Une équipe internationale de chercheurs a identifié des anticorps qui neutralisent le variant Omicron mais aussi des souches antérieures du SARS-CoV-2. Les anticorps ciblent des zones de la protéine Spike du virus qui ne changent pas lors de la mutation, ce qui suggère qu’ils seraient aussi efficaces contres les prochains variants.
Les fêtes de fin d’année sont toujours très attendues, peu importe l’endroit de la planète où l’on évolue. C’est le moment où on se retrouve en famille, l’occasion de faire le bilan des douze mois écoulés et espérer que les suivants seront meilleurs.
Tout le monde s’est dit que 2021 allait être une meilleure année que 2020… Même si le variant Delta tente de tenir la dragée haute à son successeur, le variant Omicron a été la vraie star de cette fin d’année. Pas un jour où l’on ne parle pas de lui.
Cette variante du virus se répand beaucoup plus vite que les anciennes souches. Omicron compte 37 mutations dans la protéine Spike, qu’il utilise pour s’accrocher et envahir les cellules de son hôte. Un nombre de mutations inhabituellement élevé. Pour les scientifiques, ce serait l’une des raisons pour laquelle ce variant se propage si rapidement, qu’il infecte les personnes vaccinées ou réinfecte ceux qui l’ont déjà été.
Évaluation des effets de la mutation
Une équipe internationale de chercheurs a publié une étude le 23 décembre dans la revue Nature dans laquelle ils affirment avoir identifié des anticorps capables de neutraliser non seulement le variant Omicron, mais aussi des variants plus anciens.
Pour cela, ils ont évalué les effets de la mutation. Puis ils ont conçu un virus désactivé (qui ne se multiplie pas) similaire aux coronavirus, doté d’une protéine Spike. Ils ont ensuite créé un autre pseudovirus qui possède une protéine Spike propre au variant Omicron mais aussi à ceux trouvés depuis le début de la pandémie.
Ils ont alors examiné dans quelle mesure les différentes versions des protéines Spike étaient capables de se lier à la protéine de surface que le virus utilise pour s’accrocher et entrer dans la cellule hôte. Ils ont découvert que la protéine Spike d’Omicron se lie 2,4 fois mieux que celle trouvée sur le virus isolé au tout début de la pandémie.
Par la suite, les chercheurs ont examiné dans quelle mesure les anticorps créés pour faire face aux variants précédents protégeaient contre Omicron. Ainsi, ils ont utilisé des anticorps de patients qui avaient déjà été infectés par les versions antérieures mais aussi ceux de personnes qui ont été vaccinées, ou infectées+vaccinées. Il s’est avéré que les anticorps des personnes infectées par les versions antérieures, tout comme ceux de personnes vaccinées avec l’un des six vaccins les plus utilisés à l’heure actuelle, avaient tous des capacités réduites à bloquer l’infection.
Les anticorps générés par la vaccination seraient peu efficaces
Les anticorps des personnes déjà infectées ou vaccinées avec le Spoutnik V, le Sinopharm ou une dose unique de Johnson & Johnson avaient peu — ou pas — de capacité neutralisante pour bloquer Omicron à l’entrée des cellules. Ceux générés en réponse aux vaccins à ARNm de Pfizer/BioNTech, Moderna et AstraZeneca, ont conservé une activité bloquante mais réduite de 20 à 40 fois (par rapport à la souche initiale). C’est bien plus que pour tous les autres variants.
Les anticorps des personnes infectées puis vaccinées avec deux doses ont une activité neutralisante plus efficace. Elle est aussi réduite certes, mais de seulement cinq fois. Et les anticorps produits par une troisième dose de vaccin à ARNm sur un groupe de patients en dialyse rénale ont révélé une réduction de seulement quatre fois de l’activité bloquante. « Cela montre qu’une troisième dose est vraiment utile contre Omicron », déclare dans un communiqué David Veesler, chercheur au Howard Hughes Medical Institute et professeur agrégé de biochimie à la faculté de médecine de l’Université de Washington à Seattle. Cependant, selon d’autres études, l’effet d’une troisième dose contre Omicron ne durerait que 3-4 mois.
Quatre classes d’anticorps résistant à Omicron
Mais alors tous les anticorps sont-ils voués à l’échec face à Omicron ? Tous, non. Un petit anticorps résiste encore et toujours à l’envahisseur. Il s’agit du sotrovimab. Il perd de son activité bloquante face au variant, mais seulement d’un facteur 2 ou 3. Et lorsque les scientifiques ont testé un plus grand panel d’anticorps — générés pour lutter contre les variants précédents —, ils ont identifié quatre classes d’anticorps qui conservent leur activité bloquante face à Omicron.
Les anticorps de chacune de ces quatre classes ciblent l’une des quatre zones de la protéine Spike du SARS-CoV-2, présente aussi sur un groupe de coronavirus apparenté : les sarbecovirus. Ces sites de la protéine peuvent persister car ils jouent une fonction essentielle qu’elle perdrait en cas de mutation. On les appelle les « zones conservées ».
« La découverte du fait que les anticorps soient capables de neutraliser, via la reconnaissance des zones conservées dans différents variants, suggère que la conception de vaccins et le traitement par anticorps qui les ciblent pourraient être efficaces contre un large éventail de variants. Cette découverte nous dit qu’en se concentrant sur les anticorps qui ciblent ces sites hautement conservés sur la protéine Spike, il existe un moyen de surmonter l’évolution continue du virus », conclut le professeur Veesler.