Boire détruit le cerveau : +133 % de lésions chez les gros buveurs

Même un seul verre par jour suffit à provoquer des dégâts, révèle une étude.

toute consommation alcool nocive pour cerveau selon etude
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Une étude menée par des chercheurs brésiliens confirme les récentes mises en garde de l’Organisation mondiale de la santé : l’alcool, même consommé avec modération, représente un risque réel pour la santé cérébrale. Selon ces travaux, boire plus d’un verre d’alcool par jour augmente de manière significative le risque de lésions cérébrales irréversibles. Ces résultats interviennent dans un contexte de préoccupations accrues parmi les professionnels de santé, alors que l’alcool demeure l’une des principales causes évitables de mortalité à travers le monde.

Qu’elle soit ponctuelle ou régulière, la consommation de boissons alcoolisées induit une série de modifications notables dans le cerveau. Parmi les plus fréquentes figure une sensation d’anesthésie : l’alcool agit comme un sédatif, entravant la communication essentielle entre les neurones.

Lorsque l’éthanol atteint le cortex frontal – zone clé du cerveau impliquée dans la prise de décision et le raisonnement – il en ralentit l’activité. Cette action perturbe la capacité de régulation de soi et altère la logique de pensée.

Au-delà de ces effets immédiats et de son potentiel addictif bien documenté, l’alcool exerce à long terme une influence délétère sur le système nerveux central. C’est dans cette perspective que s’inscrit la récente étude dirigée par le Dr Alberto Fernondo Oliveira Justo, de la faculté de médecine de l’université de São Paulo.

Pour mener à bien cette recherche, les scientifiques ont analysé les cerveaux de 1 781 personnes décédées, âgées en moyenne de 75 ans. Ils ont recherché des marqueurs de lésions, tels que des agrégats de protéines tau et des signes d’artériosclérose hyaline – une pathologie se traduisant par un épaississement et un durcissement des petits vaisseaux sanguins, compromettant la perfusion cérébrale.

Les informations sur les habitudes de consommation d’alcool de ces personnes ont été recueillies auprès de leurs proches. Sur cette base, les sujets ont été répartis en quatre groupes : 965 abstinents, 319 buveurs modérés (jusqu’à sept verres par semaine), 129 gros buveurs (huit verres ou plus hebdomadaires) et 368 anciens gros buveurs. L’étude définit un « verre » standard comme contenant 14 grammes d’alcool pur – soit environ 350 ml de bière, 150 ml de vin ou 45 ml de spiritueux.

Un risque de lésions cérébrales vasculaires accru de 133 % chez les gros buveurs

Les résultats, publiés dans la revue scientifique Neurology, sont sans équivoque. Après avoir pris en compte des facteurs comme l’âge, le tabagisme ou encore l’activité physique, les chercheurs ont constaté que les gros buveurs présentaient un risque 133 % plus élevé de développer des lésions cérébrales vasculaires par rapport aux abstinents. Chez les anciens gros buveurs, ce risque augmentait de 89 %, tandis qu’il atteignait 60 % chez les buveurs modérés.

« Nous avons observé que la consommation excessive d’alcool est directement corrélée à des lésions cérébrales, pouvant à long terme altérer la mémoire et les fonctions cognitives », explique le Dr Justo, cité par ScienceDaily.

L’étude met également en lumière une incidence accrue des enchevêtrements de protéines tau chez les gros buveurs et les anciens gros buveurs. Ces agrégats sont associés à la maladie d’Alzheimer : leur présence était respectivement 41 % et 31 % plus élevée que chez les abstinents. Un autre constat marquant : les gros buveurs décédaient en moyenne treize ans plus tôt que les personnes n’ayant jamais consommé d’alcool.

Ces résultats s’inscrivent dans la lignée de nombreuses recherches antérieures sur les effets neurotoxiques de l’alcool. Depuis les travaux fondateurs de Fama, J. L., Butters, N. et Cermak, L. S. publiés en 1985, les scientifiques ont mis en évidence l’impact de l’alcool sur le cerveau, notamment à travers le syndrome de Korsakoff – une forme sévère d’amnésie due à une carence en thiamine (vitamine B1), fréquente chez les alcooliques chroniques.

Un enjeu majeur de santé publique

« La consommation excessive d’alcool représente un problème de santé publique mondial majeur, corrélé à une hausse des pathologies et de la mortalité », rappelle le Dr Justo. « Il est essentiel de comprendre ces effets afin de sensibiliser le public et de renforcer les politiques de prévention visant à réduire les usages nocifs de l’alcool », ajoute-t-il. Une déclaration qui résonne avec la position adoptée par l’OMS en 2023 : « aucun niveau de consommation d’alcool n’est sans danger pour la santé. »

L’étude brésilienne, bien qu’édifiante, présente toutefois certaines limites. Les auteurs soulignent que leurs résultats révèlent des associations, mais ne permettent pas d’établir un lien de causalité directe.

Par ailleurs, la durée pendant laquelle les participants ont consommé de l’alcool n’a pas été prise en compte. L’étude ne distingue pas non plus les différents profils de consommation : un verre ou deux chaque soir, ou une absorption plus massive mais plus occasionnelle – des nuances importantes qui pourraient infléchir les conclusions et méritent d’être explorées par de futures recherches.

Source : Neurology

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