R5519, c’est le nom de la nouvelle galaxie que viennent de découvrir des astronomes australiens du centre ASTRO 3D. Cette galaxie, située à 11 milliards d’années-lumière de notre système solaire est non seulement immense, mais elle arbore une forme d’anneau, ce qui est particulièrement rare dans l’univers primitif. Encore une découverte qui devrait remettre en question certaines théories sur la formation des premières galaxies…
Cet « anneau de feu cosmique » a une masse équivalente à celle de notre Voie lactée. Cette galaxie est cependant bien plus étendue : le « trou » en son centre a un diamètre deux milliards de fois plus grand que la distance Terre-Soleil ! En d’autres termes, il est trois millions de fois plus grand que le diamètre du trou noir supermassif de la galaxie Messier 87. R5519 est donc une galaxie géante peu banale, qui intrigue beaucoup les experts. Sa découverte vient d’être annoncée dans la revue Nature Astronomy.
Les « dommages » d’une collision entre galaxies
De masse similaire à la Voie lactée, certes, mais beaucoup plus productive selon Tiantian Yuan, auteure principale de l’étude : « Elle produit des étoiles à un rythme 50 fois supérieur à la Voie lactée ! ». La majorité son activité a lieu dans son anneau, ce qui lui confère un véritable aspect d’anneau de feu. En collaboration avec des collègues de l’Australie, des États-Unis, du Canada, de la Belgique et du Danemark, le Dr Yuan a utilisé des données spectroscopiques recueillies par l’observatoire WM Keck à Hawaï et des images enregistrées par le télescope spatial Hubble de la NASA pour identifier cette structure inhabituelle.
La lumière stellaire diffuse, étendue à l’extérieur de l’anneau de formation d’étoiles, combinée à la vitesse radiale et à la présence d’une galaxie intruse à proximité, suggère qu’il s’agit d’un type de galaxie connu sous le nom de « galaxie annulaire collisionnelle », ce qui fait de R5519 la première du genre jamais repérée dans l’univers primitif.
Les galaxies à anneau sont constituées d’étoiles bleues massives, relativement jeunes et très brillantes. Il en existe deux types, qui se distinguent par les conditions de leur apparition ; le plus courant se forme à la suite de processus internes. Les galaxies à anneau collisionnelles se forment, comme leur nom l’indique, lorsqu’une petite galaxie passe par le centre d’une plus grande galaxie (voir illustration suivante en vidéo).
L’objet de Hoag, du nom de l’astronome Art Hoag qui l’a découverte en 1950, est l’une des galaxies à anneau les plus célèbres. Elle prend la forme d’un anneau presque parfait, constitué d’étoiles bleues, avec en son centre un noyau d’étoiles jaunes. Elle se situe dans la constellation du Serpent, à environ 600 millions d’années-lumière. Aucune autre galaxie n’a pu être détectée à proximité de l’objet de Hoag et son noyau possède une vitesse relative à l’anneau trop faible pour envisager une formation par collision frontale. En revanche, l’anneau pourrait s’être formé suite au passage d’une galaxie à proximité ; certains astronomes estiment que la rencontre se serait produite il y a environ 2 à 3 milliards d’années.
Dans l’univers local, les galaxies à anneaux collisionnelles ne représentent qu’environ 0,01% des galaxies et sont formées par des collisions galactiques frontales, déclenchant des ondes de densité à propagation radiale, qui génèrent la formation d’un anneau. Ces objets sont d’ores et déjà examinés de manière approfondie dans le cadre de l’étude des disques minces, prémices des galaxies. Toutefois, les scientifiques disposaient jusqu’à présent de peu d’informations concernant les galaxies annulaires collisionnelles plus éloignées.
Les images de R5519 proviennent d’il y a environ 10,8 milliards d’années, soit à peine trois milliards d’années après le Big Bang ! Contrairement aux prédictions précédentes, cette nouvelle étude suggère que les galaxies annulaires collisionnelles ont toujours été extrêmement rares.
De nouveaux indices sur la formation des galaxies spirales
Les auteurs de l’étude soulignent que leur découverte offre une voie unique pour étudier les ondes de densité dans les jeunes galaxies, mais aussi pour déterminer les conditions d’évolution cosmique des disques en spirale et des groupes de galaxies. Selon Ahmed Elagali, du Centre international de recherche en radioastronomie en Australie occidentale et co-auteur de l’étude, la galaxie R5519 pourrait fournir de nouveaux éléments pour déterminer à quel moment les galaxies spirales – telle que la nôtre – sont apparues.
Le professeur Kenneth Freeman, de l’Université nationale australienne et co-auteur de l’étude, explique que la formation des galaxies à anneau collisionnelles nécessite la présence d’un disque mince dans la galaxie, avant que la collision n’ait lieu. Composés de gaz, de poussières et d’étoiles, ainsi que d’un bulbe en leur centre, ces disques minces sont également essentiels à la formation des galaxies spirales ; avant leur assemblage, les galaxies sont dans un état désordonné. Ces disques sont apparus progressivement après le Big Bang.
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Or, dans le cas de cette galaxie à anneau, il s’agit d’une observation de l’univers primitif d’il y a 11 milliards d’années, à une époque où les disques minces commençaient tout juste à s’assembler. À titre de comparaison, le disque mince de la Voie lactée a commencé à se former il y a « seulement » 9 milliards d’années environ. Selon Freeman, cette découverte indique donc que la formation des disques des galaxies spirales s’est produite sur une période plus longue que ne le pensaient les spécialistes jusqu’alors.