Au cours des derniers mois, le déploiement de la nouvelle technologie de communication 5G s’est accentué avec la mise en place de nombreuses antennes dans différentes parties du monde. Mais pour John William Frank, professeur de santé publique à l’Université d’Édimbourg, ce déploiement de la 5G se fait peut-être un peu trop rapidement. En effet, le chercheur souligne l’absence d’étude complète et systématique sur les effets précis de ces rayonnements sur la santé humaine, et appelle à ralentir, voire arrêter momentanément la mise en place de la 5G en attendant des données de santé publique plus complètes. Sans tomber dans le complotisme, Frank rappelle que la nouvelle technologie nécessite un réseau extrêmement dense d’émetteurs/récepteurs, et que ses effets méritent d’être plus sérieusement étudiés.
La densité de l’émetteur requise pour la 5G signifie que davantage de personnes seront exposées aux champs électromagnétiques radiofréquence (RF-EMF), et à des niveaux potentiellement nocifs pour la santé, affirme le professeur John William Frank, de l’Usher Institute (Écosse). L’avènement de la technologie 5G a été salué par les gouvernements et entreprises comme une étape révolutionnaire, grâce à une augmentation massive de la connectivité sans fil et mobile à la maison, au travail, à l’école et dans la communauté publique.
Mais elle est devenue le sujet d’une controverse, alimentée par quatre domaines clés d’incertitude et de préoccupations scientifiques :
- Le manque de clarté concernant la technologie incluse dans la 5G ; et un corpus croissant mais loin d’être complet de recherches en laboratoire indiquant le potentiel biologiquement perturbateur des RF-EMF
- Un manque presque total (pour le moment) d’études épidémiologiques de haute qualité sur l’impact sur la santé humaine de l’exposition aux CEM 5G
- Une accumulation de preuves épidémiologiques de ces effets des générations précédentes d’exposition aux RF-EMF à des niveaux inférieurs
- Des allégations persistantes selon lesquelles certaines autorités nationales de réglementation des télécommunications n’ont pas fondé leurs politiques de sécurité RF-EMF sur les dernières données scientifiques, au milieu de conflits d’intérêts potentiels
La 5G utilise des ondes radio de fréquence beaucoup plus élevée (3 à 300 GHz) que par le passé, et elle utilise une technologie de support très nouvelle — et relativement peu évaluée, en matière de sécurité — pour permettre cette capacité de transmission de données plus élevée, souligne le professeur Frank.
Un réseau dense et technologiquement variable
Sa faiblesse inhérente signifie que des antennes cellulaires amplifiant la transmission sont généralement nécessaires tous les 100 à 300 m, ce qui est beaucoup plus dense spatialement que les antennes de transmission requises pour les technologies 2G, 3G et 4G plus anciennes, utilisant des ondes de fréquence plus basse. Un réseau de transmission dense est également nécessaire pour atteindre la connectivité promise par les développeurs de la 5G.
Les systèmes 4G existants peuvent desservir jusqu’à 4000 appareils utilisant des fréquences radio par kilomètre carré. Les systèmes 5G connecteront jusqu’à un million d’appareils par kilomètre carré, augmentant considérablement la vitesse de transfert de données (d’un facteur 10) et le volume de données transmises (d’un facteur 1000).
Alors que plusieurs examens majeurs des preuves existantes sur les effets néfastes potentiels de la 5G pour la santé ont été publiés au cours de la dernière décennie, ils ont été de qualité scientifique variable, selon Frank. Les limites de sécurité maximales autorisées pour l’exposition aux RF-EMF varient considérablement dans le monde.
De plus, les systèmes 5G ne sont pas un terme défini de manière cohérente, comprenant des technologies et des composants spécifiques assez différents. « Il est fort probable que chacune de ces nombreuses formes de transmission provoque des effets biologiques quelque peu différents, ce qui rend pratiquement impossible une recherche solide, complète et à jour sur ces effets », explique-t-il.
Un moratoire en attendant des études plus complètes
Des examens récents des données de laboratoire sur les RF-EMF indiquent que les expositions peuvent produire des effets de grande envergure, notamment sur la reproduction, le fœtus, l’oncologie, la neuropsychiatrie, la peau, les yeux et l’immunologie. Mais ces rayonnements n’ont absolument aucun lien avec la propagation de la COVID-19 rappelle le chercheur, contrairement à ce que tentent de faire croire un certain nombre de complotistes.
Toutefois, le principe de précaution concernant le peu d’éléments sanitaires que nous possédons sur une exposition massive à la 5G devrait être une raison suffisante pour appeler un moratoire sur cette exposition, en attendant une enquête scientifique adéquate sur ses effets indésirables sur la santé, indique le chercheur. Il n’y a pour le moment aucune justification impérieuse de santé ou de sécurité publique pour le déploiement rapide de la 5G, conclut Franck.