Le 25 mai 2022, on dénombrait plus de 529 millions de personnes dans le monde infectées au moins une fois par le SARS-CoV-2. Le virus a causé la mort de plus de 6,2 millions de personnes. Bien que de nombreux progrès soient réalisés en termes de prévention, de diagnostic, de traitements ainsi qu’au niveau de l’accessibilité des vaccins, les symptômes durables de la COVID-19 (COVID long), après la phase aiguë, ne sont encore pas pleinement connus et compris. Récemment, une étude américaine démontre l’ampleur des effets à long terme de cette infection, même sur des personnes n’ayant pas été hospitalisées. Ces dernières présentent encore, 15 mois après l’infection, des sensations de brouillard cérébral, de la fatigue, des myalgies et des symptômes neurologiques variés. Les « Covid longs » se multiplient et leur prise en charge est un enjeu de société, tant du point de vue économique qu’en matière de santé publique.
De nombreuses personnes infectées par le SARS-CoV-2 présentent un dysfonctionnement neurologique, pulmonaire, cardiaque et gastro-intestinal persistant, après la phase respiratoire aiguë de la maladie. On les nomme communément les « Covid longs ». Les manifestations neurologiques, dans ces cas précis, surviennent souvent chez les personnes présentant des symptômes respiratoires initiaux légers et n’ayant jamais nécessité d’hospitalisation. L’amélioration des symptômes et de la qualité de vie est très lente, fluctuante et parfois incomplète, selon l’OMS. Néanmoins, il existe très peu d’études sur les symptômes à long terme de cette maladie chez les patients non hospitalisés. Le syndrome de longue durée de la COVID-19 demeure incertain.
D’ailleurs, récemment, une étude suédoise révélait une nouvelle caractéristique de cette maladie : une infection COVID-19 — quel que soit son degré de gravité — multiplie par 33 le risque de développer une embolie pulmonaire durant le mois suivant. Les risques de thrombose et d’hémorragie demeurent élevés respectivement pendant les deux et trois mois suivant l’infection.
C’est dans ce contexte de volonté de caractériser le syndrome de longue durée de la COVID-19, qu’une équipe du Northwestern Medicine — système de santé à but non lucratif affilié à la Northwestern University Feinberg School of Medicine, à Chicago — a défini l’évolution des symptômes neurologiques et la récupération autoperçue des « Covid longs » non hospitalisés, jusqu’à 15 mois après leur infection. La persistance des symptômes tels que le brouillard cérébral, ainsi que l’apparition de signes d’un dysfonctionnement du système nerveux, démontrent la complexité de cette maladie. Leur étude est publiée dans la revue Annals of Clinical and Translational Neurology.
Une longue étude sur les COVID longs…
Cette nouvelle étude rapporte la plus longue période de suivi des symptômes neurologiques à long terme, affectant les patients non hospitalisés, partout dans le monde.
Les scientifiques ont étudié des patients évalués initialement entre mai et novembre 2020 présentant de légers symptômes initiaux de COVID-19 — toux transitoire, mal de gorge, etc. — et n’ayant jamais dû être hospitalisés pour une pneumonie ou un faible taux d’oxygène. Cette étude de suivi comprenait 100 patients, 50 SARS-CoV-2 positifs en laboratoire et 50 négatifs. Les patients ont rempli des questionnaires téléphoniques sur leurs symptômes neurologiques, impression subjective de guérison et de qualité de vie.
Seuls 52 patients ont terminé l’étude de suivi. Parmi eux, l’âge moyen était de 43 ans, 73% étaient des femmes, 77% ont reçu un vaccin COVID-19 et la plupart ont continué à ressentir des symptômes neurologiques, de la fatigue et une qualité de vie compromise de 11 à 18 mois, après le début de la maladie.
