Il y a quelques mois, nous vous présentions un nouveau système de lancement de satellite hors du commun, développé par la start-up SpinLaunch : un système reposant sur une centrifugeuse électrique massive capable d’accélérer à des vitesses hypersoniques (jusqu’à 8000 km/h) avant de projeter l’engin à mettre en orbite. L’immense atout de cette approche est qu’elle permet de se passer des fusées d’appoint utilisées aujourd’hui par la plupart des sociétés spatiales. Plusieurs acteurs du secteur sont intéressés par ce concept, y compris la NASA, qui s’est inscrite pour tester cette incroyable technologie.
L’une des motivations de SpinLaunch est d’ordre écologique : « L’industrie prévoyant de lancer dix fois plus de satellites au cours de la prochaine décennie, il est plus urgent que jamais de développer une technologie d’accès à l’espace respectueuse de l’environnement », précise le site officiel de la société. Et cela ne concerne pas uniquement les satellites : alors que l’Homme prévoit de s’installer durablement sur la Lune, des centaines de lancements d’équipements et de fournitures sont à prévoir dans les années à venir. Et ce système de lancement cinétique sans fusée, donc sans émission de gaz nocifs, promet des envols plus « verts ».
L’autre atout de cette centrifugeuse géante est qu’elle réduit largement les coûts de lancement, en particulier les coûts de carburant. Alors qu’un lancement standard implique un investissement de 5 à 100 millions de dollars, un lancement par centrifugeuse reviendrait à moins de 500 000 $ selon Jonathan Yaney, le fondateur de SpinLaunch. Les tout premiers tests, réalisés sur un prototype de taille réduite, se sont révélés prometteurs. Depuis, SpinLaunch effectue régulièrement des essais de lancements suborbitaux au Spaceport America, au Nouveau-Mexique.
Une approche de lancement « techniquement mature »
Au sein de la centrifugeuse scellée sous vide, un énorme bras rotatif en fibre de carbone — auquel est fixé le projectile — accélère jusqu’à atteindre une vitesse hypersonique, puis libère l’objet en une fraction de seconde. Les tests ont montré que ce système pouvait catapulter dans les airs une charge utile à plus de 1600 km/h à environ 9 km d’altitude. La NASA semble convaincue par cette alternative de lancement, à la fois plus économique et plus respectueuse de l’environnement : elle vient de signer un accord Space Act avec la start-up pour tester l’engin plus tard cette année.
Ce vol d’essai « fournira des informations précieuses à la NASA pour de futures opportunités de lancement commercial », ont précisé les représentants de SpinLaunch à Space.com. L’agence prévoit de lancer une charge utile à environ Mach 2 (soit deux fois la vitesse du son), contenue dans un véhicule de trois mètres de long ; une fois parvenu à l’altitude souhaitée, ce dernier déploiera un parachute qu’il lui permettra d’atterrir en douceur. La charge utile sera conçue pour prendre une série de mesures, qui seront ensuite analysées par les deux parties.
« Ce qui a commencé comme une idée innovante pour rendre l’espace plus accessible s’est matérialisé en une approche de lancement techniquement mature et révolutionnaire », a déclaré Yaney dans un communiqué adressé à Space.com. En pratique, le véhicule propulsé de cette manière devra embarquer un moteur de fusée, qui produira l’ultime poussée le menant à sa destination ; mais celui-ci ne s’allumera qu’une fois arrivé à haute altitude, ce qui réduit considérablement la quantité de carburant nécessaire.
Une accélération équivalente à 10 000 G
Cette technique de lancement, qui remplace avantageusement le premier étage d’une fusée, permet ainsi de consacrer la majorité de la masse du véhicule spatial à la charge utile, et non plus aux propulseurs. L’équipe estime que son procédé permettra de diviser par vingt le coût de la mise en orbite de satellites de petite taille et d’assurer des dizaines de lancements par jour. « Nous sommes impatients d’annoncer bientôt d’autres partenaires et clients, et apprécions grandement l’intérêt et le soutien continus de la NASA pour SpinLaunch », a déclaré Jonathan Yaney.
La start-up travaille actuellement à la conception de satellites compatibles avec le lancement cinétique (qui implique que les engins et leurs composants doivent résister à une accélération extrême équivalente à 10 000 G !). « Nous avons développé un catalogue de sous-systèmes optimisés et de solutions clés en main entièrement intégrées pour offrir un accès à l’espace moins coûteux et plus évolutif », affirme la société. Dans son catalogue : le S-20 et le S-200, le premier étant optimisé pour un déploiement rapide de constellations de satellites commerciaux, le second étant conçu pour les télécommunications et l’observation terrestre.
À noter que les essais sont pour le moment réalisés sur un système à échelle réduite, d’une cinquantaine de mètres de haut. Un représentant de SpinLaunch a déclaré à TechCrunch que la société prévoyait d’effectuer d’autres tests à des vitesses aussi élevées que Mach 6 plus tard cette année. Le lanceur final de 100 mètres de hauteur, conçu pour la mise en orbite, devrait être opérationnel en 2025 ; la localisation de l’installation n’a pas encore été communiquée. SpinLaunch affirme qu’il conviendra à des lanceurs pesant jusqu’à 200 kg, transportant principalement des satellites.
Une vidéo montrant comment se dérouleront les opérations :