En effectuant une visite de routine en avril dernier dans le bassin du geyser Norris du parc national de Yellowstone, aux États-Unis, des géologues ont repéré un nouveau bassin hydrothermal. Mesurant environ quatre mètres de diamètre, il aurait commencé à se former au mois de décembre de l’année dernière et s’est progressivement élargi à coups de multiples petites explosions s’étendant sur plusieurs semaines.
Les explosions hydrothermales se produisent lorsque l’eau souterraine surchauffée accumule de la pression et passe rapidement de l’état liquide à l’état de vapeur. Elles se déclenchent dans des zones où les réservoirs d’eau peu profonds sont interconnectés et atteignent des températures allant jusqu’à 250 °C. L’eau entre habituellement en ébullition à partir de 100 °C, mais son point d’ébullition augmente sous l’effet de la pression, rendant l’eau instable et susceptible d’exploser brutalement en cas de dépressurisation.
Une variation soudaine de la pression peut alors provoquer une transition de phase rapide, perturbant les structures rocheuses environnantes et générant de violentes explosions, qui laissent derrière elles des cratères remplis d’eau. Ce type d’événement peut être déclenché par divers facteurs, tels qu’une activité sismique, un dégel saisonnier, l’érosion ou encore l’affaiblissement des roches sous l’effet de fluides hydrothermaux corrosifs.
Le Yellowstone, structure volcanique formée à la suite d’une superéruption survenue il y a environ 640 000 ans, est une caldeira dont les manifestations hydrothermales sont fréquentes. La température du réservoir magmatique situé sous la région dépasserait les 800 °C, exposant en permanence les roches environnantes à une chaleur intense.
Le geyser Norris, un laboratoire d’instabilité terrestre
Le bassin du geyser Norris, en particulier, a été le théâtre de nombreuses explosions hydrothermales, telles que celle du geyser Porkchop en 1989, ou encore celle survenue dans la région de Porcelain Terrace le 15 avril 2024. Grâce à la surveillance par satellite à haute résolution et à l’installation in situ de nouvelles antennes de détection, le suivi de ces phénomènes s’est sensiblement amélioré.
Les géologues du parc national de Yellowstone ont repéré le nouveau bassin hydrothermal le 10 avril 2025, alors qu’ils effectuaient une maintenance de routine sur les stations de mesure de température du bassin du geyser Norris, à l’ouest de la région de Terrace Island. Mesurant près de 4 mètres de diamètre et rempli d’une eau chaude bleue turquoise à 43 °C, le bassin était facile à identifier puisqu’un terrain vague, dépourvu d’eau, occupait jusqu’alors cet emplacement.

Les images satellites à haute résolution ont révélé qu’aucune nouvelle formation géologique n’était apparue dans cette zone avant le 19 décembre 2024. Puis, le 6 janvier 2025, une petite dépression a commencé à se dessiner, jusqu’à former une nouvelle nappe d’eau le 13 février. Il est notable que les antennes de surveillance sur place n’ont enregistré aucune explosion significative correspondant à la chronologie établie par les données satellitaires.
Ces antennes reposent sur des analyses infrasoniques, qui permettent à la fois de « capter » les explosions et d’en localiser l’origine. Plusieurs signaux de faible intensité ont toutefois été détectés en provenance de la zone du nouveau bassin. Le plus marqué a été enregistré le 25 décembre 2024, mais il restait tout de même trop faible pour être associé à un signal sismique. D’autres signaux similaires ont été relevés les 15 janvier et 11 février 2025.
Une formation lente, presque silencieuse
« Il est clair que la nouvelle caractéristique thermique ne s’est pas formée lors d’un seul événement explosif majeur. Il semble plutôt que la formation se soit produite à la suite de multiples petits événements qui ont d’abord projeté des roches, puis de la boue siliceuse sur une courte distance, créant une petite fosse qui s’est remplie d’eau riche en silice », écrivent dans un billet de blog Michael Poland, géophysicien à l’U.S. Geological Survey, et Jeff Hungerford, géologue du parc national de Yellowstone.
L’équipe de recherche a constaté que le bassin était ceinturé de nombreux petits blocs rocheux d’environ 30 centimètres de diamètre, recouverts d’une fine couche de boue sableuse gris clair et à grains fins. Deux strates distinctes apparaissaient également sur les parois du bassin ; l’une d’elles n’aurait été déposée que lorsque le niveau de l’eau était plus élevé.
« La dernière formation thermale du bassin de Norris Geyser, sans doute la zone la plus dynamique du parc national de Yellowstone, illustre la diversité des modes d’évolution des formations hydrothermales », soulignent les deux experts. « Certaines se forment lors de brefs et violents épisodes de changement. D’autres peuvent se former beaucoup plus progressivement, comme la nouvelle formation découverte près de Tree Island, qui semble avoir commencé à se constituer à Noël 2024 », concluent-ils.