Le CO2 atmosphérique atteint son plus haut niveau depuis 4 millions d’années

niveaux CO2 maximum
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Des chercheurs de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) tirent à nouveau la sonnette d’alarme : les niveaux de CO2 dans l’atmosphère ont atteint un niveau record au mois de mai, avec une concentration moyenne de 419 parties par million (ppm). C’est le niveau le plus élevé jamais enregistré depuis le début des mesures, en 1958, et les experts affirment que cela ne s’était pas produit depuis l’époque du Pliocène.

Cela fait 63 ans que le climatologue Charles David Keeling a initié les mesures de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, effectuées encore aujourd’hui à l’observatoire Mauna Loa, situé à 3400 mètres d’altitude sur l’île d’Hawaï ; c’est l’un des premiers scientifiques à avoir mis en évidence l’effet de serre dû à l’augmentation des niveaux de CO2. Les scientifiques de la NOAA et de la Scripps Institution of Oceanography poursuivent la surveillance depuis des années et annoncent aujourd’hui de tristes résultats.

Pour le mois de mai, la NOAA rapporte une concentration moyenne de CO2 de 419,19 ppm ; les scientifiques de l’institut Scripps rapportent une valeur quasi similaire, de 418,92 ppm. Au mois de mai 2020, la moyenne était de 417 ppm. Encore une fois, comme ces 60 dernières années, la tendance est à la hausse. « Nous ajoutons environ 40 milliards de tonnes métriques de CO2 dans l’atmosphère chaque année », précise Pieter Tans, scientifique principal au Laboratoire de surveillance mondiale de la NOAA. Si aucune mesure n’est prise pour inverser la tendance, nous allons droit vers « un changement climatique catastrophique », avertit l’expert.

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2,3 ppm d’augmentation en un an

Les émissions de dioxyde de carbone sont principalement issues des combustibles fossiles, utilisés dans l’industrie et les transports. L’accumulation de ce gaz dans l’atmosphère entraîne un effet de serre, à l’origine du réchauffement global de la planète.

Si la moyenne mensuelle la plus élevée est enregistrée chaque année au mois de mai, c’est parce que depuis l’automne précédent, les végétaux de l’hémisphère nord libèrent continuellement du CO2 ; ce n’est qu’à partir du mois de mai que ces plantes entament le processus d’absorption de CO2 nécessaire à leur développement. On observe ainsi chaque année à la même période un pic de concentration, immédiatement suivi d’une baisse des niveaux de CO2. Charles David Keeling fut le premier à mettre en évidence le phénomène, ses travaux ayant abouti à une courbe de tendance en dents de scie appelée « courbe de Keeling ».

courbe keeling CO2
Graphique illustrant la trajectoire ascendante du dioxyde de carbone dans l’atmosphère telle que mesurée à l’observatoire de Mauna Loa par la NOAA et la Scripps Institution of Oceanography. La fluctuation annuelle est connue sous le nom de courbe de Keeling. © Laboratoire de surveillance mondiale de la NOAA

Mais chaque année, cette valeur moyenne ne cesse d’augmenter : les mesures effectuées sur les cinq premiers mois de 2021 ont montré une augmentation moyenne de 2,3 ppm par rapport aux mêmes mois de 2020 ! Et comme l’expliquent les experts de la NOAA, les mesures de confinement prises pendant la pandémie de coronavirus ont certes entraîné une réduction des émissions, mais n’ont malheureusement pas permis d’éliminer le CO2 présent dans l’atmosphère ; ce gaz peut persister des milliers d’années après son émission.

Non seulement la concentration de CO2 a augmenté, mais elle est aujourd’hui comparable à celle qui existait à l’époque du Pliocène, il a environ 4,1 à 4,5 millions d’années, alors que les températures étaient à leur plus haut niveau. À partir des compositions isotopiques du carbone trouvées dans les sédiments marins de divers points océaniques du monde entier, les scientifiques ont en effet réussi à estimer les niveaux de CO2 atmosphérique de cette époque reculée ; ils s’élevaient alors à 400 ppm environ.

Quand les arbres poussaient aux pôles

À cette période, en particulier durant l’optimum climatique du Pliocène, la planète était très différente : une étude parue dans Nature rapporte que la température moyenne était environ 4 °C plus élevée qu’à l’époque préindustrielle et que le niveau de la mer était environ 23 mètres plus élevé qu’il ne l’est actuellement. En outre, les zones arctiques, qui sont aujourd’hui recouvertes par la toundra, abritaient autrefois de grandes forêts. Des feuilles de hêtre fossilisées ont même été retrouvées dans les zones montagneuses de l’Antarctique !

Alors que les niveaux de CO2 atmosphérique relevés aujourd’hui sont comparables à ceux caractérisant cette époque, les scientifiques craignent que notre planète retourne peu à peu à ces mêmes conditions, qui seraient dramatiques pour l’humanité. Un changement climatique radical, qui pourrait survenir d’ici quelques centaines d’années seulement. Mais d’ici la fin de ce siècle, le niveau de la mer pourrait déjà augmenter de plus d’un mètre, menaçant les millions de personnes vivant dans les zones côtières ; quant aux températures estivales, elles pourraient devenir insupportables.

Ces mesures récentes de CO2 confirment malheureusement une tendance qui paraît aujourd’hui incontournable. Malgré plusieurs décennies de négociations mondiales autour du climat, malgré l’Accord de Paris entré en vigueur en 2016 — qui prévoit de contenir le réchauffement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels — le monde n’a pas réussi à ralentir les augmentations annuelles de niveaux de CO2.

Pour Pieter Tans, il est urgent d’agir. Des mesures concrètes, telles que le remplacement des combustibles fossiles par des énergies non émettrices de gaz à effet de serre (solaire, éolien), pourraient véritablement changer la donne. Il est sans doute trop tard pour inverser la tendance, selon le spécialiste, mais nous pouvons encore limiter les conséquences des changements climatiques à venir.

Source : NOAA

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