La maladie de Lyme, causée par des bactéries nommées « boréllies » (Borrelia garinii, B. afzeli, B. burgdorferi, etc.) et transmise par les tiques, peut s’avérer persistante et dangereuse si elle n’est pas traitée à temps. Jusqu’ici, les efforts se sont concentrés sur le développement ou l’amélioration des traitements, mais une équipe de chercheurs a récemment découvert qu’un antibiotique connu possède en réalité un spectre d’action suffisamment « ciblé » pour éliminer certaines bactéries sans être nocif pour les animaux ou la flore. Répandu dans la nature, il pourrait ainsi permettre d’éradiquer la maladie de Lyme directement à la source, selon les chercheurs. Les premiers essais sur le terrain auront lieu l’été prochain.
La maladie de Lyme est un problème croissant en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. Elle provoque d’abord une éruption cutanée caractéristique en forme d’œil de bœuf et un syndrome pseudogrippal. Si elle n’est pas traitée, elle peut entraîner de graves problèmes à long terme, comme l’arthrite de Lyme ou des dérangements neurologiques.
« La maladie de Lyme est bien placée pour être éradiquée », affirme Kim Lewis, de l’université Northeastern à Boston. « Nous nous préparons, le premier essai sur le terrain aura lieu l’été prochain ». La maladie de Lyme est causée par une bactérie appelée Borrelia burgdorferi qui se cache dans les souris sauvages. Les tiques qui se nourrissent de ces souris sont infectées et peuvent contaminer d’autres animaux, y compris l’Homme.
Hygromycine A : une nocivité ciblée à l’étude depuis des années
Actuellement, elle est traitée par des antibiotiques à large spectre tels que la doxycycline, qui tuent un large éventail de bactéries. Cependant, cela perturbe le microbiote intestinal, provoquant des symptômes tels que la diarrhée (parfois sur une longue durée), et peut également entraîner une résistance accrue aux antibiotiques.
L’équipe de Lewis a découvert qu’un composé connu, l’hygromycine A, est totalement inoffensif pour les animaux et a peu d’effet sur la plupart des bactéries, mais est extrêmement mortel pour les bactéries spirochètes telles que B. burgdorferi. Les bactéries spirochètes ont une forme en tire-bouchon qui leur permet de s’enfouir dans les tissus. Elles sont également à l’origine de maladies telles que la syphilis. « Ce sont des agents pathogènes coriaces », déclare Lewis.
Lors des tests sur les animaux de l’hygromycine, l’équipe n’a pas observé d’effets nocifs, quelle que soit la dose. « Elle est exceptionnellement sûre », affirme Lewis. La société FlightPath est en train de demander aux États-Unis le feu vert initial nécessaire pour que l’antibiotique à spectre étroit puisse être testé sur l’Homme.
L’hygromycine pourrait également être utilisée comme traitement de la syphilis, notamment parce que cette infection bactérienne développe une résistance aux traitements standard. En outre, l’équipe de Lewis a montré que le fait de nourrir des souris avec des appâts contenant de l’hygromycine peut éliminer les infections à B. burgdorferi. En théorie, lâcher de tels appâts dans la nature pourrait éradiquer la maladie de Lyme de zones entières, voire de pays entiers.
Un risque important de propagation de super-bactéries
Selon Lewis, un essai sur le terrain réalisé il y a dix ans avec des appâts à base de doxycycline a été couronné de succès. Mais l’utilisation généralisée de ce produit à cette fin n’est pas souhaitable, car elle pourrait conduire de nombreux microbes à développer une résistance aux antibiotiques.
En revanche, les études de Lewis suggèrent qu’il est extrêmement difficile pour B. burgdorferi de développer une résistance à l’hygromycine. En effet, cet antibiotique ressemble à des nutriments essentiels que les spirochètes ne peuvent pas fabriquer eux-mêmes et qu’ils absorbent à l’aide d’un transporteur spécifique, de sorte que les mutations qui bloquent l’absorption de l’hygromycine priveraient également les spirochètes de ces nutriments.
Lewis précise que son équipe n’est pas la première à découvrir le potentiel de l’hygromycine. Elle a été étudiée comme traitement potentiel d’une maladie porcine dans les années 1980, mais les recherches avaient été abandonnées. Des vaccins contre la maladie de Lyme sont également en cours de développement, mais l’éradication de la maladie serait une option encore meilleure.