La startup spécialisée dans la conception de petits réacteurs nucléaires modulaires vient de publier de nouvelles données concernant les capacités de production de son NuScale Power Module : grâce à la récente augmentation de puissance de son module, qui atteint les 250 mégawatts thermiques, ce dernier est désormais capable de produire 2053 kg d’hydrogène par heure, soit près de 50 tonnes métriques par jour. Le système se pose désormais comme alternative crédible aux centrales solaires à hydrogène.
L’hydrogène est une source d’énergie hypothétiquement renouvelable ; 1 kg d’hydrogène contient autant d’énergie qu’environ 3 kg de pétrole. Problème : l’hydrogène seul n’existe pas dans la nature, mais il entre dans la composition de nombreuses autres molécules essentielles (l’eau, les hydrocarbures, les engrais, etc.). Aujourd’hui, 96% de l’hydrogène est produit par vaporeformage à partir de combustibles fossiles, car c’est la solution la plus économique. Il s’agit de l’extraire du gaz naturel (méthane) sous l’action de vapeur d’eau surchauffée. De ce fait, cette source d’énergie apparaît tout de suite moins « verte »…
NuScale développe des petits réacteurs modulaires (ou SMR, pour small modular reactor) reposant sur un système d’électrolyse de vapeur d’eau à haute température, pour fournir l’énergie nécessaire à la production d’électricité, au chauffage urbain, au dessalement et à d’autres applications de chaleur industrielle. La startup espère révolutionner la filière nucléaire grâce à sa technologie. Elle affirme que ses modules nucléaires, correctement déployés, pourraient concurrencer les solutions existantes comme les centrales solaires à hydrogène, contribuant ainsi à éliminer le besoin d’hydrogène fossile.
Vers la production d’hydrogène « propre »
Le mois dernier, NuScale annonçait dans un communiqué une augmentation de 25% de puissance pour son NuScale Power Module (NPM), portant le total à 77 mégawatts électriques (MWe), ou 250 mégawatts thermiques (MWt), par module (pour comparaison, les réacteurs nucléaires classiques sont environ 15 fois plus puissants). Sa première centrale — dont l’installation est prévue à l’Idaho National Laboratory, dans le nord-ouest des États-Unis, et la mise en service prévue pour 2030 — sera composée de 12 modules et fournira ainsi une puissance de 924 MWe.
Aujourd’hui, l’entreprise annonce une production de 50 tonnes métriques par jour pour son module de 250 MWt et 40 tonnes par jour pour le module de 200 MWt. Les dirigeants se réjouissent de ces performances : « La capacité de notre NPM à produire désormais encore plus d’hydrogène propre, avec une empreinte plus petite, est un autre exemple de la façon dont la technologie de NuScale peut aider à décarboner divers secteurs de l’économie tout en fournissant des flux de revenus supplémentaires pour les clients », a déclaré le Dr José Reyes, directeur de la technologie et co-fondateur de NuScale Power.
L’énergie d’un seul NPM est directement acheminée vers un système d’électrolyse à haute température (HTSE) fonctionnant à 850°C, sous forme de vapeur surchauffée. Seulement 2% de la puissance électrique du NPM (soit environ 1,8 MWe) est utilisée pour augmenter la température de la vapeur de 300°C à 850°C. En théorie, une centrale NuScale multimodules pourrait produire de l’électricité propre et fiable pour le réseau, tout en allouant un ou plusieurs modules à la production d’hydrogène lorsque la demande en électricité est faible.
Les SMR, le futur de l’industrie nucléaire ?
Le nucléaire à petite échelle est un secteur en plein essor. Et pour cause, les petits réacteurs représentent une alternative plus sûre, moins coûteuse et plus rapide à mettre en place. Par exemple, un SMR nécessite un système de refroidissement beaucoup plus réduit qu’une centrale nucléaire classique. Ainsi, la centrale imaginée par NuScale offre les avantages d’une énergie sans carbone, tout en réduisant les investissements financiers associés aux installations nucléaires de la taille d’un gigawatt. À noter que la France s’intéresse elle aussi de près aux SMR : l’an dernier, le CEA, EDF, Naval Group et TechnicAtome ont ainsi dévoilé leur projet commun de petit réacteur modulaire, baptisé NUWARDTM.
NuScale souligne par ailleurs qu’un récent rapport rédigé par Lucid Catalyst montre qu’une quantité suffisante d’hydrogène propre, produit à faible coût, visant à remplacer le pétrole et le gaz utilisés aujourd’hui dans les transports et l’industrie, pourrait permettre d’atteindre les objectifs fixés par l’accord de Paris (à savoir limiter le réchauffement climatique à un niveau nettement inférieur à 2°C, voire 1,5°C).
Mais comme évoqué plus haut, plus de 95% de l’hydrogène mondial est actuellement produit à partir de combustibles fossiles, la méthode la plus courante étant le reformage du méthane à la vapeur à partir du gaz naturel. Les énergies renouvelables à elles seules ne pourraient satisfaire la demande. Selon NuScale, utiliser un seul NPM pour produire 50 tonnes d’hydrogène par jour permettrait d’éviter environ 460 tonnes d’émissions de CO2 quotidiennes (soit 168’000 tonnes de CO2 par an) par rapport à la production d’hydrogène à partir du gaz naturel.
L’entreprise précise par ailleurs que sa technologie est tout à fait adaptée à la décarbonisation des transports : un seul NPM pourrait produire suffisamment d’hydrogène pour alimenter 38’000 véhicules ou 1500 camions long-courriers à pile à combustible, et ce, aux niveaux d’utilisation de carburant annuels moyens observés aux États-Unis.
NuScale propose une vidéo (en anglais) pour expliquer le fonctionnement de son réacteur innovant :