Alors qu’elle se situait à 251 millions de kilomètres de la Terre, la sonde spatiale Solar Orbiter (orbiteur solaire) a pris une véritable photo de famille montrant Vénus, la Terre et Mars côte à côte et brillant comme des étoiles. Au moment du cliché, la sonde se situait donc à presque deux fois la distance Terre-Soleil.
En plein voyage vers sa destination, le Soleil, pour une mission d’étude rigoureuse, c’est le 18 novembre 2020 que la sonde de la NASA et de l’Agence spatiale européenne (ESA) a pointé du regard notre belle planète, accompagnée de quelques unes de ses fidèles compagnes célestes. L’image s’inscrit dans ce qui semble devenir désormais une tradition, celle de prendre au moins une photo de la Terre depuis des sondes spatiales à des distances pour le moment inaccessibles par l’Homme.
Vénus apparait très brillante comme à son habitude, tandis que Mars est ici plus discrète. Les deux planètes sont situées respectivement à 48 millions et 332 millions de kilomètres de l’engin spatial. En somme, un joli portrait de famille : trois planètes rocheuses, si semblables à bien des égards, mais si différentes les unes des autres, vues à travers un instrument scientifique, l’imageur héliosphérique (SoloHI), conçu pour étudier le cœur du Système solaire.
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Profiter de l’élan gravitationnel de Vénus
Le Solar Orbiter a été lancé le 10 février 2020 à bord d’un Atlas V, depuis Cap Canaveral. Il est prévu qu’il effectue plusieurs survols de Vénus (flybys) afin de profiter de la gravité de la planète pour une augmentation de sa vitesse, une manœuvre connue sous le nom « d’assistance gravitationnelle ». L’image des planètes a été prise alors que l’orbiteur se dirigeait vers Vénus pour l’un de ces survols.
Lorsque le Solar Orbiter arrivera à destination en novembre 2021 (en orbite autour du Soleil) pour commencer ses opérations, il s’aventurera parfois loin du plan planétaire pour apercevoir les régions polaires de notre étoile. En raison de notre position d’observation depuis la Terre, nous n’avons jamais pu imager directement les pôles du Soleil. La sonde apportera donc des données extrêmement excitantes pour les astronomes et astrophysiciens.
Et bien entendu, durant son transit, l’orbiteur solaire fait déjà des observations fascinantes. Ces dernières aident notamment l’équipe pilotant la mission à calibrer et tester les instruments à bord. Les données peuvent aussi être utilisées pour l’analyse des planètes, du vent solaire et de la météo spatiale.
Cela rappelle la fragilité de notre propre existence. De telles images évoquent toujours les mots de Carl Sagan, publiés pour la première fois dans son livre de 1994 intitulé « Pale Blue Dot« , à propos d’une photographie de la Terre prise par Voyager 1 suite à une demande insistante du scientifique américain à la NASA, pour qu’elle ordonne à la sonde de se retourner et photographier les planètes, située alors à une distance de 6,4 milliards de kilomètres : « Regardez à nouveau ce point. C’est là. C’est notre maison. C’est nous. Sur ce point, il y a tous ceux que vous aimez, tous ceux que vous connaissez, tous ceux dont vous avez entendu parler, tous les êtres humains qui ont vécu leur vie ».
« L’ensemble de nos joies et de nos souffrances, des milliers de religions, d’idéologies et de doctrines économiques, tous les chasseurs et toutes les chasseuses, tous les héros et les lâches, tous les créateurs et les destructeurs de civilisations, tous les rois et paysans, tous les jeunes couples amoureux, toutes les mères et tous les pères, les enfants pleins d’espoir, les inventeurs et les explorateurs, tous les professeurs, tous les hommes politiques corrompus, toutes les ‘superstars’, tous les ‘chefs suprêmes’, tous les saints et les pécheurs de l’histoire de notre espèce ont vécu là, sur une motte de poussière suspendue dans un rayon de soleil », ajoutait-il.
Étudier le vent solaire durant son voyage
SoloHI est l’un des six instruments de télédétection à bord de la sonde. Pendant la phase de croisière, ceux-ci sont encore calibrés pendant des périodes spécifiques le permettant et éteints dans le cas contraire. SoloHI prend donc régulièrement des images du vent solaire — le flux de particules chargées constamment libérées par le Soleil — en capturant la lumière diffusée par les électrons.
Le vent solaire ainsi que les puissantes éjections de plasma de notre étoile peuvent provoquer des perturbations dans notre environnement spatial (un phénomène appelé « météo spatiale« ), potentiellement dangereuses pour les astronautes, les satellites et les technologies au sol. La compréhension des mécanismes liés au vent solaire et l’accélération des particules en son sein devraient donc aider les astronomes à mieux prévoir les périodes de tempêtes solaires.