et du sexe d’un individu, ils sont désormais capables de déterminer si cette personne souffrira d’une forme courte ou longue de COVID. Ce modèle pourrait notamment être utilisé pour recruter plus aisément des individus en vue d’essais cliniques visant à réduire les symptômes à long terme.