Une étude de la NASA dévoile que les planètes orbitant autour de jeunes naines rouges et qui sont situées dans les zones habitables de ces dernières, perdraient leur oxygène plus facilement qu’en présence d’une étoile hôte plus âgée.
La recherche de la vie au-delà de la Terre commence par l’analyse des zones habitables circumstellaires, une région entourant une étoile où les conditions, notamment la température, pourraient permettre l’apparition et la conservation de l’eau liquide sur la planète, ce qui est indispensable à la vie telle que nous la connaissons.
Une nouvelle étude de la NASA suggère cependant que certaines de ces zones habitables pourraient ne pas l’être réellement, en raison de fortes éruptions stellaires fréquentes émanant des naines rouges, qui crachent des quantités énormes de matière stellaire et de rayonnement dans l’espace.
C’est pour cette raison, qu’une équipe de la NASA souhaite étendre la manière dont sont définies les zones habitables, en tenant compte de l’impact de l’activité stellaire, qui peut menacer l’atmosphère des exoplanètes, avec une perte d’oxygène. « Si nous souhaitons trouver une exoplanète qui peut développer et maintenir la vie, nous devons découvrir quelles étoiles seraient les meilleurs parents. Nous sommes près de comprendre quel genre d’étoiles nous avons besoin pour cela », explique Vladimir Airapetian, l’auteur principal de l’étude, du Goddard Space Flight Center de la NASA.
Afin de déterminer la zone habitable d’une étoile, les scientifiques ont traditionnellement pris en compte la quantité de chaleur et de lumière qu’émet cette dernière. Il faut savoir que les étoiles plus massives que notre soleil, peuvent produire plus de chaleur et de lumière, de sorte que la zone habitable se situe plus loin, tandis que des étoiles plus petites et moins chaudes, possèdent des zones habitables plus proches d’elles.
Mais en plus de la chaleur et de la lumière visible, les étoiles émettent également des rayons X, des rayonnements ultraviolets, et produisent des éruptions stellaires (telles que les éruptions et les éjections de masse coronale). Un des effets possible de ce rayonnement est l’érosion atmosphérique, durant lequel des particules de haute énergie entraînent des molécules atmosphériques dans l’espace. Airapetian et son équipe prennent cet élément en compte pour leur nouveau modèle de définition des zones habitables.
La recherche de planètes habitables commence souvent par la découverte de naines rouges, car ce sont les plus petites, les plus froides, et les plus nombreuses des étoiles dans l’Univers. « En revanche, les naines rouges sont bien plus sujettes aux éruptions stellaires, qui sont plus fréquentes et plus puissantes que celles du Soleil par exemple. Pour évaluer l’habitabilité des planètes autour de ces étoiles, nous devons comprendre l’impact de ces différents effets sur elles », explique William Danchi, un astronome du Goddard Space Flight Center de la NASA, co-auteur de l’étude.
En se basant sur les observations recueillies lors de la mission Kepler de la NASA, les scientifiques expliquent également qu’un autre facteur influe sur l’habitabilité d’une planète : il s’agit de l’âge de l’étoile. En effet, chaque jour, les jeunes étoiles produisent des super-éruptions (au moins 10 fois plus puissantes que celles observées sur le Soleil), tandis que leurs homologues plus âgés, et ressemblant davantage au Soleil, n’émettent ce type de super-éruptions qu’une fois tous les 100 ans en moyenne. « Quand on observe des jeunes naines rouges dans notre galaxie, nous constatons qu’elles sont beaucoup moins lumineuses l’est notre soleil aujourd’hui. Par la définition classique, la zone habitable autour des naines rouges doit être 10 à 20 fois plus proche, que ce qu’il en est pour la Terre par rapport au Soleil. Maintenant, nous savons que les naines rouges génèrent beaucoup de rayons X et d’ultraviolets extrêmes dans les zones habitables, à cause des puissantes et fréquentes éruptions stellaires », explique Airapetian.
Les super éruptions stellaires provoquent l’érosion atmosphérique lorsque les émissions de rayons X et ultraviolets brisent les molécules en atomes, puis ionisent les gaz atmosphériques. Durant l’ionisation, le rayonnement frappe l’atome et les électrons. Comme les électrons sont bien plus légers que les ions, nouvellement formés, ils s’échappent beaucoup plus facilement et finissent dans l’espace. Comme il y a de plus en plus d’électrons chargés négativement qui sont générés, cela éjecte les ions chargés positivement hors de l’atmosphère. « Nous savons que des ions d’oxygène s’échappent également de l’atmosphère terrestre, mais à une échelle plus petite puisque le Soleil ne présente qu’une infime fraction de l’activité des jeunes étoiles. C’est pour comprendre ces effets lorsque vous avez une énergie plus grande, comme c’est le cas chez les jeunes étoiles, que nous avons développé ce modèle », explique Alex Glocer, un astrophysicien du Goddard Space Flight Center de la NASA, et également co-auteur de l’étude.
