En astrophysique, il existe ce que l’on appelle des « murs de domaines ». Ces structures hypothétiques sont d’immenses «feuilles d’espace-temps» qui séparant différentes régions de l’univers. Dans une nouvelle étude, il est suggéré que ces éléments sont apparus et ont disparu juste après le Big Bang et qu’ils pourraient ainsi être à l’origine des ondes gravitationnelles basse fréquence, de certains types de trous noirs et même expliquer en partie la matière noire.
Les murs de domaines sont envisagés dans des théories visant à expliquer certains phénomènes non résolus en astrophysique, comme l’origine de la gravité et d’autres forces fondamentales. Selon certains chercheurs, si les murs de domaines avaient persisté dans l’univers, ils auraient pu constituer une source d’énergie majeure et influencer l’évolution globale de l’univers. Ils ajoutent que si c’était le cas, nous devrions pouvoir observer des preuves de leur existence ou de leurs effets aujourd’hui. Or, aucune preuve directe ne soutient leur présence.
Dans une nouvelle étude publiée sur le serveur de prépublication arXiv, un groupe de chercheurs dirigé par Ricardo Ferreira, cosmologiste à l’Université de Coimbra au Portugal, suggère que les murs domaines se sont formés peu après le Big Bang, ont grandi rapidement, puis se sont majoritairement détruits en très peu de temps. Cependant, leur brève existence aurait engendré des perturbations notables dans l’espace-temps. De plus, selon l’étude, certains des murs de domaines qui ne se seraient pas effondrés complètement pourraient s’être transformés en trous noirs. Ces derniers pourraient être suffisamment nombreux pour constituer une partie significative de la matière noire.
Brisure de symétrie
Selon de nombreux chercheurs, le Modèle standard de la physique des particules (cadre théorique expliquent les interactions des particules élémentaires à travers les forces fondamentales) présente des lacunes. De plus, il n’explique pas certains phénomènes cosmologiques.
Pour répondre à ce problème, les physiciens de la nouvelle étude ont proposé des extensions au modèle standard en y introduisant les « brisures de symétrie ». Il s’agit d’un processus dans lequel des conditions uniformes (symétriques) commencent à se différencier à mesure que l’univers se refroidit et se dilate. La transition peut mener à la création de structures cosmiques (initialement uniformes) stables et distinctes. Dans le cadre de l’extension du Modèle standard, les murs de domaines sont envisagés ici comme des conséquences de la brisure de symétrie. Ils sont conceptualisés comme des barrières entre différentes « phases » de l’univers, au cours de cette transition.
Des ondes gravitationnelles
Dans cette étude, les chercheurs se sont concentrés sur une version de brisure de symétrie théoriquement produite dans les conditions initiales de l’univers, juste après le Big Bang, où la température avoisinait les 2000 milliards de degrés Celsius. L’équipe a utilisé des simulations informatiques pour modéliser et visualiser l’évolution des murs de domaines sous cette brisure de symétrie. En s’élevant et en s’effondrant ensuite, ces morceaux d’espace-temps auraient généré des perturbations dites « ondes gravitationnelles stochastiques », qui peuvent se propager à travers l’Univers.
Avec le temps et l’expansion continue de l’univers, les ondes gravitationnelles émises par ces murs de domaines s’étirent à des longueurs d’onde de plus en plus grandes (et donc à des fréquences de plus en plus basses). Elles auraient aujourd’hui des fréquences dans la gamme des nanohertz, correspondant au fond d’ondes gravitationnelles détecté récemment en exploitant des pulsars millisecondes (des étoiles à neutrons qui tournent extrêmement rapidement sur elles-mêmes, jusqu’à plusieurs centaines de rotations par seconde). Cependant, l’origine exacte de ces ondes reste un sujet de recherche active.
Les murs de domaines à l’origine de certains trous noirs ?
Selon la récente analyse, les murs de domaines qui se sont formés après le Big Bang ne se sont pas tous effondrés. Certains auraient survécu grâce à une sorte de « bulle » d’espace-temps, plus grande que le rayon de l’univers observable à cette époque. Par suite, à mesure que l’univers s’expandait, ces murs auraient finalement intégré l’univers observable, dans lequel ils se seraient manifestés comme des régions où la densité d’énergie était anormalement élevée. Ces « surdensités », comme l’appellent les chercheurs, peuvent s’effondrer sous leur propre gravité pour former des trous noirs. Ces derniers sont qualifiés de « primordiaux », car ils résulteraient donc des phénomènes survenus peu après le Big Bang, et non pas de l’effondrement de grandes étoiles. Les trous noirs primordiaux résultant de ce mécanisme hypothétique auraient une masse faible (pour des trous noirs), à savoir seulement quelques fois la masse du Soleil.