Lancé le 25 décembre dernier, le télescope James Webb est arrivé comme prévu à son point de destination, au point de Lagrange L2. Il aligne actuellement les 18 segments qui composent son miroir primaire et sera prêt à scruter l’Univers d’ici quelques mois. Entre autres objectifs scientifiques, il servira à rechercher les composants nécessaires à l’apparition de la vie dans l’atmosphère des exoplanètes. Et sur ce point, Chris Hadfield, un ancien astronaute canadien, a sa propre opinion : le télescope devrait selon lui se focaliser sur Kepler-442b, une exoplanète située à environ 1200 années-lumière, très susceptible d’héberger la vie.
Près de 5000 exoplanètes ont été découvertes à ce jour et près de 8500 restent à confirmer. Et grâce aux données du télescope spatial Kepler, les scientifiques de l’Institut SETI estiment qu’il pourrait y avoir jusqu’à 300 millions de planètes potentiellement habitables dans notre galaxie, autrement dit, des planètes sur lesquelles pourrait exister de l’eau liquide. Certaines pourraient même être assez proches de nous, à moins de 30 années-lumière de notre Soleil. Alors pourquoi Kepler-442b en particulier ?
Sur son compte Twitter, Chris Hadfield affirme qu’il s’agit d’une « excellente planète » à étudier pour James Webb, tout en relayant un autre tweet précisant que Kepler-442b serait même encore plus habitable que la Terre. De taille et de masse légèrement plus grandes que la Terre, cette planète rocheuse orbite autour d’une étoile de type K, à une distance d’environ 0,4 unité astronomique, avec une période d’environ 112 jours. Non seulement elle se situe dans la zone habitable de son système, mais son étoile hôte est au moins 40% moins massive que notre Soleil — ce qui veut dire qu’elle peut encore vivre pendant au moins 30 milliards d’années.
L’une des exoplanètes les plus semblables à la Terre
L’un des principaux objectifs de la mission Kepler (puis K2) de la NASA, initiée en 2009, était de déterminer la fréquence d’apparition de planètes rocheuses dans la zone habitable d’étoiles semblables au Soleil. Un article publié en 2015 dans The Astrophysical Journal, a suggéré que plusieurs des exoplanètes identifiées, y compris Kepler-442b, étaient très susceptibles de posséder de l’eau liquide à leur surface.
Les auteurs de cette étude affirmaient que plusieurs de ces planètes avaient des indices d’habitabilité supérieurs à celui de la Terre. « Cela ne signifie pas que ces planètes sont « plus habitables » que la Terre – cela signifie qu’un jumeau terrestre en orbite autour d’un jumeau solaire observé par Kepler n’aurait pas la plus grande probabilité d’être habitable », nuancent-ils. L’objectif de cette étude était de restreindre la liste des exoplanètes à étudier en priorité. Les chercheurs avaient identifié à l’époque quatre planètes candidates pour les futures observations de James Webb : KOI 5554.01, KOI 6108.01, KOI 7587.01 et K2-3 d.
Confirmée en tant qu’exoplanète en 2015, Kepler-442b (ou KOI-4742.01) est considérée quant à elle comme l’une des planètes les plus semblables à la Terre jamais découvertes, que ce soit en matière de taille ou de température. Son rayon est d’environ 1,3 fois celui de la Terre — suggérant qu’il s’agit probablement d’une planète rocheuse — et il y règne une température d’équilibre de 233 K (-40 °C). Parce qu’elle est plus proche de son étoile que la Terre ne l’est du Soleil, elle tourne probablement beaucoup plus lentement que la Terre (de par les effets de marée) et la durée d’une journée pourrait atteindre des semaines, voire des mois.
Les étoiles de type K (ou naines oranges) sont moins chaudes et plus petites que le Soleil, mais elles vivent plus longtemps et peuvent demeurer sur la séquence principale pendant 18 à 34 milliards d’années (la durée de vie du Soleil est quant à elle estimée à 10 milliards d’années). Pour Chris Hadfield, Kepler-442b apparaît donc comme une cible de recherche idéale.
Des millions de planètes potentiellement habitables
Mais elle n’est sans doute pas la seule à afficher ce haut potentiel d’habitabilité. Une étude parue en 2021 dans The Astrophysical Journal a rapporté qu’environ la moitié des étoiles semblables au Soleil pourraient héberger des planètes rocheuses potentiellement habitables ; la plus proche pourrait même se situer à environ 20 années-lumière de la Terre.
Auparavant, les scientifiques ne tenaient compte que de la distance d’une planète par rapport à son étoile pour évaluer son habitabilité. Contrairement aux estimations précédentes, cette étude tient aussi compte de la relation entre la température de l’étoile, et les types de lumière émise par l’étoile et absorbée par la planète. « Il pourrait y avoir, en moyenne, quatre planètes rocheuses en zone habitable autour des naines G ou K à moins de 10 pc du Soleil », ont conclu les chercheurs.
Le télescope James Webb utilisera diverses méthodes pour observer de près les atmosphères des exoplanètes ; il effectuera notamment une analyse spectrale de la lumière de l’étoile au moment où l’exoplanète s’interposera entre elle et lui. L’analyse du spectre du rayonnement infrarouge reçu fera apparaître des raies d’absorption caractéristiques de certains éléments chimiques. Certains scientifiques estiment que l’engin pourrait même détecter des composés de type CFC, qui pourraient trahir la présence d’une éventuelle civilisation extraterrestre. Encore quelques mois de patience avant de savoir si nous sommes seuls dans l’Univers…