Le modèle développé par l’équipe estime la fuite d’oxygène sur les planètes situées autour de naines rouges, en supposant que les fuites ne soient pas compensées par une activité volcanique par exemple. D’autres modèles d’érosion atmosphérique qui ont déjà été présentés par le passé indiquaient que l’hydrogène est le plus vulnérable lors de cet événement. Comme il s’agit de l’élément le plus léger, l’hydrogène s’échappe facilement vers l’espace, laissant derrière lui une atmosphère plus riche et plus lourde en éléments tels que l’oxygène et l’azote.
Mais lorsque les scientifiques ont pris en compte les super-éruptions stellaires, leur nouveau modèle a indiqué que les violentes tempêtes des jeunes naines rouges produisaient suffisamment de rayonnement de haute énergie pour permettre l’évasion de l’oxygène et de l’azote également ! De véritables piliers essentiels à la vie. « Plus il y a de rayons X et d’énergie ultraviolette extrême, plus il y aura d’électrons qui seront générés et plus l’effet de fuite des ions sera conséquente. Cet effet est très sensible à la quantité d’énergie qu’émet l’étoile, ce qui signifie qu’il doit jouer un rôle important dans le fait qu’une planète soit considérée comme habitable, ou non », annonce Glocer.
Si nous prenons en compte uniquement l’échappement de l’oxygène, le modèle estime qu’une jeune naine rouge pourrait rendre une exoplanète proche inhabitable en quelques dizaines, voire centaines de millions d’années. Si par contre la planète venait à perdre l’hydrogène et l’oxygène atmosphérique, cela réduirait ou éliminerait l’approvisionnement en eau et la vie n’aurait aucune chance de s’y développer. « Les conclusions de l’équipe auront un impact certain sur les études en cours, et les missions visant à chercher des signes de vie dans la composition chimique des atmosphères de ces mondes », explique Shawn Domagal-Goldman, un scientifique du Goddard Space Flight Center de la NASA, qui n’était pas impliqué dans l’étude.
Modéliser le taux de perte de l’oxygène représente la première étape permettant de pouvoir ensuite élargir la définition classique de l’habitabilité, dans ce que nous appelons la zone habitable d’une étoile. Il est clair que lorsque des exoplanètes sont en orbite autour d’une étoile plus ancienne, possédant un environnement spatial plus doux, la définition classique est suffisante. Mais lorsqu’une étoile génère des rayons X et des ultraviolets extrêmes, alors la nouvelle définition sera utile. Les futurs travaux de l’équipe incluront la modélisation de l’échappement de l’azote, qui peut être comparé à l’échappement de l’oxygène, vu que l’azote est à peine plus léger que l’oxygène.
Une nouvelle planète a été découverte récemment en orbite autour de la naine rouge Proxima Centauri, et le nouveau modèle aura des implications certaines quant à cette découverte. En effet, Airapetian et son équipe ont appliqué leur modèle sur la planète, baptisée Proxima-b. Elle orbite autour de la naine rouge à une distance environ 20 fois plus proche que la Terre ne l’est du Soleil.
Compte tenu de l’âge de l’étoile hôte et de la proximité de la planète, les scientifiques pensent que Proxima-b est également soumise à des émissions de rayons X et d’ultraviolets extrêmes toutes les deux heures environ. Ils estiment également que l’oxygène s’échappera totalement de l’atmosphère de la planète en environ 10 millions d’années. De plus, l’activité magnétique ainsi que les éruptions stellaires sont intenses et continues, de ce fait, les scientifiques ont conclu qu’il était très peu probable que Proxima-b soit habitable.
« Nous avons des résultats pessimistes quant aux planètes orbitant autour de jeunes naines rouges dans cette étude, mais nous avons également une meilleure compréhension de quelles étoiles auraient de bonnes probabilités d’abriter des planètes habitables », explique Airapetian. « Comme nous en apprenons davantage concernant ce dont nous avons besoin comme étoiles hôtes, il devient de plus en plus évident que le Soleil représente une de ces étoiles hôtes parfaites, qui a permis la formation de la vie sur Terre », conclu-t-il.
VIDÉO : Visualisation de la perte d’ions d’oxygène sur une planète située dans la zone habitable d’une naine rouge
Dans cette vidéo (concept artistique), les rayons X et
la lumière ultraviolette proviennent d’une jeune naine rouge,
et provoquent la disparition des ions de l’atmosphère de la
planète. Les scientifiques sont parvenus à développer
un modèle capable d’estimer les taux d’échappement des ions
d’oxygène sur des planètes se situant autour de naines
rouges.