Dans le cadre du programme spatial Artemis de la NASA, le prochain vol habité pour la Lune devrait avoir lieu en 2024, avec comme objectif d’établir à terme une présence humaine permanente sur notre satellite naturel. Un défi de taille, qui nécessitera une collaboration internationale et multitechnologique, et qui impliquera un grand nombre d’entreprises privées. Dans cet élan, une société britannique a remporté un contrat de l’Agence spatiale européenne (ESA) pour développer une technologie permettant de transformer la poussière et les roches lunaires en oxygène.
La nouvelle technologie d’extraction et de transformation, développée par l’entreprise Metalysis, permettra d’obtenir d’une part de l’oxygène, nécessaire à la survie des astronautes, et d’une autre, de l’aluminium, du fer et d’autres composés métalliques. Ces matières pourront directement être utilisées par les futurs ouvriers lunaires pour construire et étendre les infrastructures.
Si le processus fait ses preuves, il ouvrira la voie à des installations d’extraction lunaires qui produiront de l’oxygène et des matériaux précieux à la surface, plutôt que de devoir les transporter de la Terre jusqu’à la Lune, ce qui représente un coût énorme. « Tout ce que nous emmenons de la Terre à la Lune est un poids supplémentaire que nous voulons éviter, donc si nous pouvons fabriquer ces matériaux in situ, cela fait gagner beaucoup de temps, d’efforts et d’argent », a déclaré Ian Mellor, directeur général de Metalysis, basée à Sheffield (Angleterre).
Oxygène : présente en grande quantité dans la roche lunaire
Des analyses effectuées sur des échantillons de roches lunaires ont par le passé révélé que l’oxygène représente en moyenne environ 45% de leur poids. Le reste est constitué en grande partie de fer, d’aluminium et de silicium. Dans une étude publiée cette année, les chercheurs de Metalysis et de l’université de Glasgow ont découvert qu’ils pouvaient extraire 96% de l’oxygène du sol lunaire simulé, produisant au passage des poudres d’alliages métalliques utiles à la construction.
La NASA et d’autres agences spatiales sont en phase de préparation avancée pour retourner sur la Lune, cette fois pour y établir une base lunaire permanente (village lunaire), où les nations opéreront aux côtés d’entreprises privées sur des technologies essentielles telles que le maintien de la vie, la construction d’habitats, la production d’énergie et la production de nourriture et de matériaux.
Le contrat de l’ESA financera Metalysis pendant neuf mois afin de perfectionner un processus électrochimique qui libère l’oxygène de la poussière (le régolithe) et des roches lunaires en envoyant un courant électrique à travers le matériau. Ce procédé est déjà utilisé sur Terre, mais l’oxygène est libéré comme un sous-produit indésirable de l’extraction. Pour que ce procédé fonctionne sur la Lune, l’oxygène doit être capturé et stocké.
Dans le cadre du contrat, la société tentera d’augmenter le rendement et la pureté de l’oxygène et des métaux de la roche tout en réduisant la quantité d’énergie consommée par le processus. Si la technologie fait ses preuves, l’étape suivante consistera à faire la démonstration de l’extraction de l’oxygène directement sur la Lune.
Une « station service » spatiale
L’oxygène libéré de la surface lunaire peut être combiné avec d’autres gaz pour produire de l’air respirable, mais il est aussi un composant essentiel du propergol de fusée, qui pourrait donc être fabriqué sur le satellite et utilisé pour ravitailler les vaisseaux d’exploration de l’espace lointain. « Si vous voulez aller plus loin dans l’espace, c’est ici littéralement une station-service lunaire, pour ensuite aller dans l’espace plus profond », a déclaré Mellor.
Mark Symes, qui travaille sur ce processus à l’Université de Glasgow, a déclaré que la roche lunaire représente « une énorme source potentielle d’oxygène » pour soutenir l’exploration humaine du satellite terrestre et du système solaire au sens large. « L’oxygène est utile non seulement pour la respiration des astronautes, mais aussi comme oxydant dans les systèmes de propulsion des fusées », a-t-il déclaré. « Il n’y a pas d’oxygène directement exploitable sur la Lune, donc les astronautes devraient emporter tout leur oxygène avec eux, pour leur besoin sur place et pour permettre leur voyage de retour, ce qui augmente considérablement le poids et donc les dépenses des lancements de fusées en direction de la Lune ».
« À l’avenir, si nous voulons voyager davantage dans l’espace et établir des bases sur la Lune et sur Mars, nous devrons fabriquer ou trouver les éléments nécessaires au maintien de la vie : de la nourriture, de l’eau et de l’air respirable », a déclaré Sue Horne, responsable de l’exploration spatiale à l’Agence spatiale britannique.
Pendant plus de quatre décennies, l’exploration spatiale humaine a été limitée à des missions vers la Station spatiale internationale, un avant-poste en orbite à environ 400 kilomètres au-dessus du sol terrestre. Au cours des prochaines années, l’accent sera mis sur la construction d’une nouvelle station en orbite autour de la Lune, qui servira de point d’arrêt pour que les humains puissent établir une présence sur la surface lunaire, et éventuellement une base à partir de laquelle les futurs explorateurs pourront embarquer en direction de Mars.
Le programme Lunar Gateway s’est fixé l’objectif ambitieux de ramener des humains sur la Lune dès 2024, avec des équipages transportés à bord du vaisseau spatial Orion de la NASA. La fusée devrait effectuer son premier vol sans équipage l’année prochaine. L’ESA a fourni les unités de puissance et de propulsion pour le premier vol d’Orion et a conclu des contrats pour la construction du module d’équipage principal de la station lunaire.