Les formes graves de COVID-19 touchent davantage les hommes. Pourquoi ?

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Berlin, mars 2020. | Tobias Schwarz/AFP/Keystone
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Nous savons que les personnes âgées ainsi que celles souffrant déjà d’une maladie sont les plus vulnérables au COVID-19, mais un autre facteur de risque est apparu : être de sexe masculin. Bien que les chercheurs ne sachent pas exactement pourquoi cela est le cas, certaines pistes sont actuellement mises en lumière.

Les premiers signes d’importance du sexe dans la gravité de COVID-19 sont apparus dans les dossiers de l’hôpital de Wuhan, peu de temps après que la ville ait entamé son confinement. Le 30 janvier, une équipe de l’École de médecine de l’Université Jiaotong de Shanghai a publié un rapport concernant 99 patients de COVID-19 admis à l’hôpital de Jinyintan Wuhan entre le 1er janvier et le 20 janvier. Ces derniers ont constaté que parmi les personnes admises, les hommes étaient deux fois plus nombreux que les femmes.

À noter qu’il y a une différence de sexe entre les cas de décès également. En effet, les données sur la mortalité provenant de 21 hôpitaux de Wuhan entre le 21 et le 30 janvier, ont révélé que 75% des personnes décédées étaient des hommes.

Depuis lors, des études plus importantes dans d’autres pays ont confirmé ces résultats antérieurs. Par exemple, en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord, environ 70% des patients gravement malades admis aux soins intensifs sont des hommes, et une proportion plus élevée d’hommes que de femmes sont décédés. Une autre étude, menée sur plus de 4000 patients COVID-19, dans les hôpitaux de New York, a révélé que 62% d’entre eux étaient des hommes.

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À Londres, un travailleur de la santé place un homme dans une ambulance. Crédits : Justin Setterfield/Getty Images

La différence ne semble pas être due à des taux d’infection différentiels : l’étude de New York, par exemple, a constaté qu’un nombre égal d’hommes et de femmes contractent le virus, mais que les hommes sont plus susceptibles de tomber gravement malades, et d’en mourir.

Il a également été constaté que deux maladies émergentes à coronavirus, le SRAS et le MERS, affectaient les hommes de manière disproportionnée. Cependant, ce n’est pas le cas des infections respiratoires en général.

Le rapport sur l’Angleterre, le Pays de Galles et l’Irlande du Nord a également examiné les données sexuelles sur les patients gravement malades atteints de pneumonie virale entre 2017 et 2019, principalement en raison de la grippe. Les chercheurs ont alors découvert qu’il y avait aussi un excès d’hommes dans cette cohorte, mais le ratio était moins extrême : 54 décès masculins, pour 46 décès féminins.

Le tabagisme rend les cellules plus sensibles au virus

L’une des raisons possibles concernant cette différence de sexe, serait le tabagisme. En Chine, plus de la moitié des hommes fument, mais seulement 5% des femmes le font. Le tabagisme semble provoquer le fait que les cellules pulmonaires produisent davantage d’une protéine de surface appelée ACE2 (enzyme de conversion de l’angiotensine 2), que le virus exploite pour infecter les cellules. Cela peut signifier que le tabagisme rend les cellules plus sensibles au virus.

Cependant, selon une analyse de Hua Linda Cai de l’Université de Californie à Los Angeles, cette hypothèse n’est pas étayée par les données : les fumeurs ne représenteraient qu’environ 12,5% des personnes gravement malades du COVID-19 en Chine (ce qui est bien inférieur à la proportion de fumeurs dans la population générale).

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Une autre possibilité est que les hommes (ceux plus âgés en particulier), sont généralement en moins bonne santé que les femmes. En effet, la population masculine a tendance à montrer des taux d’obésité, d’hypertension artérielle, de diabète, de cancer et de maladies pulmonaires et cardiovasculaires plus élevés. Tous ces éléments ne font qu’aggraver la maladie COVID-19.

Lorsque les auteurs de l’étude de New York ont pris en compte ces conditions dans leur analyse, ils ont constaté que le sexe n’était plus l’un des principaux facteurs de risque de développer une forme sévère de COVID-19.

Des différences immunitaires entre hommes et femmes

Une autre idée soulevée par les chercheurs est que les femmes pourraient naturellement avoir des défenses immunitaires plus fortes : « Il existe des différences substantielles dans le système immunitaire entre les hommes et les femmes et celles-ci ont un impact significatif sur les résultats d’une large gamme de maladies infectieuses », explique l’immunologue Philip Goulder de l’Université d’Oxford.

Une différence clé est que les femmes ont deux chromosomes X par cellule, tandis que les hommes n’en ont qu’un. « Un certain nombre de gènes immunitaires critiques sont situés sur le chromosome X », explique Goulder. « En particulier le gène d’une protéine appelée TLR7, qui détecte les virus à ARN simple brin comme le coronavirus. En conséquence, cette protéine est exprimée deux fois sur de nombreuses cellules immunitaires chez les femmes par rapport aux hommes : la réponse immunitaire au coronavirus est donc amplifiée chez les femmes », ajoute-t-il.

Il existe également des preuves que les hormones sexuelles féminines, telles que les œstrogènes et la progestérone, renforcent le système immunitaire. Cependant, ce fait n’a pas encore été spécifiquement étudié dans le cas du COVID-19.

Les hommes : moins « hygiéniques » que les femmes ?

Une autre possibilité soulevée par les chercheurs, est que les hommes sont tout simplement moins hygiéniques. « Ils sont moins susceptibles de se conformer aux mesures sanitaires de base telles que le lavage des mains », explique Kunihiro Matsushita de l’Université Johns Hopkins.

Une étude des différences entre les sexes en Chine a révélé que les hommes atteints de COVID-19 étaient également plus susceptibles d’être porteurs d’autres virus, y compris la grippe (et autres bactéries), et il est possible que cela puisse augmenter la gravité des symptômes de COVID-19.

Sources : The Lancet, medRxiv, The Lancet Correspondance, Nature immunology

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