Les biologistes étudiant l’évolution des populations animales et végétales savent depuis plusieurs années déjà que l’activité humaine, sous tous ses aspects, modifie le comportement et la dynamique des espèces, les poussant à s’adapter à de nouvelles situations émergentes. Cependant, il n’existait que très peu de données rendant compte de modifications plus profondes, notamment concernant l’impact de l’Homme sur la diversité génétique animale. Une nouvelle étude montre que les activités humaines peuvent avoir un effet plus néfaste que prévu, en altérant la capacité des animaux à s’adapter génétiquement aux changements drastiques de leurs habitats naturels. Toutefois, ces résultats dépendent grandement de l’espèce et de la géographie. Certaines ayant montré, au contraire, une optimisation génétique.
Les résultats rapportés dans la revue Ecology Letters montrent que les changements environnementaux causés par l’Homme entraînent des modifications dans la variation génétique de milliers d’espèces d’oiseaux, de poissons, d’insectes et de mammifères. Les preuves d’impact humain étaient les plus évidentes pour les insectes et les espèces de poissons.
Étant donné que les animaux dépendent de la variation génétique pour s’adapter et évoluer en fonction des changements environnementaux, de nombreuses espèces sur lesquelles nous reposons peuvent disparaître à mesure que leur vulnérabilité à la perte d’habitat, à la pollution et au changement climatique augmente. Bien que nous puissions observer les effets de l’Homme sur la biodiversité de la planète à travers le prisme des extinctions animales, les chercheurs ignoraient jusqu’à présent à quel point les humains érodaient la capacité sous-jacente de la biodiversité à se maintenir.
Une modification temporelle et spatiale de la diversité génétique animale
Une équipe de biologistes de l’université McGill a combiné les plus grands référentiels de données génétiques disponibles, accumulant plus de 175’000 séquences provenant de plus de 27’000 populations appartenant à 17’082 espèces animales. En utilisant l’année où chaque séquence génétique a été collectée et ses coordonnées spatiales, les auteurs ont pu déterminer si l’effet de l’être humain avait entraîné des tendances temporelles (augmentation, diminution, aucun effet) entre 1980 et 2016. Une étude antérieure de cette relation ne s’était pas intéressée au suivi de la diversité dans le temps, ni à la manière dont elle évoluait dans l’espace.
« Nous étions sûrs d’inclure ces facteurs dans notre étude car ils ont des effets importants sur les modèles de diversité génétique et ont une incidence sur les conclusions que nous tirons » déclare l’auteure principale Katie Millette, biologiste à McGill. « C’est actuellement notre meilleure estimation de la manière dont les humains affectent la diversité génétique animale dans le monde. Nous avons constaté que les humains ont un effet sur la diversité génétique animale, mais c’est une question d’espèce et d’échelle spatiale, car nous avons trouvé des cas presque égaux de tendances décroissantes ».
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La nécessité de surveiller les altérations génétiques des espèces animales
« La perte de diversité génétique entravera l’adaptation des populations végétales et animales à des environnements en mutation. Nous devons surveiller la diversité génétique de la faune afin de mieux comprendre où, quand et pourquoi elle diminue dans certains endroits et augmente dans d’autres. Sans cette connaissance, nous serons peu avertis des pertes de nombreuses espèces ou de la propagation envahissante d’autres » explique Andy Gonzalez, biologiste à McGill.
Les résultats augmenteront probablement les efforts des chercheurs pour combler les lacunes concernant les espèces pour lesquelles nous ne disposons pas de données sur la diversité génétique, et les inciteront à intensifier leurs efforts de surveillance à l’échelle mondiale afin de pouvoir comprendre les causes des changements temporels dans la diversité génétique des espèces.