Des scientifiques suggèrent que l’étrange objet ‘Oumuamua est une comète, malgré ses caractéristiques inhabituelles, tandis que d’autres estiment que son origine pourrait être non naturelle. Bien que controversés, certains arguments laissent entendre qu’il pourrait s’agir d’un « vaisseau mère » extraterrestre envoyant des sondes visant à explorer la Terre et les autres planètes du système solaire, d’après un chercheur de Harvard et le directeur de l’AARO du Pentagone.
La véritable nature d’Oumuamua, le premier objet interstellaire connu ayant traversé notre système solaire, suscite de vifs débats. Découvert en 2017, ‘Oumuamua, qui signifie « messager » en hawaïen, intrigue depuis la communauté scientifique et les passionnés. On sait que cet objet est étrangement oblong et aplati, ne possède pas de coma de poussière lumineuse comme la plupart des comètes, et a brusquement accéléré (avec une vitesse dernièrement estimée à 87 kilomètres par seconde) en modifiant sa trajectoire en s’éloignant du Soleil. Un an après sa découverte, l’objet n’était plus détectable par les télescopes terrestres.
Plusieurs hypothèses ont été formulées concernant son origine et sa nature, allant d’un simple astéroïde à la forme inhabituelle à une comète « dégazant » son hydrogène, en passant par un « vaisseau extraterrestre venu explorer le système solaire ». Un document scientifique en cours d’élaboration par un chercheur d’Harvard et un haut responsable du Pentagone penche en faveur de cette dernière hypothèse.
Depuis la création du bureau dédié à l’enquête des anomalies dans tous les domaines (AARO) en 2022 par le département de la Défense américain, plus de 360 enquêtes ont été ouvertes sur l’identification de supposés phénomènes aériens non identifiés (PAN). Bien que la moitié des cas aient été identifiés comme étant des ballons-espions ou d’autres objets similaires, les preuves manquent pour écarter la possibilité d’entités extraterrestres pour certains cas.
En tant que premier objet interstellaire détecté dans notre système solaire, ‘Oumuamua a éveillé l’intérêt du Pentagone. Bien que le nouveau document sur l’origine extraterrestre d’Oumuamua n’ait pas encore été officialisé par le Pentagone et évalué par des pairs, il a été co-réalisé en partenariat avec le directeur de l’AARO.
Le chercheur de Harvard ayant co-écrit l’article estime que la forme allongée d’Oumuamua, son absence de coma et son changement de vitesse en s’éloignant du Soleil renforcent l’hypothèse d’une origine extraterrestre. D’autres éléments et événements coïncidant avec l’arrivée d’Oumuamua pencheraient également en faveur d’une origine non naturelle.
Des sondes larguées comme des « graines de pissenlit »
Dans le document publié en début de mois, les chercheurs exposent des « contraintes physiques » indiquant qu’Oumuamua pourrait être un vaisseau extraterrestre. Ils suggèrent notamment qu’il larguerait des sondes visant probablement à atteindre la Terre et les autres planètes du système solaire, un peu à la façon des graines qui se détachent d’un pissenlit lorsque l’on souffle dessus. Trop petites pour refléter suffisamment la lumière du Soleil, ces sondes seraient difficilement détectables par nos télescopes.
Pour appuyer son hypothèse, Avi Loeb, le chercheur de Harvard cité comme auteur principal du document, a évoqué l’arrivée sur Terre d’un petit météore interstellaire d’un mètre de diamètre. Baptisé IM2, ce météore n’avait cependant aucun lien avec ‘Oumuamua étant donné sa trajectoire. Toutefois, il s’est écrasé exactement six mois avant qu’Oumuamua n’atteigne le point de sa trajectoire le plus proche de la Terre. Simple coïncidence ou sonde larguée par ‘Oumumua (son supposé vaisseau mère) pour collecter des données sur Terre ? D’après le chercheur, la trajectoire du météore s’expliquerait par une manœuvre commandée à distance, impliquant un système de parachute.
Il est important de noter que ce système de largage de sondes imaginé ici par les chercheurs se rapproche des manœuvres de nos propres missions spatiales visant à explorer d’autres planètes, telles que celles sur Mars et leur panoplie de « rovers ». « Ces ‘graines de pissenlit’ pourraient être séparées de l’engin parent par la force gravitationnelle du Soleil ou par une capacité de manœuvre spécifique », explique Loeb.
D’après le chercheur, les extraterrestres sont probablement intéressés par nos planètes telluriques présentant des conditions propices à la vie, telles que l’existence d’eau liquide ou d’une atmosphère. Mais il suggère également que cette supposée civilisation extraterrestre pourrait ne plus exister, étant donné que la plupart des étoiles avoisinant le Soleil se sont formées il y a des milliards d’années. Le vaisseau et les sondes auraient ainsi pu être envoyés bien avant la formation de la Terre…
Une hypothèse controversée
Bien que Loeb et son équipe travaillent à rassembler des preuves en faveur de leur hypothèse, l’idée est difficile à accepter pour beaucoup de scientifiques et fait l’objet de lourdes critiques, et ça se comprend. Reprenons : étant donné qu’Oumuamua présente une accélération non gravitationnelle dans sa trajectoire malgré son absence de coma, il a été soulevé qu’une origine extraterrestre pourrait en être l’explication (car présence d’un système de propulsion), tel que mentionné précédemment. Cependant, « cette conclusion repose sur le malentendu commun selon lequel les voiles légères (solaires) peuvent accélérer à une fraction considérable de la vitesse de la lumière, permettant un voyage interstellaire rapide », écrivent par exemple des chercheurs dans une étude antérieure.
Ces experts estiment notamment que la vitesse d’Oumuamua serait impossible à atteindre par le biais d’un moyen de propulsion artificiel. De plus, il faudrait plus d’un demi-milliard d’années à ‘Oumumua pour atteindre notre système solaire, et cela même s’il provenait du système stellaire le plus proche du nôtre. Cette échelle de temps cosmologique rendrait ainsi très peu probable la possibilité qu’il puisse s’agir d’un vaisseau créé par une civilisation extraterrestre quelconque. Une autre étude explique également sa trajectoire et accélération inhabituelles comme résultant d’une propulsion par « bulles » d’hydrogène. Elle démontre ainsi qu’il s’agirait plutôt d’une comète dite « sombre ».
Cependant, il est important de souligner que ces études n’écartent pas totalement la possibilité d’une origine extraterrestre d’Oumuamua. L’absence de consensus au sein de la communauté scientifique témoigne de la complexité du sujet et de la nécessité de poursuivre les recherches sur cet énigmatique objet interstellaire.
Source : CFA Harvard
Vidéo montrant les caractéristiques inhabituelles d’Oumuamua (© NASA) :