SpinLaunch teste avec succès le lancement spatial par centrifugeuse

système lancement cinétique spinlaunch
| SpinLaunch
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Imaginez une sorte de fronde géante, avec un satellite en guise de projectile. C’est à peu près l’idée de la start-up SpinLaunch, qui développe un système de lancement cinétique reposant sur une centrifugeuse massive, capable d’envoyer un objet dans l’espace à une vitesse pouvant atteindre 8000 km/h. Son objectif est de proposer les services de lancement orbital les moins chers au monde pour l’industrie des petits satellites.

« Une nouvelle façon d’aller dans l’espace », c’est l’accroche qui apparaît sur la page d’accueil du site de la société, basée à Long Beach, en Californie. Ce système consiste à placer un objet dans une centrifugeuse électrique scellée sous vide, où un énorme bras rotatif lui confère une vitesse hypersonique avant de le libérer en une fraction de seconde ; puis, à environ 61 km d’altitude, l’engin démarre un moteur qui lui permet d’atteindre une vitesse orbitale de 28 000 km/h.

Le concept est prometteur : cette approche permettrait de réduire largement les coûts de carburant et de se passer des fusées d’appoint utilisées par la plupart des sociétés spatiales, comme SpaceX et Blue Origin, ramenant le prix d’un lancement à moins de 500 000 $ selon Jonathan Yaney, le fondateur de SpinLaunch. Pour comparaison, les lancements « traditionnels » génèrent des coûts compris entre 5 et 100 millions de dollars. Le 22 octobre dernier, au Spaceport America, au Nouveau-Mexique, la start-up a effectué avec succès le premier test de son accélérateur suborbital.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Un lancement au coût le plus bas de l’industrie spatiale

Le prototype d’accélérateur utilisé — une structure de 50 mètres de haut (construite à une échelle d’un tiers), conçue pour fonctionner de 1300 à 8000 km/h — a catapulté dans les airs un projectile passif d’environ trois mètres de long, à « plusieurs milliers de kilomètres à l’heure ». Cet accélérateur à échelle réduite servira de banc d’essai à l’entreprise, ce qui permettra à l’équipe de valider ses modèles aérodynamiques et diverses technologies en matière de mécanisme de libération.

Cette méthode d’accélération rotationnelle exploite le moment angulaire pour accélérer progressivement le véhicule à des vitesses hypersoniques ; les dernières avancées dans le domaine des matériaux à haute résistance, comme la fibre de carbone, permettent au lanceur, comme aux petits satellites qu’il emportera à son bord, de résister à des forces d’accélération importantes.

intérieur centrifugeuse spinlaunch
Rendu d’un lanceur orbital fixé au bras rotatif de l’accélérateur suborbital de SpinLaunch. © SpinLaunch

Cette approche utilise une architecture considérablement moins coûteuse avec une puissance beaucoup plus faible. Même réduit à seulement 20% de sa pleine puissance, l’accélérateur suborbital récemment testé a pu lancer une charge utile à une altitude de « dizaines de milliers de pieds », a déclaré Yaney. Du fait qu’elle nécessite peu de carburant par rapport aux lancements traditionnels, cette technique permet de consacrer la majorité de la masse du véhicule spatial à la charge utile, et non plus aux propulseurs.

SpinLaunch a été fondée en 2014. Mais jusqu’à récemment, elle est restée particulièrement discrète sur sa technologie et ses objectifs. « Je trouve que plus le projet est audacieux et fou, plus il est préférable d’y travailler plutôt que d’en parler. Nous devions nous prouver que nous pouvions réellement réussir », se justifie Yaney. Mais la start-up s’impose peu à peu sur le secteur spatial. En 2019, elle a signé un contrat avec le département américain de la Défense. À ce jour, elle a levé un financement total de 110 millions de dollars depuis sa création, auprès de gros investisseurs tels que Kleiner Perkins, Google Ventures, Airbus Ventures, etc. « Il s’agit de construire une entreprise et un système de lancement spatial qui va entrer sur les marchés commerciaux avec une cadence très élevée et un lancement au coût le plus bas de l’industrie », a déclaré le PDG à CNBC.

Une trentaine d’essais prévus pour 2022

Lors de ce premier vol d’essai, le véhicule catapulté n’était pas équipé d’un moteur de fusée — ce qui sera nécessaire à terme, pour placer une charge utile en orbite. Mais la start-up prévoit d’en ajouter un, ainsi que d’autres systèmes internes, lors de ses futurs vols d’essai suborbitaux. À noter que les véhicules utilisés lors des essais seront réutilisables : ce premier lancement s’est d’ailleurs terminé par la récupération de l’engin de vol, qui est tout à fait prêt à voler à nouveau, selon le dirigeant de SpinLaunch.

La start-up effectuera des vols d’essai réguliers au cours de l’année prochaine, avec une variété de véhicules et de vitesses de lancement ; une trentaine de vols sont déjà planifiés. Bien entendu, SpinLaunch s’affaire à finaliser son projet à grande échelle — ce premier essai ayant permis d’éliminer environ 90% des risques selon Yaney. Actuellement, elle finalise un accord concernant l’emplacement de son système de lancement ; il s’agira a priori d’une « région côtière des États-Unis », mais la société n’a pas encore divulgué l’emplacement exact.

À terme, le véhicule orbital de SpinLaunch devrait être capable de transporter environ 200 kg de charge utile en orbite (ce qui représente quelques petits satellites). L’équipe estime que son procédé permettra de diviser par vingt le coût de la mise en orbite de satellites de petite taille et d’assurer des dizaines de lancements par jour. Si les prochains essais s’avèrent concluants, SpinLaunch espère proposer les services de son système de lancement hors normes à des clients d’ici 2024.

Une vidéo montrant l’accélérateur en action :

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