Des scientifiques ont découvert comment modifier génétiquement des bactéries afin qu’elles produisent une soie d’araignée ultra-résistante.
Il faut savoir que la soie d’araignée est bien plus résistante que l’acier, mais en produire à partir d’araignées est très peu efficace. Trouver un moyen de créer ce matériau en masse pourrait mener au développement de tissus super-résistants pour des applications multiples et variées, dont peut-être même des combinaisons spatiales de nouvelle génération.
Les scientifiques avaient déjà essayé de reproduire le processus en ajoutant le gène permettant la production de soie dans une bactérie, mais cela n’avait pas fonctionné.
« Dans la nature, de nombreux matériaux à base de protéines ont des propriétés mécaniques étonnantes, mais l’approvisionnement en ces matériaux est très souvent limité », a déclaré dans un communiqué le chercheur principal Fuzhong Zhang, de l’Université de Washington à St. Louis.
« Mon laboratoire s’intéresse à l’ingénierie des bactéries afin que nous puissions non seulement produire ces matériaux, mais aussi les améliorer ».
Pour contourner ces limites, les scientifiques ont découpé les gènes de la soie d’araignée en morceaux plus petits, qui ont été réassemblés une fois intégrés dans le génome bactérien. La recherche devrait être présentée mardi à la réunion nationale du printemps 2019 de l’American Chemical Society.
Les gènes intégrés dans les bactéries codaient deux parties de la protéine de soie de l’araignée, chacune flanquée d’une séquence appelée intégrine divisée. Les intégrines divisées sont des séquences protéiques naturelles ayant une activité enzymatique : deux intégrines séparées sur différents fragments de protéines peuvent se rejoindre et se découper ensuite pour donner lieu à une protéine intacte.
Après avoir introduit les gènes, les chercheurs ont ouvert la bactérie et purifié les petits morceaux de protéine de soie d’araignée. Le mélange des fragments leur a permis de s’assembler par le biais de la « colle » de la séquence d’intéine scindée, qui s’est ensuite découpée pour former la protéine complète.
Lorsqu’elle est filée en fibres, la soie d’araignée produite de manière microbienne possède toutes les propriétés de la soie d’araignée naturelle, notamment une résistance, une ténacité et une extensibilité exceptionnelles.
Les chercheurs ont obtenu plus de soie avec cette méthode qu’ils ne le pouvaient avec des araignées (jusqu’à deux grammes de soie par litre de culture bactérienne), et ils essaient actuellement d’augmenter davantage le rendement.
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Bien entendu, le rendement n’est pour le moment pas très intéressant d’un point de vue industriel, mais le communiqué de presse indique qu’il s’agit d’une avancée considérable par rapport aux autres tentatives de production en masse de soie.
Toutefois, si cette recherche prend de l’ampleur, des entreprises privées ou gouvernementales pourraient s’intéresser à la technologie développée. C’est d’ailleurs déjà le cas de la NASA.
« La NASA est l’un de nos bailleurs de fonds et s’intéresse à la bioproduction » déclare Zhang. « Ils développent actuellement des technologies permettant de convertir le dioxyde de carbone en hydrates de carbone pouvant servir de nourriture aux microbes que nous sommes en train de manipuler. Ainsi, les astronautes pourraient produire ces matériaux à base de protéines dans l’espace, sans nécessiter un apport important en matières premières ».