Le Mexique a récemment été le théâtre d’une controverse médiatique suite à la présentation de prétendues momies extraterrestres au parlement. Ces spécimens, déjà mis en avant dans un documentaire en 2017, ont été démasqués comme étant des restes humains modifiés. Parallèlement, 11 policiers mexicains ont été condamnés pour le meurtre de 17 migrants et pourtant. La présentation des humanoïdes visait-elle donc à détourner l’attention de ce scandale judiciaire ?
L’information et les images ne vous auront sûrement pas échappé, tant les réactions ont été intenses. Récemment, le parlement mexicain a été le théâtre d’une présentation qui a suscité un vif débat international. Alors que le pays est souvent au centre de l’actualité pour des questions politiques ou économiques, c’est cette fois-ci une affaire d’ordre scientifique et archéologique qui a capté l’attention, du moins en apparence.
Deux humanoïdes, présentés comme des « corps non humains », vestiges d’une civilisation inconnue, ont été exposés. L’ovnilogue Jaime Maussan, connu pour ses affirmations audacieuses, a défendu l’idée que ces êtres ne faisaient pas partie de notre « évolution terrestre », provoquant une onde de choc de stupeur et d’indignation parmi les experts et le grand public. « Fortuitement », cette présentation intervient de manière concomitante à la conférence de presse de la NASA sur les PAN (Phénomène Aérospatial Non identifié). Mais une si grossière mascarade cacherait-elle une manipulation médiatique bien plus grave éthiquement et humainement ?
Les humanoïdes du Mexique : une « énigme » résolue
Lorsque les deux humanoïdes ont été présentés au parlement mexicain, l’annonce a rapidement fait le tour du monde. Cependant, pour ceux qui suivent de près les mystères archéologiques, ces spécimens n’étaient pas totalement inconnus. En effet, ils avaient déjà été mis en avant dans un documentaire intitulé « Unearthing Nazca » en 2017. À l’époque, le film avait suscité une grande curiosité, mais aussi de nombreuses interrogations.
Scientists unveiling two alleged alien corpses took place in Mexico, which are retrieved from Cusco, Peru. pic.twitter.com/rjfz9IMf37
— Indian Tech & Infra (@IndianTechGuide) September 13, 2023
D’après les informations fournies par l’AFP, des experts avaient rapidement contesté l’authenticité de ces prétendus extraterrestres. Les analyses avaient révélé que ces momies étaient en réalité un assemblage de différents restes humains. Plus précisément, certains éléments des momies, comme des os ou des tissus, provenaient de plusieurs individus différents, ce qui a écarté l’idée qu’il s’agissait de créatures uniques.
Le crâne allongé des momies, qui a été l’un des principaux arguments avancés pour soutenir leur origine extraterrestre, a également été démystifié. Selon Wired, cette particularité n’est pas le signe d’une origine extraterrestre, mais plutôt le résultat d’une pratique culturelle ancienne. En effet, certaines civilisations précolombiennes pratiquaient la déformation crânienne chez les enfants, à l’aide de planches ou de bandages.
Un souci de date et des technologies inappropriées
Enfin, l’argument le plus solide contre l’origine extraterrestre de ces momies provient de l’Université nationale autonome du Mexique. Comme le rapporte le Washington Post, après avoir effectué des analyses approfondies, l’université a daté ces spécimens de 1000 ans. Cette datation confirme qu’il s’agit bien de restes humains appartenant à une époque où les coutumes comme la déformation crânienne, citées précédemment, étaient courantes dans certaines régions du Pérou.
Enfin, lors de la présentation des prétendus extraterrestres, les chercheurs ont affirmé avoir utilisé des rayons X pour examiner les corps momifiés. Cependant, Julieta Fierro, chercheuse à l’Institut d’astronomie de l’Université nationale autonome du Mexique, a exprimé des doutes sur cette affirmation. Elle a souligné que pour déterminer si les corps prétendument calcifiés étaient « non humains », les scientifiques auraient besoin d’une technologie plus avancée que les simples rayons X qu’ils prétendaient avoir utilisés.