Plus précisément, bien que dans l’ensemble il n’y a pas eu de changement significatif dans la fréquence de la plupart des symptômes neurologiques entre la première évaluation et les évaluations de suivi, les chercheurs ont constaté une augmentation de la variation de fréquence cardiaque et de la pression artérielle (passant de 35% à 56%), ainsi que des symptômes gastro-intestinaux (passant de 27% à 48%). Par ailleurs, la perte de goût et d’odorat a diminué, passant respectivement de 63% et 58% lors des premiers rendez-vous, à 27% et 21% lors des rendez-vous de suivi.
Il faut préciser que les résultats font suite à une précédente étude de l’équipe de recherche, datée de mars 2021. Dans cette dernière, ils ont démontré que 85% des Covid longs présentent quatre symptômes neurologiques ou plus ayant un impact sur leur qualité de vie et, chez certains patients, sur leurs capacités cognitives.
Igor J. Koralnik, chef des maladies neuro-infectieuses et de la neurologie mondiale chez Northwestern Medicine, déclare dans un communiqué : « Nous avons été surpris par la persistance de la plupart des symptômes neurologiques invalidants de nos patients, et par l’apparition tardive de symptômes suggérant un dysfonctionnement du système nerveux autonome ».
Bien que les patients aient signalé des améliorations dans leur récupération, leur fonction cognitive et leur fatigue, et la qualité de vie, sont restées inférieures à la population moyenne des États-Unis. Comme mentionné précédemment, 77% des patients avaient été vaccinés contre la COVID-19, mais le vaccin n’a pas eu d’impact positif ou néfaste sur la fonction cognitive ou la fatigue.
Ainsi, les auteurs concluent que les Covid longs non hospitalisés continuent de ressentir des symptômes tels que brouillard cérébral, engourdissements/picotements, maux de tête, étourdissements, vision floue, acouphènes et fatigue, près de 15 mois après l’infection initiale.
Igor Koralnik ajoute : « À mesure que de nouvelles variantes émergent et que le nombre de patients touchés par le COVID long augmente, nous concentrons désormais nos recherches sur la compréhension de la cause profonde du COVID long. Nous concevons également des interventions pour améliorer la prise en charge de ces patients et trouver les meilleures options de traitement pour eux ».
La Clinique Neuro COVID-19, spécialiste des symptômes à long terme de l’infection
Igor J. Koralnik a fondé et supervise la clinique Neuro COVID-19 du système de santé du Northwestern Medicine. À ce jour, la clinique Neuro COVID-19 a traité près de 1400 Covid longs à travers les États-Unis. Les patients, recevant des soins par l’intermédiaire de la clinique, ont accès à une équipe de soins expérimentée au sein du Programme des maladies neuro-infectieuses du Northwestern Medicine. Les connaissances approfondies de l’équipe concernant les maladies infectieuses qui affectent le système nerveux, l’aident à poser le diagnostic étiologique d’un patient. L’utilisation de la technologie de télésanté permet aux patients, se remettant de la COVID-19, de recevoir des soins plus facilement et en toute sécurité. Cela rend également la clinique accessible aux patients du monde entier.
Enfin, l’approche unique de la clinique Neuro COVID-19 façonnera les soins de longue durée pour les personnes souffrant de complications neurologiques de la COVID-19. Igor J. Koralnik souligne : « Nous fournissons aux patients des soins pour ces effets secondaires et étudions les effets à long terme de la COVID-19 sur le cerveau, le système nerveux et les muscles. En offrant des soins de suivi, nous comprendrons mieux comment gérer cette maladie. Les patients qui viennent dans cette clinique nous aideront à améliorer leurs propres soins et ils aideront également d’autres personnes qui auront des complications neurologiques de la COVID-19 à l’avenir ».
Si la caractérisation du Covid long semble se dessiner de plus en plus, à travers les études, la cause profonde de cette persistance des symptômes neurologiques reste inconnue. Les symptômes invalidants à long terme déstabilisent l’économie des pays, et peuvent sérieusement détériorer la qualité de vie de tout un chacun. Ils peuvent également mettre un terme à des carrières, à l’image de nombreux sportifs dans l’incapacité de retrouver leur niveau d’avant la COVID-19. La vigilance reste de mise quant à la protection des personnes vulnérables, mais aussi pour toute la population.