En utilisant le télescope spatial James Webb (JWST), des chercheurs ont découvert une supernova primitive à lentille gravitationnelle qui pourrait permettre de résoudre la « tension de Hubble ». Cette supernova, de « type Ia », est un marqueur de distance fiable pour mesurer le taux d’expansion de l’Univers, connu sous le nom de constante de Hubble. Les valeurs obtenues par le biais de cette méthode correspondent à celles dérivées des mesures de l’univers local.
La tension de Hubble est un débat cosmologique persistant dû à l’absence de consensus sur le taux exact d’expansion de l’Univers, à savoir la constante de Hubble (ou H0). Ce taux est déterminé par deux méthodes principales : une basée sur l’univers local et l’autre sur l’univers primitif. Cependant, ces deux valeurs, qui devraient logiquement être identiques, ne correspondent pas.
Des études récentes sur une supernova à lentille gravitationnelle pourraient mettre fin à ce débat en proposant une troisième méthode de mesure de la constante de Hubble. « La supernova a été nommée ‘supernova Hope’, car elle donne aux astronomes l’espoir de mieux comprendre l’évolution du taux d’expansion de l’Univers », a déclaré Brenda Frye de l’Université d’Arizona dans un article de blog de la NASA. Les résultats de cette étude sont en cours de soumission pour évaluation par des pairs.
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Un outil de mesure fiable des distances cosmiques
La supernova Hope a été repérée par JWST dans un amas de galaxies lointaines appelé G165. L’image transmise par le télescope montre trois points lumineux qui semblent s’étirer, absents lors de la capture de la même région par le télescope spatial Hubble en 2015.
La supernova a explosé dans l’univers primitif, alors âgé de seulement 3,5 milliards d’années. Cette période particulière a vu l’Univers engendrer l’équivalent de 300 masses solaires d’étoiles par an, favorisant des explosions fréquentes de supernovas.
Hope est une supernova de type Ia, formée à partir d’un système binaire comprenant une étoile de la séquence principale (de masse comparable à celle du Soleil) et une naine blanche. Cette dernière, en s’approchant suffisamment, commence à « aspirer » la matière de son étoile voisine, déclenchant une explosion thermonucléaire. L’uniformité des rayonnements émis par ces supernovas, surnommées « bougies standards », en fait d’excellents outils pour mesurer les distances cosmiques.
Plus important encore, les supernovas de type Ia permettent de déterminer la valeur de H0 de façon potentiellement plus fiable qu’avec les méthodes précédentes. Cette méthode consiste généralement à observer les supernovas dans l’univers local, de mesurer leur distance par rapport à la Terre puis leur vitesse d’éloignement, permettant ainsi de déduire la constante de Hubble. Bien que les valeurs ne correspondent pas toujours avec celles des méthodes standard, Hope pourrait servir de pont entre les deux méthodes, étant idéalement située dans l’Univers primitif.
Un effet de lentille gravitationnelle améliorant la précision de la constante de Hubble
L’image de Hope présente trois points lumineux distincts grâce à un effet de lentille gravitationnelle. Ce phénomène résulte de la courbure de l’espace-temps provoquée par un objet massif. Plus l’objet est massif, plus la déformation spatio-temporelle qu’il engendre est importante. La lumière traversant cette déformation est, elle aussi, courbée, modifiant l’image observée au-delà de la lentille.
Plus précisément, la lumière passant par la lentille gravitationnelle se courbe selon des trajectoires et des longueurs d’onde différentes. Elle peut donc atteindre les télescopes à des moments variés et sous des formes différentes. Dans le cas de Hope, la lentille gravitationnelle est un amas de galaxies situé entre elle et la Terre. Elle courbe sa lumière, donnant une image de trois points étirés positionnés à trois endroits distincts. L’effet de lentille fait également que l’image centrale est inversée par rapport aux deux autres.
« Pour obtenir trois images, la lumière a parcouru trois chemins différents. Comme chaque chemin avait une longueur différente et que la lumière voyageait à la même vitesse, la supernova a été photographiée dans cette observation de Webb à trois moments différents de son explosion », explique Frye.
L’analogie avec un miroir à trois volets et une personne est pertinente : il refléterait trois images différentes d’une personne assise en face. Un décalage temporel se produit, montrant par exemple la personne soulevant un peigne dans le miroir de droite, se coiffant dans celui de gauche et posant le peigne dans celui du milieu. Pour les supernovas, ce décalage temporel, ainsi que la distance de l’objet par rapport à la Terre, peut fournir une estimation fiable de H0.
Une valeur correspondant à celles de l’Univers local
Pour déterminer la valeur de H0 à partir des observations de Hope, le groupe d’étude a croisé les données de JWST avec celles des télescopes MMT du mont Hopkins et du grand télescope binoculaire du mont Graham. Cela a permis de confirmer que la supernova est effectivement située au sein d’une galaxie d’arrière-plan de la lentille gravitationnelle, née 3,5 milliards d’années après le Big Bang, ce qui en fait l’une des supernovas de type Ia les plus éloignées observées à ce jour. L’équipe a ensuite créé des modèles bidimensionnels décrivant la distribution de la matière au sein de l’amas lentille. Chaque modèle d’effet de lentille a été évalué en fonction de sa capacité à prédire le décalage temporel et les variations de luminosité de la supernova.
Les chercheurs ont obtenu une valeur de H0 de 75,4 km/s/Mpc avec une marge d’erreur de plus 8,1 ou moins 5,5. Cette valeur correspond à celles obtenues par les méthodes basées sur les mesures de l’univers local et entre en contradiction avec celles obtenues par les mesures de l’univers primitif. L’équipe espère réduire les incertitudes avec les futures données du troisième cycle d’observation de JWST.