Récemment, la société spécialisée dans le développement de dispositifs militaires Ghost Robotics a présenté un robot-chien digne des pires scénarios de science-fiction, équipé d’un fusil de précision. Comme prévu, cette annonce n’est pas passée inaperçue, des experts n’ayant pas hésité à critiquer lourdement le robot-chien destiné à un usage militaire.
Relativement peu d’informations ont été publiées concernant l’engin, mais selon une publication Instagram de SWORD International, un fabricant d’armes qui a conçu le fusil, la machine est baptisée « SPUR », pour Special Purpose Unmanned Rifle (Fusil sans pilote à usage spécial). Le SPUR représente probablement la première création de Ghost Robotics équipée d’une arme. D’après SWORD, le canon contrôlé à distance offre « un tir de précision jusqu’à 1200 mètres ».
Selon certains experts, cette technologie marque un jalon important dans le développement de robots capables de tuer, soulevant des questions étiques et légales sur leur autorisation et utilisation. Nous avons notamment interrogé Toby Walsh, professeur d’IA à l’UNSW Sydney.
Trust My Science : Que pensez-vous de cette technologie ? Est-elle dangereuse pour notre avenir ?
« Comme des milliers de mes collègues – d’autres chercheurs en IA – je suis profondément préoccupé par ce genre de développements. Nous ne savons pas à quel point ces robots seront autonomes », déclare Walsh. Mais nous avons vu un robot techniquement similaire utilisé de manière semi-autonome par Israël récemment, pour assassiner le principal scientifique nucléaire iranien, ajoute-t-il.
Un engin pas encore autonome, mais plus pour très longtemps…
Jusqu’ici, nous ne savons pas à quel point les différents systèmes du robot-chien de Ghost Robotics sont autonomes. Si pour le moment son déplacement est contrôlé par un humain, le système de tir pourrait très bien être automatisé à l’avenir, du moins partiellement. Sans compter que de nombreuses organisations armées à travers le monde utilisent déjà des systèmes de drones semi-autonomes, parfois faits maison, dont certains semblent très efficaces.
Latest lethality 6.5 #creedmoor sniper payload from @SWORDINT. Check out the latest partner payloads @AUSAorg Wash DC. Keeping US and allied #sof #warfighter equipped with the latest innovations. @USSOCOM #defense #defence #NationalSecurity #drone #robotics pic.twitter.com/Dvk6OvL3Bu
— Ghost Robotics (@Ghost_Robotics) October 11, 2021
« J’espère que cela ajoutera de l’urgence aux discussions en cours à l’ONU pour réglementer cet espace, et fera taire les voix qui disent que la technologie est loin d’être au point », a déclaré Walsh, faisant référence au robot-chien de Ghost Robotics.
Bien entendu, il existe quelques avis divergents, notamment celui de Michael Horowitz, professeur de sciences politiques à l’université de Pennsylvanie et expert en systèmes d’armes autonomes. Il a déclaré qu’il considérait le robot-chien de Ghost comme similaire au type de drone armé déjà utilisé par de nombreuses armées internationales.
« Étant donné que le système est contrôlé par des humains, et que d’autres pays ont développé des systèmes terrestres robotiques armés et téléguidés, je ne suis pas sûr que ce système soulève de nouvelles questions éthiques au-delà de celles soulevées par tout système téléguidé, que ce soit dans les airs ou au sol », a déclaré Horowitz à Futurism. « Mais j’aurais besoin d’en savoir plus sur les détails du système pour en être sûr ».
Une façon d’écraser son concurrent Boston Dynamics ?
La décision d’armer un robot-chien place Ghost devant son concurrent Boston Dynamics en matière d’armement, qui a surpris le monde entier avec ses démonstrations techniques mais s’est publiquement engagé à ne pas armer ses conceptions. Un moyen facile pour la société de se placer en tête d’un domaine toujours très sollicité, celui des technologies d’armement.
Souvenez-vous, Boston Dynamics a été très en colère au début de l’année lorsque des artistes ont monté un pistolet de paintball sur son robot-chien Spot, qui est très similaire en taille et en fonctions à celui de Ghost, basé sur son modèle Q-UGV Vision 60.
« PS : ce robot ressemble à celui d’un épisode de la série ‘Black Mirror’. Ce n’est pas surprenant. Il nous emmène dans un monde dystopique que l’on retrouve dans cette série. Mais n’oublions pas que nous ne sommes pas obligés de finir dans ‘Black Mirror’ », nous écrit Walsh en faisant suite à sa première réponse. « Des discussions sont en cours pour réglementer le déploiement de ces armes. Nous devrions exhorter nos dirigeants politiques à reprendre ces discussions de toute urgence ».