Bien que la présentation de ces humanoïdes ait suscité un vif intérêt et de nombreuses spéculations, les preuves scientifiques et archéologiques montrent qu’il s’agit bien de restes humains, et non d’êtres venus d’une autre planète.
Une longue histoire de supercherie
Jaime Maussan, l’ufologue autoproclamé et journaliste à l’origine de la présentation des prétendus extraterrestres au parlement mexicain, n’est pas un inconnu dans le monde des phénomènes paranormaux. Selon Forbes, Maussan a une carrière de journaliste s’étendant sur plus de 50 ans et s’est spécialisé dans la couverture des phénomènes extraterrestres. Cependant, son historique en matière de prétendues découvertes extraterrestres est loin d’être irréprochable.
Selon le Smithsonian Magazine, Maussan a déjà été impliqué dans des revendications similaires par le passé. En 2015, il avait révélé un corps qu’il prétendait être celui d’un extraterrestre, mais qui s’est avéré être les restes d’un enfant humain.
Puis en 2017, il avait participé à un reportage vidéo pour Gaia.com, montrant ce qu’il prétendait être des restes non humains. Ces prétendus extraterrestres ont par la suite été démasqués comme étant les corps momifiés d’enfants. En outre, il n’est pas le seul à avoir été impliqué dans des présentations controversées. José de Jesús Zalce Benítez, directeur de l’Institut scientifique pour la santé de la marine mexicaine, avait également joué un rôle clé dans la présentation d’un corps qui s’est avéré être une supercherie en 2017.
Bien que Maussan et ses collaborateurs aient une longue histoire dans le domaine des phénomènes inexpliqués, leurs antécédents de fausses déclarations et de supercheries soulèvent des questions sur la crédibilité de leurs affirmations récentes.
Une distraction médiatique ?
Alors que cette affaire d’extraterrestres occupait le devant de la scène médiatique, un autre événement majeur se déroulait au Mexique. 11 policiers mexicains ont été reconnus coupables du meurtre de 17 migrants près de la frontière américaine en 2021. Ces migrants, originaires du Guatemala et du Honduras, ont été abattus puis brûlés. Les corps calcinés ont été retrouvés dans une camionnette à Camargo, une zone de conflits entre cartels de la drogue.
Le bureau du procureur de l’État de Tamaulipas a annoncé que ces policiers ont été reconnus coupables après un procès qui a duré plus de trois mois. Le juge Patricio Lugo Jaramillo a estimé qu’il y avait suffisamment de preuves pour condamner ces anciens policiers. Les sentences, qui seront prononcées prochainement, pourraient les conduire à une peine allant jusqu’à 50 ans d’emprisonnement.
Les victimes ont été tuées par balles avant d’être incinérées. Initialement, 12 policiers étaient accusés de meurtre, mais l’un d’entre eux a vu son accusation adoucie en échange de sa coopération avec l’enquête. Au total, 19 corps ont été découverts, dont deux Mexicains identifiés comme des passeurs qui devaient conduire les migrants à la frontière.
Il s’agit de l’un des massacres les plus sanglants jamais connus au Mexique, après qu’un groupe de 72 migrants ont été assassinés par des narcotrafiquants présumés, également dans l’État de Tamaulipas, en août 2010, selon l’AFP.
Cette situation survient alors que le New York Times publie un article détaillé sur le passage « non autorisé » de migrants à travers la forêt du Darien en direction des États-Unis. Face à l’augmentation de ce mouvement illicite, les États-Unis, la Colombie et le Panama ont signé un accord en avril. Cependant, le profit tiré de cette migration est plus élevé que jamais pour les dirigeants locaux qui ne veulent pas mettre un terme à cette situation, suscitant la frustration des responsables mexicains et des forces de l’ordre.
Face à la gravité de cette affaire, certains observateurs s’interrogent sur le timing de la présentation des prétendus extraterrestres. Était-ce une tentative de détourner l’attention de cette affaire judiciaire majeure ? La coïncidence des deux événements a suscité des spéculations, bien que rien ne prouve formellement un lien entre les deux.