Ces engins à quatre pattes développés par Ghost Robotics, baptisés « Vision 60 », sont conçus pour effectuer des missions d’inspection, de surveillance ou de cartographie à distance. L’US Air Force s’est récemment livrée au déploiement de ces robots, dans le but de tester son Advanced Battle Management System (ABMS), un système sophistiqué de partage d’informations en temps réel.
Car selon le Dr Will Roper, secrétaire adjoint de l’armée de l’air pour l’acquisition, la technologie et la logistique, « les futurs champs de bataille seront caractérisés par la saturation des informations ». Ainsi, cette mise en situation était notamment destinée à présenter un aperçu de l’immense quantité d’informations que les protagonistes auront à gérer en conditions réelles.
Des robots pour la reconnaissance du terrain
En plus de tester les technologies de collecte et de partage de données, l’événement était l’occasion pour l’Air Force d’utiliser ses chiens-robots pour défendre le périmètre de la base aérienne de Nellis. Le Vision 60 est un Q-UGV, un Quadrupedal Unmanned Ground Vehicle (littéralement un véhicule terrestre quadrupède sans pilote), conçu pour l’inspection à distance, les missions de reconnaissance, la cartographie et les communications distribuées. Ce chien-robot est tout terrain (il peut même grimper des escaliers) et peut évoluer la nuit, comme on peut le voir dans la vidéo suivante :
Selon le site web de Ghost Robotics, les Q-UGV sont quasiment « imparables » et leur conception modulaire leur permet d’exécuter une grande variété de missions. En effet, ces agents terrestres autonomes peuvent être adaptés à n’importe quel usage. Divers capteurs et solutions de communication, de même que les dimensions du robot, peuvent être adaptés à chaque besoin spécifique. « En réduisant la complexité, nous augmentons intrinsèquement la durabilité, l’agilité et l’endurance, et réduisons le coût de déploiement et de maintenance des robots terrestres », précisent les concepteurs.
Hautement modulaire, de petite taille, le Vision 60 présente des avantages certains par rapport à des véhicules sans pilote à roues ou à chenilles, moins agiles. Ainsi, ces robots pourraient tout à fait accompagner le personnel humain dans ses opérations, ne serait-ce que pour effectuer un repérage de la zone avant que les humains avancent sur le champ de bataille. Ils pourraient également effectuer toutes les tâches trop dangereuses ou physiquement exigeantes.
Bien entendu, ces chiens-robots sont aussi un moyen idéal de relayer des données critiques aux postes de contrôle. Tout comme ils pourraient être capables d’intercepter et de géolocaliser les communications de l’ennemi. Étant donné le rôle clé que peut jouer le Vision 60 en zone de conflits, il fera très certainement partie des forces armées américaines dans un futur proche.
Une approche « innovante et évolutive » de la guerre
Mais ces robots quadrupèdes ne sont qu’une petite partie de l’Advanced Battle Management System (ABMS) de l’Air Force, un projet à 3,3 milliards de dollars ! Selon John Raymond, chef des opérations spatiales, les adversaires potentiels des États-Unis investissent déjà massivement dans des solutions de diffusion, de gestion et de traitement des données. L’US Air Force ne souhaitait pas se faire distancer dans cette « guerre moderne ».
L’ABMS regroupe ainsi plusieurs technologies de pointe pour collecter, analyser et partager les données pertinentes pour les combattants, afin de prendre de meilleures décisions plus rapidement. Le système collecte, fusionne les informations et les rend immédiatement disponibles aux différentes forces déployées sur le terrain. Il relie ainsi les troupes terrestres, aériennes et même maritimes de manière transparente.
Énorme infrastructure numérique, intégrant cloud computing et intelligence artificielle, casques de réalité virtuelle et drones (pour assurer une connexion 5G, en partenariat avec AT&T) étaient donc de la partie lors de ce second essai sur le terrain.
Ce nouvel exercice avait pour objectif de tester les capacités de l’ABMS à détecter et vaincre les efforts visant à perturber les opérations américaines dans l’espace, en plus de contrer les attaques terrestres ; le point culminant de la démonstration a été l’utilisation de plusieurs capteurs distribués pour détecter et abattre de faux missiles de croisière russes. Une nouvelle façon de faire la guerre, à laquelle les combattants doivent s’habituer : « Cela a obligé les commandants et les opérateurs à faire confiance à l’analyse des données et à l’intelligence artificielle pour comprendre la bataille », souligne Roper. Les données sont devenues une ressource de guerre essentielle, aussi vitale que le carburéacteur ou les satellites. Elles constituent « la clé de la guerre de nouvelle génération » selon le secrétaire adjoint.
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Le premier test du système a eu lieu en décembre 2019. Ce deuxième volet a mobilisé pas moins de 70 équipes de l’industrie, 65 équipes gouvernementales de tous les services, y compris la garde côtière, 35 plateformes militaires, sur une trentaine d’emplacements géographiques, tous contribuant à ce que les responsables du projet le considèrent comme « la plus grande expérience conjointe de l’histoire récente ».
L’ABMS est le cœur de l’approche « centrée réseau » menée conjointement par tous les services du ministère américain de la Défense. Cette initiative, désignée par Joint All-Domain Command and Control (JADC2), doit permettre aux forces américaines d’être à la pointe du traitement de l’information. Rapidité, utilité et agilité sont devenus les maîtres mots de la guerre moderne. « Le gagnant sera celui qui sera capable de s’adapter rapidement face au changement et à l’incertitude », a déclaré Preston Dunlap, architecte en chef du département de l’Air Force. À ce jour, certaines fonctionnalités sont prêtes à être utilisées sur le terrain, mais d’autres expérimentations sont d’ores et déjà planifiées pour perfectionner encore le système.