En septembre de l’année dernière, la NASA a annoncé la découverte de K2-18b, une exoplanète sous-neptunienne qui comporte non seulement du dioxyde de carbone et du méthane en abondance, mais également des traces de sulfure de diméthyle (DMS). Exclusivement produit par des formes de vie sur Terre, ce dernier pourrait placer l’exoplanète en tête de liste des endroits les plus prometteurs pour abriter la vie extraterrestre, à notre connaissance.
Située à environ 120 années-lumière de la Terre, K2-18b est une exoplanète sous-neptunienne (8,6 fois la masse de la Terre) orbitant autour d’une étoile naine froide dans la constellation du Lion. L’absence de planètes similaires dans le système solaire implique que les caractéristiques de ce type d’exoplanètes sont particulièrement mal comprises. En effet, la nature de leurs atmosphères fait depuis des décennies l’objet de débats.
Il a été suggéré que les sous-neptuniennes, dont K2-18b, pourraient être des exoplanètes hycéennes (un terme combinant les mots « hydrogène » et « océan »), c’est-à-dire recouvertes d’un océan liquide et possédant une atmosphère riche en hydrogène. En vue de ces caractéristiques, les astronomes estiment ces exoplanètes constituent des cibles prometteuses pour la recherche de la vie extraterrestre — sans compter que les sous-neptuniennes sont les exoplanètes les plus courantes dans la galaxie.
D’autre part, « traditionnellement, la recherche de vie sur les exoplanètes s’est concentrée principalement sur les planètes rocheuses plus petites, mais les mondes hycéens plus grands sont nettement plus propices aux observations atmosphériques », a expliqué Nikku Madhusudhan, astronome à l’Université de Cambridge, dans un communiqué de la NASA. En analysant les données spectrométriques du télescope spatial James Webb, Madhusudhan et ses collègues rapportent des découvertes intéressantes suggérant que K2-18b est propice à la vie.
Des indices d’habitabilité encore à confirmer
Afin d’analyser l’atmosphère de K2-18b, les chercheurs se sont appuyés les puissants capteurs de James Webb pour analyser son spectre lumineux. Cependant, l’analyse s’est heurtée à un défi de taille étant donné que la lumière de la planète est presque complètement éclipsée par celle de son étoile hôte.
Pour contourner cet obstacle, l’équipe de recherche a plutôt analysé la lumière de l’étoile lorsqu’elle traversait l’exoplanète. Il est en effet courant de détecter le transit de l’exoplanète devant son étoile hôte lorsque celle-ci présente une légère baisse de luminosité. Cela signifie qu’une partie du rayonnement de l’étoile traverse l’exoplanète avant d’atteindre les capteurs du télescope, permettant ainsi entre autres, dans le cas présent, de déduire sa composition atmosphérique. Selon les experts, James Webb a montré en une seule fois une précision comparable à 8 observations avec Hubble étalées sur plusieurs années.
Le premier ensemble de données de James Webb révèle des caractéristiques qui correspondent à celles d’une planète rocheuse possédant un océan liquide en surface et une atmosphère riche en dioxyde de carbone et en méthane. Mis à part ces caractéristiques, l’absence apparente d’ammoniac, d’eau et de monoxyde de carbone suggère que K2-18b est effectivement une exoplanète hycéenne.
Selon les chercheurs, l’importante concentration de méthane dans son atmosphère indique qu’elle abrite potentiellement une forme de vie aquatique. La présence de bactéries méthanophores acétotrophes (productrices de méthane) pourrait par exemple expliquer une telle concentration de méthane atmosphérique. Il s’agirait d’ailleurs de la première fois que du méthane est détecté en abondance sur une exoplanète relativement petite. D’autre part, des traces de sulfure de diméthyle (DMS) — une molécule habituellement produite par le phytoplancton sur Terre — ont également été détectées.
Cependant, le deuxième ensemble de données collectées par James Webb indique également que K2-18b pourrait être une planète gazeuse dépourvue de surface rocheuse, qui ne pourrait ainsi pas abriter la vie, comme le suggère une récente étude distincte. En effet, même si elle se situe dans la zone habitable de son étoile hôte et abrite des molécules carbonées, cela ne signifie pas nécessairement qu’elle soit propice à la vie.
Par exemple, sa taille suggère qu’elle pourrait posséder un vaste manteau de glace de haute densité sous sa surface liquide, à l’instar de Neptune, mais avec une atmosphère plus fine et riche en hydrogène. Cela suggère que son océan de surface pourrait être trop froid et trop hostile pour abriter des microorganismes. Il est également possible que cet océan soit trop chaud pour que la vie s’y développe.
Par ailleurs, la présence de DMS nécessite encore une validation plus approfondie avant de pouvoir être confirmée. « Les prochaines observations de Webb devraient pouvoir confirmer si le DMS est effectivement présent dans l’atmosphère de K2-18 b à des niveaux significatifs », indique Madhusudhan. L’équipe prévoit de consacrer les dix prochains mois à analyser de nouvelles données dans ce sens, provenant du spectrographe MIRI (Mid-Infrared Instrument) de James Webb.